Psycho

Layinah : « Mon fils de 16 ans me dit qu’il est attiré par les garçons »

Rédigé par Abdelnour Zahrali | Vendredi 17 Mai 2024 à 15:00



Salam aleykoum, Mon fils de 16 ans m'a annoncé, par la force des choses, qu'il est attiré par les garçons. J'ai découvert une vidéo où il fait la « folle » avec des amies de son école. Je l'ai puni. Au-delà de tout ça, évidemment, il doit se comporter correctement en public, il l'a compris.

Évidemment, je ne le vis pas bien du tout, je suis même traumatisée. J'ai décidé avec son accord de mettre de côté son orientation sexuelle car tant qu'il n'est pas passé à l'acte, ce n'est pas un sujet étant donné que, quoi qu'il arrive, c'est trop tôt, même avec une femme. Par contre, il doit changer de comportement et ne plus être maniéré.

Je refuse d'accepter la chose et, en même temps, je ne peux pas aller dans son sens et le cautionner. Je suis tiraillée. Pour moi, c'est douloureux d'imaginer ça, je ne veux pas qu'il soit homosexuel... Et, en même temps, s'il est homosexuel comment lutter ? Y a-t-il quelque chose à faire ? Comme avec un enfant qui, par exemple, ne ferait que voler ou mentir ? Dois-je lui faire faire une roqya, l'emmener voir un psy ? Je place ma confiance en Allah évidemment, mais quelle souffrance c'est pour moi.

Abdelnour Zahrali, psychanalyste

Chère Layinah,

En tant que psychanalyste, je ne peux que vous recommander d’entretenir une bonne relation avec votre fils, quoiqu’il arrive, de maintenir un lien par lequel il va se sentir aimé et soutenu. La confiance que vous êtes en mesure de lui inspirer constitue le plus sûr moyen de représenter pour lui une référence.

La vie sexuelle d’un être représente un aspect très personnel de sa vie, c’est évident. C’est une question éminemment privée, profonde et sensible. L’orientation sexuelle constitue un choix véritable, sur le plan psychique j’entends. Si la religion entend décider comment ce choix doit être fait, d’autres paramètres sont à l’œuvre au sein de chaque être et sont liés à ce qu’il a vécu, à ce qu’il a vu et entendu, à ce qu’on lui a fait ou non. Chaque être peut être amené à suivre, à reproduire, ou à fuir, à contredire, selon ce qu’il aura vécu et la façon dont il l’aura vécu. Le choix qui résulte du vécu de chacun sera vécu comme son identité. Lorsque l’on rejette l’identité d’un être, on se coupe de lui, on ne lui reconnait pas le droit d’être ce qu’il est, et cela est de nature à provoquer chez lui une grande souffrance.

Votre fils est encore un enfant, mais plus pour longtemps. Un enfant qui vole ou qui ment, puisque vous faites ce parallèle, exprime avant tout quelque chose. Je ne pense pas qu’on soit menteur ou voleur de nature. D’une part, il est réducteur d’assimiler une personne à certains actes ou certains choix. Tel enfant n’est pas un voleur ou un menteur, mais il arrive à tel enfant de voler ou de mentir, ce qui n’est ni une fatalité ni une maladie, et comporte des raisons que l’on peut comprendre, en faisant preuve de patience et d’amour. Cet enfant n’est pas que cela. Et s’il se sent écouté, aimé et compris, il n’éprouvera plus le besoin de s’exprimer par des actes transgressifs.

Par ailleurs, une roqya a pour but d’annuler une influence extérieure, d’ordre magique ou démoniaque. Or la sexualité d’un être résulte à mon avis d’un processus interne, d’une chaine de causes à effets, et se construit à partir de son expérience intime. D’autre part, les psys n’ont pas pour fonction de redresser les êtres mais plutôt de les accompagner vers une meilleure connaissance d’eux-mêmes.

Votre fils, comme tout enfant, a besoin d’amour, de soutien, de compréhension, de respect et de tolérance, ce sont là ce qui l’aidera le plus à trouver son chemin.

Voir aussi la vidéo de La Casa del Hikma : L'homophobie, une haine admissible au nom des religions ?

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