Politique

Le Sénat vote l'interdiction du voile intégral

Rédigé par Leïla Belghiti | Mardi 14 Septembre 2010 à 19:37

Zappé, l'avis des musulmans de France. Votée, la loi sur l'interdiction du voile intégral. Un an aura fallu pour préparer le texte et les consciences, depuis l'idée lancée en juin 2009 par le député PCF André Gerin et fort bienvenue par le gouvernement, en baisse alors de popularité.



Après l'adoption, le 13 juillet, du projet de loi visant à interdire le port du voile intégral dans l'espace public par l'Assemblée nationale, la balle s'en fut du côté du Sénat. Il a tranché, ce mardi 14 septembre, mettant une fin magistrale aux élucubrations triomphantes du gouvernement.

Le Sénat a approuvé le texte à la quasi-unanimité des votants (246 voix pour, une contre), de nombreux parlementaires de gauche n'ayant pas souhaité prendre part au scrutin.

En préambule au débat au Sénat, la garde des Sceaux Michèle Alliot-Marie a estimé que « vivre la République à visage découvert » était « une question de dignité et d'égalité ». « Vivre ensemble suppose l'acceptation du regard de l'autre. Ce n'est pas une question de sécurité, de religion » mais « de respect de nos principes républicains », a poursuivi la ministre, en réaffirmant que « la France, terre de laïcité, assure le respect de toutes les religions ».

« L'ordre public social » invoqué au secours du gouvernement

Pour contrer les arguments du Conseil d'État et de la gauche, qui s'était abstenu de voter le projet de loi à l'Assemblée, le texte de loi s'appuie « sur un fondement constitutionnel », qui est « l'ordre public social », qui « exprime les valeurs fondamentales du pacte social au nom desquelles des mesures d'interdiction générales peuvent être prises », a appuyé la ministre.

« Le voile intégral dissout l'identité d'une personne dans celle d'une communauté, il exprime la volonté de mettre en œuvre une vision communautariste de la société », a-t-elle encore martelé.

Où sera-t-il interdit ?

Le voile intégral, ou niqab, sera interdit sur les « voies publiques », c'est-à-dire dans la rue, ainsi que dans les « lieux ouverts au public ou affecté à un service public ».

L'article 1 stipule que « nul ne peut, dans l'espace public, porter une tenue destinée à dissimuler son visage ». Exception sera faite au port du casque pour les motards ou pour la dissimulation du visage pour des « raisons de santé » ou pour des « motifs professionnels » (intervention des forces de l'ordre, travaux, etc.), des « pratiques sportives » ou lors de carnaval.

La contrevenante s'exposerait à 150 euros d'amende, auxquels pourrait s'ajouter ou se substituer un « stage de citoyenneté » (sic).

Quiconque imposerait à une femme de porter le voile intégral sera sanctionné par la lourde peine de 30 000 euros d'amende et à un an d'emprisonnement, peine doublée si la victime est mineure. Sur ce point, UMP et PS étaient d' accord.

Ces sanctions entreront en vigueur au printemps 2011, après une période de médiation. L'adoption définitive du texte de loi interdisant le port du voile intégral est une atteinte aux droits de l'homme, clament pourtant les organisations de défense des droits de l'homme.

Le Conseil français du culte musulman (CFCM), principal organe représentatif des musulmans, bien que s'opposant au port du voile intégral, s'était vivement opposé à la loi qui « risque de stigmatiser l'islam », alors que le port du voile intégral est un phénomène marginal qui ne concernerait que 2 000 femmes.