Sur le vif

Le quotidien Libération condamné pour injure publique

Rédigé par Laila Elmaaddi | Mardi 3 Avril 2007 à 18:33



Mardi, le tribunal correctionnel de Nanterre a condamné le quotidien Libération pour "injure publique" à payer des amendes et 20.000 euros de dommages et intérêts au juge Fabrice Burgaud, comparé dans un article au criminel nazi Adolf Eichmann.

Le journaliste Emmanuel Poncet a écopé d'une amende de 8.000 euros, contre 5.000 euros pour l'ex-directeur de publication Serge July.

De plus, les deux hommes devront payer solidairement 20.000 euros de dommages et intérêts au magistrat instructeur de la calamiteuse affaire d'Outreau, et prendre en charge les frais de justice (3.000 euros chacun).

Enfin, Libération devra publier dans les 15 jours un encart titré "Libération condamné pour injure publique", reprenant les termes de la condamnation en caractères d'au moins 3,5 cm de hauteur.

A l'origine de la procédure, les avocats de M. Burgaud, rejoints ensuite par le garde des Sceaux Pascal Clément, avaient attaqué cinq passages dans l'article incriminé. Libération a obtenu une relaxe partielle sur un des cinq passages litigieux.

Ne souhaitant pas commenter le jugement, la défense du quotidien n'avait pas décidé mardi si elle interjetait appel.

Dans un article paru le 17 février 2006, titré "Burgaud, un cadre obéissant", Emmanuel Poncet avait comparé le magistrat au criminel nazi, les deux hommes présentant "un profil psychologique" commun, celui du "jeune cadre obéissant", du "normopathe", ces "sujets hypernormaux, simples et sans complication".

Mardi, le tribunal, a relevé que "Adolf Eichmann a une notoriété particulière au sein des criminels nazis" comme organisateur de la déportation de millions de Juifs vers les camps de la mort. Aussi, "ce rapprochement est outrageant en ce qu'il sous-entend qu'un magistrat de l'ordre judiciaire français peut être identifié avec un des animateurs essentiels d'un système totalitaire (...) dont les caractéristiques ont consisté à s'organiser pour annihiler les droits de l'Homme", une analyse jugée "dépourvue de toute base factuelle ou historique".

"Les choix d'écriture d'Emmanuel Poncet, la façon dont il a rédigé son article", notamment via le "caractère voulu de répétition" du nom d'Eichmann cité à sept reprises, "aboutissent ainsi (...) à jeter une opprobre définitive et insusceptible de résorption sur ce magistrat", a conclu le tribunal.

Une nouvelle affaire d'injure et diffamation opposant Fabrice Burgaud à l'hebdomadaire Télérama, qui dans un article l'a notamment qualifié de "Ben Laden d'Outreau", sera jugée le 3 juillet par la 14e chambre correctionnelle de Nanterre, a-t-on appris de source judiciaire.