Le premier gouvernement de l’après Arafat est désigné. Le processus électoral suit son cours. Les présidentielles du 9 janvier ont permis à Abu Mazen de mesurer sa cote de popularité. Le 23 décembre 2004, trente-six villes de Cisjordanie avaient élu leurs conseils municipaux. Un mois plus tard, dix conseils municipaux de la bande de Gaza ont été installés (27 janvier 2005). La prochaine phase de ces élections locales est prévue pour le 28 avril. Elle sera suivie des législatives (17 juillet). Puis la dernière étape des municipales aura lieu probablement au mois de septembre. Dans cette série de scrutins pour renouveler les responsables politiques palestiniens, les élections locales sont décisives. Ce sont les seules élections auxquelles participe le Hamas.
Miser fort sur les municipales
S’il n’a pas gêné le déroulement des présidentielles du 9 janvier 2005, le Hamas n’y a pas participé. Ce boycott s’inscrit dans la logique générale du parti qui ne s’associe pas aux initiatives issues des accords d’Oslo (1993) dont l’Autorité palestinienne. Le taux de participation (71% des inscrits) est plus un trompe l’œil qu’un plébiscite de Abu Mazen. Car au sentiment de scepticisme dû aux échecs politiques successifs, s’ajoute le morcellement du territoire contrôlé par l’occupant israélien. Environ le tiers des Palestiniens ne se sont simplement pas inscrits sur les listes.
Absent de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), absent du Conseil législatif palestinien (l’Assemblée), le Hamas mise fort sur les élections locales. Sa participation au dernier scrutin dans la Bande de Gaza fut un succès. Sur les 118 élus locaux, 77 sont du Hamas. Une victoire sans surprise sur le Fatah au pouvoir.
La personnalité de l’élu est particulièrement importante dans ces élections locales. Or les membres du Hamas sont perçus par les Palestiniens comme des gens pieux, honnêtes, efficaces et proches du peuple et des ses préoccupations quotidiennes. Certes, dans la perspective des législatives, le Fatah n’a pas voulu abattre toutes ses cartes. Mais sur les dix Conseils élus, sept sont du Hamas. Et la question aujourd’hui est de savoir si le Hamas, porté par sa victoire aux locales, se décidera à jouer son rôle d’opposant au sein du Parlement palestinien. Des pourparlers seraient en cours, avec l’équipe de Abu Mazen pour ouvrir cette voie.
Le Hamas au Conseil législatif
Le Hamas a boycotté les législatives de 1996. La quasi-totalité des parlementaires palestiniens sont soit du Fatah ou des indépendants proches du Fatah. Ce qui, dans une perspective démocratique, est un signe de faiblesse propre à discréditer le pouvoir central. Le Président de l’Autorité palestinienne a donc tout intérêt à amener le principal mouvement d’opposition à participer aux débats parlementaires. Il a d’autant plus intérêt que le Hamas n’a aucune chance d’obtenir une majorité parlementaire. Mais la présence d’un nombre convenable de députés du Hamas au Parlement sera un véritable bouleversement dans la tradition politique palestinienne et une victoire certaine pour Abu Mazen.
Il demeure que, dans le mode de fonctionnement actuel des institutions palestiniennes, un député du Hamas n’aura pas la partie facile. La longue absence d’institutions centrales fortes a instauré un système de clientélisme, qualifié de corruption, que chacun dénonce mais que nul ne sait arrêter puisque tout le monde en profite. Cette situation a eu tendance à confiner les députés dans un rôle d’intermédiaires chargés de porter les doléances de leurs familles auprès des membres du gouvernement. Chose impossible à un élu du Hamas puisque le mouvement est absent du gouvernement.
Israël se méfie du retour du Hamas
Le retour du Hamas dans l’arène politique est perçu en Israël comme une menace contre sa sécurité. Car le mouvement n’a jamais accepté de discuter avec l’occupant que les armes au poing. Pour cette raison, il figure sur la liste des mouvements classés terroristes par l’Union européenne. Mais la victoire électorale du Hamas lève aussi une menace économique sur Israël. En effet, à quelques rares exceptions près, toutes les villes palestiniennes sont approvisionnées en eau et en électricité par des compagnies israéliennes. Or, sur leur site Internet, certains candidats du Hamas projettent de résilier leurs contrats pour se tourner vers des compagnies des pays arabes frontaliers.