L'avis de Saphirnews
Dès mars 2020, l’anthropologue et spécialiste des crises sanitaires, Laëtitia Atlani-Duault, propose aux principaux responsables religieux français de créer un espace de réflexion informel sur la pandémie. « L’enjeu théologique posé par les épidémies est celui des rapports entre la foi, le plan divin et la marche naturelle du monde. Comme l’écrit Paul Ricœur, face à l’infortune, "comment peut-on affirmer ensemble, sans contradiction, les trois propositions suivantes : Dieu est tout-puissant ; Dieu est absolument bon ; pourtant le mal existe ?" », explique-t-elle dans son introduction au livre Les spiritualités en temps de pandémie, justifiant ainsi la nécessité d'une « réflexion inter-cultes dédiée à la pandémie ».
Ce livre à voix multiples est l’écho des échanges nourris des participants – évêques catholiques et orthodoxes, pasteurs protestants, rabbins, personnalités musulmanes et représentants de la religion bouddhiste – auxquels se sont joints des « intellectuels ancrés dans chaque communauté, indépendamment du fait qu’ils occupent – ou non – une position dans une institution religieuse ». Résultat, on y trouve des réflexions pêle-mêle, sans forcément de liens les unes avec les autres, si ce n’est le point de départ des 14 auteurs : la pandémie, le confinement, la mort qui rode et peut en quelques jours enlever un proche pour toujours.
Chez les catholiques, Véronique Magron, une théologienne dominicaine, développe une réflexion sur le pur et l’impur, l’incertitude et la fraternité. Michel Davy de Virville, directeur honoraire du Collège des Bernardins, souligne combien la pandémie a été l’occasion de mesurer nos limites et la précarité des équilibres sociaux de notre société. L’occasion aussi de remettre en question ce qui nous est essentiel et « de réinventer notre maîtrise spirituelle, politique, sociale et économique ».
Ce livre à voix multiples est l’écho des échanges nourris des participants – évêques catholiques et orthodoxes, pasteurs protestants, rabbins, personnalités musulmanes et représentants de la religion bouddhiste – auxquels se sont joints des « intellectuels ancrés dans chaque communauté, indépendamment du fait qu’ils occupent – ou non – une position dans une institution religieuse ». Résultat, on y trouve des réflexions pêle-mêle, sans forcément de liens les unes avec les autres, si ce n’est le point de départ des 14 auteurs : la pandémie, le confinement, la mort qui rode et peut en quelques jours enlever un proche pour toujours.
Chez les catholiques, Véronique Magron, une théologienne dominicaine, développe une réflexion sur le pur et l’impur, l’incertitude et la fraternité. Michel Davy de Virville, directeur honoraire du Collège des Bernardins, souligne combien la pandémie a été l’occasion de mesurer nos limites et la précarité des équilibres sociaux de notre société. L’occasion aussi de remettre en question ce qui nous est essentiel et « de réinventer notre maîtrise spirituelle, politique, sociale et économique ».
Des rapprochements entre les cultes
Côté protestant, le pasteur François Clavairoly, président de la Fédération protestante de France, souligne que « les religions ont fait ce qu’elles avaient à faire, "relier" les êtres entre eux et "relire" les textes anciens (…) et les interpréter à jour nouveau » pour retrouver le sens du mot « fraternité ». Emmanuel Adamakis, Métropolite de France et président de l’Assemblée des évêques orthodoxes de France (AEOF), justifie la fermeture des églises pour éviter la propagation du virus et « assumer la responsabilité du bien-être d’autrui ». Car, rappelle-t-il, « protéger la santé de ceux qui nous entourent est un puissant témoignage de notre foi ».
Ce point de vue est également défendu chez les musulmans par Chems-Eddine Hafiz, qui souligne combien les associations musulmanes ont assumé leur responsabilité. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris profite de l’occasion pour ajouter une pierre à sa défense des « Français de confession musulmane, que l’on continue d’observer parfois avec méfiance, (et qui) ont apporté la démonstration qu’ils étaient totalement intégrés ».
Deux autres personnalités musulmanes ont contribué à ce livre. Mohammed Moussaoui, président de l'Union des mosquées de France (UMF), note que la pandémie a été l’occasion de faire le constat que « le principe de laïcité, érigé trop souvent en outil de "contrôle" des religions et de leur manifestation en public par l’État, s’est distingué par sa capacité à opérer des rapprochements entre les cultes et avec les pouvoirs publics ». De son côté, le médecin Sadek Beloucif, président de l’association L’islam du XXIe siècle, souligne que la crise du Covid-19 n’a pas reçu des réponses uniquement sur le plan médical et sanitaire.
« La technique n’est donc pas tout, s'exclame-t-il. Soigner tout homme, soigner tout l’homme, c’est redécouvrir le sens du soin, avec une responsabilité alliée à la solidarité et qui est une nécessité d’action. » Pour préciser un peu plus loin : « Les religions n’expliquent pas l’humain, mais font connaître la volonté divine. Ainsi, la religion peut aider l’homme à comprendre sa nature, le pourquoi de sa présence sur terre, mais la question de l’existence de la douleur et de la souffrance reste un mystère, une énigme. »
Ce point de vue est également défendu chez les musulmans par Chems-Eddine Hafiz, qui souligne combien les associations musulmanes ont assumé leur responsabilité. Le recteur de la Grande Mosquée de Paris profite de l’occasion pour ajouter une pierre à sa défense des « Français de confession musulmane, que l’on continue d’observer parfois avec méfiance, (et qui) ont apporté la démonstration qu’ils étaient totalement intégrés ».
Deux autres personnalités musulmanes ont contribué à ce livre. Mohammed Moussaoui, président de l'Union des mosquées de France (UMF), note que la pandémie a été l’occasion de faire le constat que « le principe de laïcité, érigé trop souvent en outil de "contrôle" des religions et de leur manifestation en public par l’État, s’est distingué par sa capacité à opérer des rapprochements entre les cultes et avec les pouvoirs publics ». De son côté, le médecin Sadek Beloucif, président de l’association L’islam du XXIe siècle, souligne que la crise du Covid-19 n’a pas reçu des réponses uniquement sur le plan médical et sanitaire.
« La technique n’est donc pas tout, s'exclame-t-il. Soigner tout homme, soigner tout l’homme, c’est redécouvrir le sens du soin, avec une responsabilité alliée à la solidarité et qui est une nécessité d’action. » Pour préciser un peu plus loin : « Les religions n’expliquent pas l’humain, mais font connaître la volonté divine. Ainsi, la religion peut aider l’homme à comprendre sa nature, le pourquoi de sa présence sur terre, mais la question de l’existence de la douleur et de la souffrance reste un mystère, une énigme. »
Les fragilités spirituelles de nos sociétés
Dan Arbib, enseignant de philosophie à l’Ecole normale supérieure (ENS) et spécialiste d’études juives récuse, quant à lui, l’idée que l’Homme aurait commis un péché vis-à-vis de la nature, entrainant une punition sous forme de pandémie : « La pandémie parut aux juifs un événement dénué de sens, absurde tout simplement. » Il souligne cependant que la crise sanitaire a été l’occasion pour certains de raviver la flamme de l’antisémitisme, avec des accusations scandaleuses proférées sur les réseaux sociaux : « Qui donc avait sinon voulu la pandémie, du moins orchestré la politique vaccinale, supposée lucrative pour les laboratoires ? Eux, toujours eux – c’est-à-dire nous. »
Enfin, Olivier Wang-Genh, moine zen et président de l’Union bouddhiste de France (UBF), souligne que le strict confinement du début de la pandémie n’a pas été un choc pour les bouddhistes. Ceux-ci ont l’habitude des « retraites », périodes pendant laquelle le croyant se met « en vacance de sa vie agitée pour se rendre disponible à autre chose ». Si la pandémie a réveillé « les peurs ancestrales des épidémies, les peurs liées à l’inconnu et à l’incertitude (…), c’est sans doute notre rapport à la mort qui a été le plus directement questionnée et qui a révélé les grandes fragilités spirituelles de nos sociétés ». Et de conclure : « A l’heure où les vertus de l’hygiène physique ne font plus débat, où nous commençons à comprendre que "l’hygiène émotionnelle et mentale" est tout aussi importante, nous découvrons peut-être qu’une "hygiène spirituelle" est elle aussi vitale, surtout lorsque nos conditions de vie sont confrontées aux changements et à l’interdépendance de tous les êtres en ce monde. »
L’absence d'un chapitre conclusif à ce livre original n’est pas étonnante, aucune conclusion globale n'étant possible après des réflexions qui se croisent et s’entrecroisent, sans toujours se rejoindre. Le lecteur peut picorer au gré de sa curiosité pour aller directement lire le texte d’une personnalité qu’il apprécie particulièrement. On ne saurait trop lui recommander cependant de prendre le temps de découvrir le point de vue de ceux qui lui sont étrangers. Afin de ne pas passer à côté de la possibilité d’y trouver des réponses complémentaires.
Enfin, Olivier Wang-Genh, moine zen et président de l’Union bouddhiste de France (UBF), souligne que le strict confinement du début de la pandémie n’a pas été un choc pour les bouddhistes. Ceux-ci ont l’habitude des « retraites », périodes pendant laquelle le croyant se met « en vacance de sa vie agitée pour se rendre disponible à autre chose ». Si la pandémie a réveillé « les peurs ancestrales des épidémies, les peurs liées à l’inconnu et à l’incertitude (…), c’est sans doute notre rapport à la mort qui a été le plus directement questionnée et qui a révélé les grandes fragilités spirituelles de nos sociétés ». Et de conclure : « A l’heure où les vertus de l’hygiène physique ne font plus débat, où nous commençons à comprendre que "l’hygiène émotionnelle et mentale" est tout aussi importante, nous découvrons peut-être qu’une "hygiène spirituelle" est elle aussi vitale, surtout lorsque nos conditions de vie sont confrontées aux changements et à l’interdépendance de tous les êtres en ce monde. »
L’absence d'un chapitre conclusif à ce livre original n’est pas étonnante, aucune conclusion globale n'étant possible après des réflexions qui se croisent et s’entrecroisent, sans toujours se rejoindre. Le lecteur peut picorer au gré de sa curiosité pour aller directement lire le texte d’une personnalité qu’il apprécie particulièrement. On ne saurait trop lui recommander cependant de prendre le temps de découvrir le point de vue de ceux qui lui sont étrangers. Afin de ne pas passer à côté de la possibilité d’y trouver des réponses complémentaires.
Présentation de l’éditeur
Après le silence vient aujourd’hui, pour la première fois, le temps du témoignage des différentes religions et confessions de France sur la pandémie Covid-19. Un témoignage de l’ensemble des leaders religieux français et d’intellectuels ancrés dans chaque communauté qui tous dialoguent depuis le début de la pandémie avec l’anthropologue Laëtitia Atlani-Duault.
La pandémie nous a rappelé le tragique de notre condition, exposée qu’elle est non seulement à la maladie et à la mort mais aussi à la manière dont elle se manifeste en inégalités, en solitudes indicibles ou en malchances individuelles. Cependant, ce libre collectif nous montre que les religions ou, plutôt les communautés humaines qu’elles constituent, habitées par ce tragique, sont toujours susceptibles de prendre à leur compte l’événement qui afflige et fait peur afin de réinventer les liens de fraternité.
La pandémie nous a rappelé le tragique de notre condition, exposée qu’elle est non seulement à la maladie et à la mort mais aussi à la manière dont elle se manifeste en inégalités, en solitudes indicibles ou en malchances individuelles. Cependant, ce libre collectif nous montre que les religions ou, plutôt les communautés humaines qu’elles constituent, habitées par ce tragique, sont toujours susceptibles de prendre à leur compte l’événement qui afflige et fait peur afin de réinventer les liens de fraternité.
Les spiritualités en temps de pandémie, sous la direction de Laëtitia Atlani-Duault, Albin Michel, mai 2022, 224 pages, 21, 90 €.
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