Points de vue

Marine Le Pen, la girouette patriote

Rédigé par Patrick Souillé | Jeudi 4 Mai 2017 à 10:23



Alors que le 7 mai approche à grand pas, tout est désormais bon pour racoler les électeurs indécis. Si, de son côté, Emmanuel Macron n'enthousiasme guère beaucoup de Français, la candidate de la vague Bleu Marine, en revanche, n'hésite pas se contredire pour espérer ramasser la mise dimanche soir. Et, à ce niveau, on peut dire que la « patriote » a fait fort avec son programme.

La mauvaise publicité pour De Gaulle

Après le mouvement Sens commun, issu de la manifestation anti-mariage pour tous et désormais en faveur de Marine Le Pen comme la très catholique Christine Boutin, voilà Nicolas Dupont-Aignan, du haut de ses 4,73 % du premier tour du 23 avril, qui se rallie à la candidate frontiste avec un portefeuille de Premier ministre pour « sauver la France » en guise de remerciement. Le président de Debout la France semble avoir trébuché pour un poste inespéré et sans doute quelque histoire de gros sous.

Ces choix ne m'inspirent que mépris même s'ils ne sont pas sans rappeler certains comportements qui firent la une des partis dit traditionnels. Quant à Nicolas Dupont-Aignan qui se réfère toujours au Général de Gaulle, je lui conseillerais vivement d'éviter un peu trop souvent de prononcer son nom car il est fort à douter que le chef de la France libre apprécierait une telle publicité, dans le contexte actuel, qui vise à soutenir ce qu'il a combattu de son temps.

Un programme pour attrape-gogos

Marine Le Pen et son nouveau complice Dupont-Aignan l'opportuniste ont saoulés les Français pendant des mois sur le rôle néfaste de l'euro, cette monnaie maudite selon leurs dires, à l'origine de tous nos maux, et la nécessité absolue de s'en débarrasser au plus vite. Puis, subitement, changement de programme, si je puis dire : voilà que l'euro n'est plus un obstacle majeur.

Alors que croire ? Sur quoi donc le programme économique de Marine Le Pen est-il basé ? Tout cela n'est pas très sérieux. Pour cette patriote, l'objectif est devenu clair : d'abord s'installer à l'Elysée, puis improviser en fonction des circonstances. Ce principe politique rappelle certains précédents qui ont fait les grandes heures de gloire des gogos électeurs à qui on a fait gober tellement d'âneries. Attirer les indécis en rognant sur ses promesses n'est pas très glorieux et, en cela, le Front national ne vaut guère mieux que les autres partis qui ont tellement manipulé l'opinion.

Si élue, quelle majorité pour le FN ?

Après avoir bâti tout un programme économique sur la sortie de l'euro et de l'Union européenne (mais sur laquelle elle revient doucement), la clique frontiste va devoir, si elle est élue, se constituer une majorité parlementaire. Mais avec qui ? Et croyez-vous un instant que des millions de Français vont se précipiter dans les urnes pour faire élire des centaines de députés plus ou moins liés au FN alors que ce dernier a toujours eu toutes les peines du monde à remporter ne serait-ce que quelques circonscriptions dans le passé ? Que fera alors Marine Le Pen sans majorité à l'Assemblée nationale et au Sénat pour faire appliquer son programme ?

Quant à la sortie de l'euro, une majorité de Français ne veut pas en entendre parler. Comment diriger le pays dans ces conditions si ce n'est de s'accommoder avec le pouvoir ? Et pour faire quoi ?

Je ne sais si beaucoup ont réfléchi à toutes ces remarques avant de prendre leurs décisions, mais j'inviterais celles et ceux qui sont attirés par la couleur bleue marine à y réfléchir à deux fois avant de se précipiter dans les urnes car un homme averti en vaut deux.

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Patrick Souillé, retraité, est auteur de Paroles de citoyens : et si je disais tout. Ou le regard sans complaisance d'un citoyen sur notre société (Dictus Publishing, octobre 2016).