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Médine annonce son prochain album sur SaphirNews

Entretien exclusif avec Médine de Din Récords

Rédigé par Propos recueillis par Nadia Sweeny | Mardi 19 Décembre 2006 à 11:36

Pour la sortie de son nouveau hors série « table d’écoute », et à la veille de la sortie de son nouvel album « Arabian Panthers », nous avons voulu rencontrer Médine. Accompagné de deux de ses collègues du label Din Records, Salsa et Ibrah de Bouchée Double, Médine, rappeur musulman engagé, s’explique sur quelques thèmes abordés dans ce nouveau hors série qui est dans les bacs depuis fin novembre.



SaphirNews : Salam’alaykoum Médine, pourquoi as-tu sorti un « hors série » et non un album « régulier » ?


Médine :Alaykoum salam. Travailler les albums nécessite une grande documentation car il faut les travailler en profondeur. Donc, je ne pouvais pas me permettre de sortir un album en un si court délai. Après mon album « Djihad » j’ai travaillé sur énormément de choses différentes, il fallait que je réponde à des projets extérieurs, on m’a sollicité sur des compilations, sur des featurings, etc… donc je devais répondre à tous ces gens et mettre en route la machine de l’album. Comme ça prend énormément de temps, je me suis mis en mode hors série, avec dix titres, abordant des thèmes pas trop approfondis mais raisonnables et inédits. J’ai décidé de donner ça pour faire patienter le public et pour jauger si le succès d’estime peut se transformer en succès commercial.

Pourquoi tu l’as appelé « table d’écoute » ?

Être sur table d’écoute, c’est être suivi, être constamment persécuté par les Renseignements Généraux, la DST… Et nous, la communauté musulmane, c’est ce que nous sommes en train de vivre. Nous sommes constamment montré du doigt, surveillé, pour tous les projets que nous entreprenons. Aussi sincère soient ils, ils sont sujet à une double interprétation. Car nous n’avons apparemment pas la légitimité de faire ces choses avec la sincérité humaine, tout de suite, on attribue un double sens à cette sincérité. Voila pourquoi « Table d’écoute. »

Dans l’introduction, tu fais référence au film « Double face » en disant « Castor Troyes est le vrai visage de la volaille ».

La police n’est pas notre grand ami dans les banlieues. Nous le voyons encore aujourd’hui avec l’affaire de Taoufiq à Nantes. La Police a un rapport très étroit avec les jeunes des quartiers. C’est vrai que lorsqu’on voit les syndicats de la Police aujourd’hui à la télévision, on se dit que ce sont des gens comme nous etc. et ce sont des gens bien comme nous. Malheureusement, lorsqu’on est confronté à la police sur le terrain, c’est une toute autre discussion qui va s’amorcer. La police n’est pas courtoise avec nous, elle nous parle comme à des chiens. Les policiers nous tutoient comme si on avait élevé les cochons ensemble. Donc le vrai visage de la volaille c’est celui de Castor Troyes, car dans le film, Castor Troyes est le bandit et il prend physiquement le visage du policier, alors qu’en réalité il n’avait pas besoin de le prendre. Il avait juste à dire : « je suis policier » et on l’aurait cru.



A la fin de la première chanson, tu dis qu’il ne faut faire « confiance à personne même pas à toi-même et qu’à choisir entre la Peste et le Choléra, choisis celui que tu ne connais pas. »

Je pars du principe ou les gens que tu connais, que tu fréquentes peuvent être les plus dangereux pour toi. C’est pour ça que je dis « choisis celui que tu ne connais », celui qui n’a rien à voir avec toi car, c’est lui qui va pouvoir t’aider et qui sera certainement plus bénéfique pour toi que celui que tu connais à 100%. Celui avec qui tu vie, avec qui tu progresse, peut être ton meilleur ennemi. C’est juste une supposition, mais c’est pour dire que les gens de notre propre communauté sont parfois ceux qui nous font le plus de mal. Il y a des désaxés dans le monde, ils peuvent être chrétiens, bouddhistes, musulmans, etc… Mais si je me place en tant que musulman, les désaxés qui sont musulmans me font du mal à moi alors qu’ils devraient être les gens les plus proches de moi… c’est ce paradoxe que je met en évidence en disant « à choisir entre la Peste et le Choléra, choisis celui que tu ne connais pas. »

A un moment tu dis aussi, « C’est la rencontre de Yusuf et de Cat Stevens, réconcilier le peuple noir avec les « Minute mens »

Les Minute Mens sont l’équivalent du Ku Klux Klan dans les années 80 aux Etats-Unis. Soul Rebel, c’est une chanson qui porte un message de réconciliation entre les gens. Cat Stevens s’est réconcilié avec lui-même en adoptant le nom de Yusuf Islam et moi je souhaiterai réconcilier les noirs et les Minuts Mens, ou les noirs avec le Ku Klux Klan. C’est un message pour dire qu’il faut qu’on arrive à s’entendre.

Quand tu cites les différentes références du rap français qui t’ont marquées, tu dis à propos de Kery James, qu’une légende s’est éteinte… Tu penses quoi du rap français d’aujourd’hui ?

Kery james à l’époque de Ideal J, c’était vraiment le « prophète » du rap. Normalement je ne devrais pas dire ça, mais à cette époque là, du moins au Havre, là d’où je viens, on aurait pu faire n’importe quoi pour lui. Par la suite il a fait un certain nombre de choix artistiques et musicaux qui m’ont déçu personnellement. Je ne me reconnaissais plus dans Kery James. Il y avait des variations de voix qui ne me parlaient plus, des thèmes non plus donc j’ai été déçu. A partir de là, j’ai vue le « prophète » du rap, que j’avais mis en haut, s’étouffer. Mais aujourd’hui, et c’est la suite de la phrase que tu cites : « Une légende s’est éteinte, mais son retour on ne peut qu’espérer. » J’espère, à l’heure actuelle, que Kery James redevienne le Kery de Ideal J et de « si c’était à refaire.»

Concernant le rap français, personnellement, je me suis arrêté en 1998. Je ne peux pas me faire une opinion sur le rap français d’aujourd’hui, alors que je suis encore en 1998. Par contre, il y a des gens comme Keny Arkana, Cfew et Lino que je kif toujours. Ça me parle, je me reconnais dans ce qu’ils font et même Kery James : Thug Life, le dernier de Mafia Cainfri… Les sons que je peux écouter aujourd’hui sont les atmosphères de 98, donc au finale, je me raccroche toujours à cette période.


Tu dis que tu veux faire de la musique un communautarisme.

Oui. Le communautarisme c’est se regrouper parmi les gens qui te sont semblable pour des raisons diverses. C’est donc le fait de se rassembler. Ce que je veux faire, c’est faire revivre une communauté de rappeurs conscients, véhiculer tout ce qui s’est passé en 1998 et le reformuler aujourd’hui en 2007.

Dans « 17 octobre », chanson dans laquelle tu évoques la guerre d’Algérie et le soulèvement des algériens en France, tu prends l’identité d’un homme nommé Ahmed fil de Mohammed. Qui est-ce ?

Ce n’est pas un vrai personnage. C’est simplement une histoire inspirée de faits réels. J’ai pris plein de témoignages sur un site Internet qui s’appel « 17 octobre, contre l’oubli ». Il y a énormément de témoignages de gens qui ont vécus cette histoire, de leurs familles. J’ai fait un milk-shake de tout ça et j’en ai sortir l’histoire de Ahmed, fils de Mohammed. Ça peut être tout le monde et ça peut arriver à n’importe qui.


Dans un autre morceaux, tu récupères plusieurs extraits de deux autres de tes albums « 11 septembre » et « Djihad » et tu en fait un remix avec des extraits etc. Pourquoi ?

C’est pour faire découvrir ce que j’ai fait par le passé. Je sais qu’énormément de personnes vont me connaître par le biais de ce hors série, « table d’écoute », et je ne veux pas qu’on fasse abstraction de ce que j’ai fait par le passé. Pour comprendre « table d’écoute », il faut retourner réviser les albums « 11 septembre » et « Djihad ».

Ton prochain album s’appel Arabians Panthers, comme l’avant dernier titre de ce hors série. La référence aux Black Panthers est évidente, pourquoi te sens tu proche de ce mouvement ?

Médine : Parce que se sont, tout simplement, des hommes qui se sont battus pour améliorer leurs conditions de vie dans un contexte bien particulier. C’est cet esprit la que je veux véhiculer dans le troisième album. Nous sommes des gens, musulmans ou d’autres religions, qui vivons dans un quartier et nous voulons améliorer nos conditions de vie, par le biais du rap, du sport, de l’école de tout un tas de créneaux. C’est ce message la que je veux véhiculer.

Salsa : De plus, les Blacks Panthers représentent le savoir. A l’époque, les Blacks Panthers aux Etats Unis, maîtrisaient les lois de leur pays autant que le Gouvernement et ça c’est important. Ils connaissaient parfaitement la loi et c’est pour ça qu’ils ont été très dangereux pendant un moment, car ils retournaient la loi contre l’Etat. Ils se battent avec les mêmes armes que leurs ennemis.

Ibrah, de Bouchée Double :
D’autre part, les panthères n’attaquent jamais pour rien. Elles ne font que se défendre, c’est un animal qui n’est pas agressif de nature mais qui sait se défendre.