Points de vue

Omero Marongiu-Perria : L’unité dans la diversité, le parti-pris de l’optimisme

#1AnAprès

Rédigé par Omero Marongiu-Perria | Mercredi 13 Janvier 2016 à 08:00

Un an après les premiers attentats qui ont bouleversé la société française, que faut-il retenir de ces funestes événements et de leurs conséquences ? Quels messages promouvoir et que préconiser pour construire une société meilleure ? Le point sur Saphirnews avec Omero Marongiu-Perria, sociologue et spécialiste de l'islam français.



Omero Marongiu-Perria est sociologue et spécialiste de l'islam français.
Nous vivons dans une société globalement fragilisée. Les sociologues ont employé le terme de « postmodernité », puis d’« ultramodernité » pour transcrire, quelque part, cet état de fragilité qui fait suite à l’utopie des lendemains meilleurs que la modernité avait apporté.

Nous devons également gérer les conséquences de politiques étrangères qui ont semé un chaos total au Proche-Orient et dans une bonne partie de l’Afrique ; de larges corridors sans États voient des armes circuler et Daesh est en grande partie une conséquence de cet état chaotique. C’est dans cet arrière-fond qu’il faut aborder les attentats qui ont secoué la France en 2015.

Malgré l’horreur de tous ces morts, il faut demeurer optimiste : en tout cas, c’est mon parti-pris. De ce point de vue, on peut noter une différence de posture chez de nombreux acteurs associatifs musulmans entre le début et la fin de l’année.

En effet, autant il a été difficile pour une partie d’entre eux de se revendiquer « Charlie », autant l’horreur du 13 novembre 2015 a suscité une vague de solidarité et de mobilisation peut-être jamais vue en France. À ce jour, ce sont des milliers d’initiatives en tout genre qui ont été initiées par des musulmans, loin des caméras. On compte bien entendu les actions de recueillement et le dialogue interreligieux, mais, au-delà, c’est la volonté de répondre aux angoisses des gens qui poussent les musulmans à aller de l’avant, pour dépassionner le regard sur leur religion.

De ce que j’observe, l’écho semble être assez positif du côté de la société, même si la stratégie du gouvernement doit être suivie et fortement critiquée, autant sur l’état d’urgence que sur la déchéance de nationalité.

Analyser nos peurs, changer de regard

Je pratique le dialogue interreligieux depuis 1997, et depuis une dizaine d’années j’inclus l’interreligieux dans le dialogue tout court ! Par mon activité professionnelle de formateur et d’expert, entre autres, dans le domaine de l’interculturalité et des questions liées à l’islam, j’insiste beaucoup sur le changement de regard et sur l’analyse de nos peurs. Qu’est-ce qui nous dérange finalement chez l’autre, quel qu’il soit ?

Mon message s’adresse, tout simplement, à tout un chacun, afin que nous fassions tous l’effort de dépasser nos préjugés. L’islam n’est pas une religion intrinsèquement violente, seuls des ignorants peuvent tenir ce discours. Cependant, certains musulmans conservent aussi dans leur tête beaucoup d’images péjoratives sur la société et sur le « Français » : à chacun de faire un travail sur lui.

Arrêtons de marcher sur la tête

Il faut écouter, écouter, écouter les autres, prendre le temps de les comprendre et dialoguer dans la sérénité, même si nous n’avons pas les mêmes points de vue.

Plus en amont, il est urgent de « penser l’unité dans la diversité », j’entends par là penser l’unité du genre humain dans la diversité des sociétés humaines. Nous assistons aux replis identitaires croissants sur fond de débats idéologiques où, en France, on marche sur la tête !

Les membres des confessions religieuses et, au-delà, tous les citoyens, peuvent apporter leur contribution à penser l’articulation entre unité et diversité, cela commence par l’échelle locale, et je suis même persuadé que tout changera par les transformations à l’échelle locale.