Sur le vif

Pakistan : accusé de blasphème après des rumeurs, un homme meurt lynché et immolé

Rédigé par Benjamin Andria | Lundi 6 Décembre 2021 à 15:05



Une accusation de blasphème a mené à la mort le responsable sri-lankais d’une fabrique d'équipements sportifs à Sialkot, dans la province du Pendjab, dans l’est du Pakistan. Après la diffusion de rumeurs selon lesquelles Priyantha Kumara aurait déchiré une affiche religieuse avec des versets coraniques et l'avait jetée dans une poubelle, ce dernier a été traîné dans la rue, lynché puis immolé par le feu vendredi 3 décembre par une foule en furie.

Jusqu’à 900 personnes auraient participé ou assisté passivement à l’attaque. Des vidéos diffusées sur les réseaux sociaux montrent la violence du crime commis par des dizaines d’hommes. Comble de l'horreur, certains sont allés jusqu’à prendre des selfies du corps en feu.

Le Premier ministre pakistanais, Imran Khan, a dénoncé sur les réseaux sociaux « un jour de honte pour le Pakistan » après cette « horrible » attaque. « Que les choses soient claires : tous les coupables seront punis avec la plus grande sévérité prévue par la loi », a-t-il déclaré.

Une enquête a été lancée pour identifier les auteurs de l’attaque. Quelque 130 personnes ont été arrêtées, ont indiqué les autorités locales lundi 6 décembre. Selon Tahir Ashrafi, représentant spécial du Premier ministre pour l'Harmonie entre les religions, les ouvriers de l'usine s'étaient plaint avant le meurtre de la trop grande sévérité du responsable.

« Les experts de la police enquêtent sur l'affaire, explorant plusieurs pistes, dont la possibilité que des employés de l'usine aient utilisé l'excuse de la religion pour se venger contre le responsable », a-t-il fait savoir, déclarant au passage que ce lynchage est « contraire aux enseignements de l’islam ». L’affaire est emblématique des terribles dérives autour de l’accusation de blasphème, à l’origine de nombreuses injustices.

Le corps du défunt a été rapatrié au Sri Lanka lundi 6 décembre. Agé de 49 ans, Priyantha Kumara était arrivé au Pakistan en 2011 pour y travailler. Il laisse derrière lui une femme, deux enfants et une famille en deuil.

Voir aussi la vidéo de La Casa del Hikma : Le blasphème, un pousse-au-crime légitimé par l’islam ?

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