Pascal Boniface, directeur de l'IRIS et auteur de l'ouvrage « Les intellectuels intègres ».
L’intégrité, une denrée rare dans le débat intellectuel en France ? Deux ans après son excellent ouvrage coup de poing sur les « intellectuels faussaires » qui suroccupent l’espace médiatique, Pascal Boniface revient en librairie braquer les projecteurs sur quinze personnalités, intègres cette fois, sous la forme d’entretiens savamment menés par le directeur de l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS) himself.
Stéphane Hessel, Jean Baubérot, Esther Benbassa, Rony Brauman, Régis Debray, Alfred Grosser, Olivier Mongin, Edgar Morin, Emmanuel Todd, Tzvetan Todorov, Jean-Christophe Victor, Michel Wieviorka, Catherine Wihtol de Wenden, Dominique Wolton et Jean Ziegler ont été choisis par Pascal Boniface pour figurer dans Les Intellectuels intègres.
La liste aurait pu être bien longue mais il a bien fallu faire un choix. « Je n’ai pas pris de collègues spécialistes des questions géopolitiques » mais « des gens qui, s’en s’être spécialisés sur les questions internationales, les ont quand même abordées à partir de leurs domaines de savoir », nous explique-t-il.
Stéphane Hessel, Jean Baubérot, Esther Benbassa, Rony Brauman, Régis Debray, Alfred Grosser, Olivier Mongin, Edgar Morin, Emmanuel Todd, Tzvetan Todorov, Jean-Christophe Victor, Michel Wieviorka, Catherine Wihtol de Wenden, Dominique Wolton et Jean Ziegler ont été choisis par Pascal Boniface pour figurer dans Les Intellectuels intègres.
La liste aurait pu être bien longue mais il a bien fallu faire un choix. « Je n’ai pas pris de collègues spécialistes des questions géopolitiques » mais « des gens qui, s’en s’être spécialisés sur les questions internationales, les ont quand même abordées à partir de leurs domaines de savoir », nous explique-t-il.
La fin ne justifie pas les moyens
A ses détracteurs, Pascal Boniface répond que son choix n’a rien de partisan : il n’est pas d’accord avec tous les penseurs – ce qui n’ajoute que plus de crédibilité à sa démarche – mais leur honnêteté intellectuelle est telle que leur présence dans le livre n’a fait aucun doute pour l’auteur. D’autant que ces « références incontestables dans leurs disciplines scientifiques » ne bénéficient pas d’une lumière médiatique à la hauteur de leurs savoirs. Tous se sont « prêtés de bonne grâce à l’exercice », fait-il savoir.
« Pour eux, la fin ne justifie pas les moyens, la cause qu'ils défendent est plus importante que leur personne. Ils sont prêts à prendre des risques pour ce qu'ils pensent être juste et refusent de suivre les modes », lit-on. L’exemple est flagrant avec le conflit israélo-palestinien : plusieurs des personnalités choisies ont été sujettes à de virulentes critiques pour leurs positions favorables aux Palestiniens. Edgar Morin avait été violemment attaqué pour avoir signé, en 2002, la tribune « Israël-Palestine : le cancer », dans laquelle il décrit Israël, « nation de fugitifs issus du peuple le plus longtemps persécuté dans l’Histoire de l’humanité », comme l'oppresseur des Palestiniens.
« S’exprimer sur ce conflit est un peu particulier parce qu’on sait que si on dévie de la doxa pro-israélienne, on est très rapidement taxé d’antisémitisme. On subit des conséquences personnelles et professionnelles très lourdes et négatives et c’est une forme d’intégrité que de s’exprimer malgré tout sur ce conflit en connaissance des risques encourus », nous déclare l’auteur, aussi victime de critiques à ce sujet. « Je n’ai pas choisi ce métier pour me taire, je continue en connaissance de cause en ayant l’estime de moi-même et d’autres gens par respect de ma sincérité », lance-t-il.
De tous les entretiens exclusifs, c’est celui de Stéphane Hessel qui retient l’attention. De cet homme, un « modèle d’intégrité » à qui le livre est dédié à titre posthume, Pascal Boniface en retient « une immense malice » et « un immense courage ». Réalisé en novembre 2012, l’entretien est un des derniers que le résistant a accordé avant sa mort en avril dernier.
« Pour eux, la fin ne justifie pas les moyens, la cause qu'ils défendent est plus importante que leur personne. Ils sont prêts à prendre des risques pour ce qu'ils pensent être juste et refusent de suivre les modes », lit-on. L’exemple est flagrant avec le conflit israélo-palestinien : plusieurs des personnalités choisies ont été sujettes à de virulentes critiques pour leurs positions favorables aux Palestiniens. Edgar Morin avait été violemment attaqué pour avoir signé, en 2002, la tribune « Israël-Palestine : le cancer », dans laquelle il décrit Israël, « nation de fugitifs issus du peuple le plus longtemps persécuté dans l’Histoire de l’humanité », comme l'oppresseur des Palestiniens.
« S’exprimer sur ce conflit est un peu particulier parce qu’on sait que si on dévie de la doxa pro-israélienne, on est très rapidement taxé d’antisémitisme. On subit des conséquences personnelles et professionnelles très lourdes et négatives et c’est une forme d’intégrité que de s’exprimer malgré tout sur ce conflit en connaissance des risques encourus », nous déclare l’auteur, aussi victime de critiques à ce sujet. « Je n’ai pas choisi ce métier pour me taire, je continue en connaissance de cause en ayant l’estime de moi-même et d’autres gens par respect de ma sincérité », lance-t-il.
De tous les entretiens exclusifs, c’est celui de Stéphane Hessel qui retient l’attention. De cet homme, un « modèle d’intégrité » à qui le livre est dédié à titre posthume, Pascal Boniface en retient « une immense malice » et « un immense courage ». Réalisé en novembre 2012, l’entretien est un des derniers que le résistant a accordé avant sa mort en avril dernier.
Une critique du fonctionnement médiatique
Si le public a été réceptif à la parution des Intellectuels intègres, celui-ci a été accueilli dans un « relative silence médiatique ». Pour Pascal Boniface, son précédent ouvrage y a bien contribué. « Leurs amis les faussaires ont été mis en cause et qu’il y a un réflexe de connivence, de solidarité », juge-t-il.
« Ce n’est pas parce que je publie un livre que tous les journaux doivent en rendre compte », mais « c’est bien parce que des faussaires mettaient en cause des personnages proches du pouvoir médiatique que celui-ci (le livre, ndlr) ne bénéficie pas d’un accueil qui aurait dû être normal », indique le directeur de l’IRIS. Il déclare être interdit d’antenne sur France Culture et France Inter sur décision de ses dirigeants Olivier Poivre d’Arvor et Philippe Val – qui avait été désigné comme un « faussaire » – « suivis assez docilement par l’ensemble des animateurs » à son regret.
A travers le livre, Pascal Boniface construit une critique du fonctionnement médiatique, les médias devant jouer un rôle essentiel dans la qualité du débat intellectuel dans une société. « Il faut éviter le piège du "tous pourris" mais, au-delà de ce piège que je récuse, il y a beaucoup de connivence, de renvois d’ascenseur et de complicité, dont Bernard-Henri Lévy est l’exemple symbolique fort puisqu’une personne bien informée ne peut pas ne pas savoir qu’il a beaucoup menti. Néanmoins, et alors qu’il est de plus en plus rejeté par le public », chacune de ses actions est célébrée « comme un fait majeur du siècle ».
« Ce n’est pas parce que je publie un livre que tous les journaux doivent en rendre compte », mais « c’est bien parce que des faussaires mettaient en cause des personnages proches du pouvoir médiatique que celui-ci (le livre, ndlr) ne bénéficie pas d’un accueil qui aurait dû être normal », indique le directeur de l’IRIS. Il déclare être interdit d’antenne sur France Culture et France Inter sur décision de ses dirigeants Olivier Poivre d’Arvor et Philippe Val – qui avait été désigné comme un « faussaire » – « suivis assez docilement par l’ensemble des animateurs » à son regret.
A travers le livre, Pascal Boniface construit une critique du fonctionnement médiatique, les médias devant jouer un rôle essentiel dans la qualité du débat intellectuel dans une société. « Il faut éviter le piège du "tous pourris" mais, au-delà de ce piège que je récuse, il y a beaucoup de connivence, de renvois d’ascenseur et de complicité, dont Bernard-Henri Lévy est l’exemple symbolique fort puisqu’une personne bien informée ne peut pas ne pas savoir qu’il a beaucoup menti. Néanmoins, et alors qu’il est de plus en plus rejeté par le public », chacune de ses actions est célébrée « comme un fait majeur du siècle ».
Donner l’exemple aux jeunes
« Les intellectuels intègres »
Au-delà de l’hommage rendu aux penseurs honnêtes, le livre est « une façon de montrer aux jeunes, qui sont très critiques par rapport à ceux qui pèsent sur les décisions, qu’il existe des gens qui ont un parcours long, intense et intègre et que les élites ne sont pas corrompues moralement ». A cet effet, une courte biographie précède les entretiens, où chacun est invité à donner son opinion sur la définition et le rôle de l’intellectuel.
« Eclairer le public, faire avancer le débat, préserver des marges de liberté pour le débat, mettre son savoir au service du plus grand nombre », tel est le rôle que confère l’auteur aux intellectuels, dont il se garde de se désigner comme tel : « Je suis un expert qui réfléchit, qui essaye de participer aux débats de la société mais je ne me comparerais pas aux grandes figures intellectuelles. Je ne pense pas avoir une œuvre suffisante pour revendiquer ce statut. »
Pour promouvoir l’intégrité, il faut « continuer à résister, en comptant sur l’intelligence du public qui est moins idiot que ne le soupçonnent certains », lance Pascal Boniface. Dans cette optique, son travail s'avère bien utile et nécessaire pour l'opinion publique.
* Pascal Boniface, Les Intellectuels intègres, Éditions Jean-Claude Gawsewitch, mai 2013, 306 pages, 21,90 €.
« Eclairer le public, faire avancer le débat, préserver des marges de liberté pour le débat, mettre son savoir au service du plus grand nombre », tel est le rôle que confère l’auteur aux intellectuels, dont il se garde de se désigner comme tel : « Je suis un expert qui réfléchit, qui essaye de participer aux débats de la société mais je ne me comparerais pas aux grandes figures intellectuelles. Je ne pense pas avoir une œuvre suffisante pour revendiquer ce statut. »
Pour promouvoir l’intégrité, il faut « continuer à résister, en comptant sur l’intelligence du public qui est moins idiot que ne le soupçonnent certains », lance Pascal Boniface. Dans cette optique, son travail s'avère bien utile et nécessaire pour l'opinion publique.
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