Points de vue

Qui ne dit mot consent : l’ingérence du Conseil de l’Europe

Rédigé par Fatima Adamou | Lundi 29 Novembre 2021 à 11:00



Éviter à tout prix de « faire le jeu » de l’extrême droite. C’est sans doute le mot d’ordre tacite de la plupart des musulmans aujourd’hui. Malheureusement, même sans commentaires de notre part et même avec le déclin médiatique de l’agitateur du moment, l’islam et les musulmans alimentent toujours les discussions parmi les anti-musulmans.

Par conséquent, le seul son de cloche audible sur des sujets concernant directement les communautés musulmanes provient des personnes opposées aux musulmans. C’est pourquoi continuer de débattre de tous les sujets reste une nécessité absolue.

Alors, parlons de la dernière campagne contre les discriminations pour appartenance religieuse conduites par le Conseil de l’Europe.

Les raisons derrière le port d’un vêtement ne devraient en aucun cas motiver le respect d’autrui

La campagne endossée par le département de lutte contre les discriminations du Conseil de l’Europe signe un message renforçant les discours haineux contre les communautés musulmanes. Un comble ! Puisque ce Conseil explique vouloir lutter contre ces discours. Le contexte actuel en France est des plus tendus. Des campagnes, comprises comme l’apologie du voile, alimentent les fantasmes d’une frange de la population. Des fantasmes d’imposition du voile à toutes les femmes européennes. Ces campagnes nuisent gravement aux musulmans et particulièrement aux femmes musulmanes vêtues d’un voile.

Les raisons derrière le port d’un vêtement ne devraient en aucun cas motiver le respect d’autrui. Le respect de chacun est acquis à tous, c’est bien cela que le Conseil de l’Europe dit viser avec la défense des droits de l’Homme.

Pourtant, la campagne met l’accent sur le choix de revêtir le foulard, la diversité et le respect. L’on s’attendrait donc à voir une campagne parallèle pour le respect des femmes musulmanes européennes contraintes de porter le voile et désireuses de l’enlever. Or ce n’est pas le cas.

Ce Conseil de l’Europe, financé par des États membres de l’Union européenne, outrepasse donc ses fonctions en arbitrant des débats théologiques.

De la nécessité de se rapprocher de toutes les organisations et courants musulmans

Ce Conseil promeut certaines interprétations du Coran sur le port du voile en prêtant une plateforme de choix à quelques associations. C’est déloyal pour les autres musulmans prônant d’autres idées sur la question.

On peut qualifier de peu conventionnelle l’invitation de quelques associations ou organisations présentées comme ambassadrices ou défenderesses des droits des musulmans pour travailler sur les discriminations les ciblant. Pourquoi ? Parce qu’elles ne sont pas connues de toutes les communautés musulmanes à l’échelle européenne.

Étant donné la grande diversité de pratiques et de croyances parmi les musulmans, cette tâche ne peut être remplie qu’en étroite collaboration avec des représentants officiels. Des représentants connus et reconnus par les musulmans capables de tenir compte du contexte, de l’histoire, du vécu de leurs pays respectifs.

Les musulmans et leurs porte-paroles doivent travailler en partenariat avec des instances européennes.

Si le Conseil de l’Europe souhaite poursuivre sa lutte contre toutes formes de discriminations pour appartenance religieuse (en particulier à l’islam), il aurait tôt fait d’apprendre sur les différentes composantes musulmanes existantes dans chaque pays européen. Il devrait également se rapprocher de toutes les organisations et de tous les courants musulmans. L’égalité qu’elle prône réside aussi dans cela.

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Fatima Adamou, auteure de « Noire et musulmane. Grandir dans la minorité », a été chercheuse bénévole à l’association Christian Muslim Forum.

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