Une réunion de concertation le 9 juin avec l'UOIF dans la mosquée Adda'wa (Paris) concernant la détermination des dates du Ramadan 2014.
PE-DA-GO-GIE. Tout un art que l’UOIF tente de mettre en œuvre à l’aube du mois du Ramadan, prévu le 28 juin selon les partisans de la méthode astronomique. La fédération, cherchant à mieux convaincre du bien-fondé de l’avis qui avait été adopté à l’unanimité en mai 2013 par le CFCM mais abandonné par la Grande Mosquée de Paris, s’est attelée ces dernières semaines à organiser des rencontres avec des responsables religieux et des cadres associatifs musulmans.
Dernière réunion en date, celle du lundi 9 juin à la mosquée Adda’wa. C’est dans ce lieu de culte en travaux situé Porte de la Villette, dans le 19e arrondissement de Paris, qu’une soixantaine de représentants de mosquées d’Ile-de-France ont fait le déplacement.
Interminable fut la réunion de concertation. Partie pour ne durer que quatre heures, elle s’est achevée au bout de sept heures. Un temps qui fut cependant nécessaire d’accorder auprès des quelque 120 personnes présents afin de créer du lien et d’échanger sur l’approche religieuse et scientifique de l’avis défendu par l’UOIF et les fédérations turques (CCMTF et Mili Gorüs), représentées ce jour par Ahmed Jaballah et Fatih Sarikir. « Il apparait que le seul moyen d’unifier les musulmans autour de cette question, d’éviter toute incertitude et divergence et de permettre à l’ensemble des musulmans d’avoir un calendrier clair, est de se baser sur ce moyen légal et efficace qu’est le calcul scientifique. Et ceci à l’instar de la détermination des horaires de prières quotidiennes qui sont déterminées par le calcul scientifique sur la base des conditions juridiques définies par les textes », ont-ils fait savoir en amont pour appeler à la réunion.
Dernière réunion en date, celle du lundi 9 juin à la mosquée Adda’wa. C’est dans ce lieu de culte en travaux situé Porte de la Villette, dans le 19e arrondissement de Paris, qu’une soixantaine de représentants de mosquées d’Ile-de-France ont fait le déplacement.
Interminable fut la réunion de concertation. Partie pour ne durer que quatre heures, elle s’est achevée au bout de sept heures. Un temps qui fut cependant nécessaire d’accorder auprès des quelque 120 personnes présents afin de créer du lien et d’échanger sur l’approche religieuse et scientifique de l’avis défendu par l’UOIF et les fédérations turques (CCMTF et Mili Gorüs), représentées ce jour par Ahmed Jaballah et Fatih Sarikir. « Il apparait que le seul moyen d’unifier les musulmans autour de cette question, d’éviter toute incertitude et divergence et de permettre à l’ensemble des musulmans d’avoir un calendrier clair, est de se baser sur ce moyen légal et efficace qu’est le calcul scientifique. Et ceci à l’instar de la détermination des horaires de prières quotidiennes qui sont déterminées par le calcul scientifique sur la base des conditions juridiques définies par les textes », ont-ils fait savoir en amont pour appeler à la réunion.
Mieux convenir à la réalité sociale française
Les intervenants à la réunion, autour du recteur de la mosquée Adda'wa, Larbi Kechat, entouré d'Ahmed Jaballah (UOIF) et Fatih Serikir (Mili Görus).
« Ce qui est demandé aujourd’hui de chacun de nous, c'est d'améliorer sa façon de recevoir le message coranique et elle nécessite d'améliorer sa compréhension du message », lance en ouverture Larbi Kechat, recteur de la mosquée Adda'wa.
« Celui qui est dans la divergence, qu'il suive l'avis qu'il estime juste », lance Mohamed Bajrafil, officiant à la mosquée d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Mais « le Coran est celui qui a posé les fondements de la facilité » et « ce que nous vivons en tant que minorité en France exige de la part de nos savants, de nos imams une prise en compte des intérêts » de la communauté. Il cite les fêtes de l’Aïd qui n’ont pas à être invisibilisées et qui ne peuvent, contrairement aux pays musulmans, être décrétés non travaillés auprès des employeurs en France du jour au lendemain.
Deux avis s’affrontent mais il est nécessaire de ne pas oublier que « notre fraternité doit être placée au dessus de nos divergences », rappelle Mohamed Najah, imam à la mosquée de Vigneux-sur-Seine (Essonne). Il n’en défend pas moins, à l’instar de ses compagnons de table, la détermination du mois du Ramadan en avance par le calcul astronomique, « une science noble dont nous devons apprendre » et qui s’est largement distinguée de l’astrologie, un art divinatoire interdit en islam car considérée comme un acte d’association (shirk) à Dieu. Il en est tout autre chose pour l’astronomie dont les intervenants louent sa précision et sa fiabilité.
« Celui qui est dans la divergence, qu'il suive l'avis qu'il estime juste », lance Mohamed Bajrafil, officiant à la mosquée d’Ivry-sur-Seine (Val-de-Marne). Mais « le Coran est celui qui a posé les fondements de la facilité » et « ce que nous vivons en tant que minorité en France exige de la part de nos savants, de nos imams une prise en compte des intérêts » de la communauté. Il cite les fêtes de l’Aïd qui n’ont pas à être invisibilisées et qui ne peuvent, contrairement aux pays musulmans, être décrétés non travaillés auprès des employeurs en France du jour au lendemain.
Deux avis s’affrontent mais il est nécessaire de ne pas oublier que « notre fraternité doit être placée au dessus de nos divergences », rappelle Mohamed Najah, imam à la mosquée de Vigneux-sur-Seine (Essonne). Il n’en défend pas moins, à l’instar de ses compagnons de table, la détermination du mois du Ramadan en avance par le calcul astronomique, « une science noble dont nous devons apprendre » et qui s’est largement distinguée de l’astrologie, un art divinatoire interdit en islam car considérée comme un acte d’association (shirk) à Dieu. Il en est tout autre chose pour l’astronomie dont les intervenants louent sa précision et sa fiabilité.
« Le monde est devenu un village »
Pourquoi avons-nous agrée le calcul scientifique pour la prière alors qu’elle est un pilier essentiel de l’islam et le refuser pour le jeûne ?, insiste-t-il aussi, pointant au passage l’existence de calendriers d’horaires divergents basés sur le 12° et le 18°, sans qu'ils ne provoquent de débat ouvert à ce jour.
Par le passé, les musulmans observe la nouvelle lune localement, « sans coordination entre les pays ou les villes d'un même pays ». « Aujourd’hui, cette méthode n'est plus adaptée, le monde est devenu un village », déclare à son tour le planétologue Smaïl Mostefaoui, présent pour assurer une présentation des données scientifiques relatives au mois de Ramadan 1435-2014 auprès d’un public encore partagé. Non tant sur le principe du calcul constate-t-on, mais sur la date : tous ne sont en effet pas convaincus par la nécessité d'annoncer le 28 juin comme premier jour du Ramadan.
Par le passé, les musulmans observe la nouvelle lune localement, « sans coordination entre les pays ou les villes d'un même pays ». « Aujourd’hui, cette méthode n'est plus adaptée, le monde est devenu un village », déclare à son tour le planétologue Smaïl Mostefaoui, présent pour assurer une présentation des données scientifiques relatives au mois de Ramadan 1435-2014 auprès d’un public encore partagé. Non tant sur le principe du calcul constate-t-on, mais sur la date : tous ne sont en effet pas convaincus par la nécessité d'annoncer le 28 juin comme premier jour du Ramadan.
Les musulmans pas prêts ?
« D'après les calculs », la Lune sera visible pour une partie du monde arabe le 28 juin, alors « pourquoi ne pas dire que le Ramadan commence le 29 juin » sachant que la possibilité d'observation le 27 ne devrait se faire que dans l'île de Pâques, « un îlot perdu dans l'océan » Pacifique, s'interroge Mohamed Yassine, imam à la mosquée d’Aubervilliers. Un autre cadre défendra l'idée du calendrier bi-zonal, préconisé par l'astrophysicien Nidhal Guessoum et qui consiste à diviser le monde en deux parties (est/ouest).
Ce à quoi il se verra répondre qu'une telle approche est défendable mais que le calendrier adopté par le CFCM, en la présence même de M. Guessoum, se veut « universel ». D'autre part, il est essentiel de ne pas réduire le monde musulman aux seuls pays arabes. « Nous faisons croire que l'islam est une religion d'Arabes et on en oublie que les musulmans sont partout. (...) On oublie nos frères turcs ou d'Europe de l'Est » qui ont, quant à eux, choisi le calcul pour fixer le calendrier musulmans, entend-t-on aussi.
Il ne suffit pas de dire que « les musulmans ne sont pas prêts » pour évacuer un débat aussi important que la détermination des mois lunaires par le calcul, pour Ahmed Jaballah, reconnaissant sans mal les torts des fédérations de ne pas avoir ouvert des espaces de dialogue intracommunautaire qui ont tant fait défaut en 2013. L’UOIF entend désormais se rattraper, à l'heure où la démarche de l'Observatoire lunaire des musulmans de France (OLMF) séduit aussi des responsables de mosquées.
Ce à quoi il se verra répondre qu'une telle approche est défendable mais que le calendrier adopté par le CFCM, en la présence même de M. Guessoum, se veut « universel ». D'autre part, il est essentiel de ne pas réduire le monde musulman aux seuls pays arabes. « Nous faisons croire que l'islam est une religion d'Arabes et on en oublie que les musulmans sont partout. (...) On oublie nos frères turcs ou d'Europe de l'Est » qui ont, quant à eux, choisi le calcul pour fixer le calendrier musulmans, entend-t-on aussi.
Il ne suffit pas de dire que « les musulmans ne sont pas prêts » pour évacuer un débat aussi important que la détermination des mois lunaires par le calcul, pour Ahmed Jaballah, reconnaissant sans mal les torts des fédérations de ne pas avoir ouvert des espaces de dialogue intracommunautaire qui ont tant fait défaut en 2013. L’UOIF entend désormais se rattraper, à l'heure où la démarche de l'Observatoire lunaire des musulmans de France (OLMF) séduit aussi des responsables de mosquées.
Consacrer les sermons du vendredi au débat
Avec M. Jaballah, Ounis Guergah, directeur scientifique de l’Institut européen des sciences humaines (IESH) de Paris et membre du Conseil européen de la fatwa et de la recherche (CEFR), appelle les imams à consacrer les derniers sermons du vendredi qui précèdent le Ramadan au débat pour minimiser les divergences dans un même lieu.
« Notre problème aujourd’hui est avant tout celui de l’inertie intellectuelle et de notre psychologie abimée » non « la méconnaissance des textes » ou « des calculs. (…) Notre responsabilité est de donner une histoire à notre géographie », conclut Larbi Kechat. Il faudra du temps au temps pour banaliser le débat en France. « Trois ans inchaAllah », se laisse dire une responsable associative dans la salle, convaincue des arguments présentés à la réunion. Pour l’heure, un vent de cacophonie se prépare à souffler fort et à mettre en péril la sérénité tant souhaitée des musulmans. Le point d'interrogation réside dans l'ampleur que prendra la fitna cette année.
« Notre problème aujourd’hui est avant tout celui de l’inertie intellectuelle et de notre psychologie abimée » non « la méconnaissance des textes » ou « des calculs. (…) Notre responsabilité est de donner une histoire à notre géographie », conclut Larbi Kechat. Il faudra du temps au temps pour banaliser le débat en France. « Trois ans inchaAllah », se laisse dire une responsable associative dans la salle, convaincue des arguments présentés à la réunion. Pour l’heure, un vent de cacophonie se prépare à souffler fort et à mettre en péril la sérénité tant souhaitée des musulmans. Le point d'interrogation réside dans l'ampleur que prendra la fitna cette année.
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