Le président François Hollande et le révérend Jesse Jackson à l'occasion de la journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage. © Présidence de la République.
La loi Taubira de 2001 reconnaissant l’esclavage comme un crime contre l’humanité soufflait mardi 10 mai sa quinzième bougie. Pour l’occasion, un invité très spécial a fait le déplacement : le révérend Jesse Jackson. Compagnon de lutte de Martin Luther King et candidat à l’élection présidentielle des Etats-Unis dans les années 1980, il est très attaché à la question. En juillet 2015, il s'était rendu en Guadeloupe pour visiter le Mémorial ACTe, centre culturel pour la mémoire de la traite et de l'esclavage.
En cette journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage, il a délivré un message politique très important. Il a tout d’abord participé à la traditionnelle cérémonie matinale dans le jardin du Luxembourg, à Paris. Le président François Hollande était présent ainsi que l’ancienne garde des Sceaux Christiane Taubira.
En cette journée de commémoration de l'abolition de l'esclavage, il a délivré un message politique très important. Il a tout d’abord participé à la traditionnelle cérémonie matinale dans le jardin du Luxembourg, à Paris. Le président François Hollande était présent ainsi que l’ancienne garde des Sceaux Christiane Taubira.
Esclavage : « Les criminels doivent assumer »
Jesse Jackson au ministère de l'Outre-mer © Jean-Claude Tuyishime.
Jesse Jackson s’est rendu dans l’après-midi au ministère des Outre-mer où il a exprimé son admiration pour la France. « Le fait que vous ayez une journée consacré à la commémoration de l’abolition de l’esclavage est une avancée. Les Etats-Unis n’ont toujours pas reconnu l’esclavage comme un crime contre l’humanité », a-t-il souligné.
Le révérend a ensuite fait une plaidoirie en faveur des réparations pour les victimes de l’esclavage : « Si on parle de crime, c’est qu’il y a des criminels et des victimes. Les criminels doivent assumer et réparer. Malheureusement, les victimes ne sont pas toujours au courant de cela. L’une des peurs de nos sociétés actuelles est que les victimes se lèvent et demandent réparation. La somme compensatoire serait si énorme qu’elle paraitrait irréaliste. »
Le militant du mouvement des droits civiques plaide non pas pour « un remboursement en pièces sonnantes et trébuchantes », comme le dit Louis-Georges Tin, mais plutôt pour un travail de mémoire et d’histoire. « Certains d’entre nous ne peuvent pas remonter leur généalogie à plus de deux générations. Comme des fruits coupés de leurs racines », explique-t-il. Le pasteur s’est ensuite référé à la Bible et à l’épisode de l’Exode des Juifs hors d’Egypte pour appuyer sa démonstration. Il a rappelé que Dieu a demandé au peuple juif de manger une nourriture amère lors de la fête de Pessah pour se souvenir de l’amertume et de l’acidité de l’esclavage.
Le révérend a ensuite fait une plaidoirie en faveur des réparations pour les victimes de l’esclavage : « Si on parle de crime, c’est qu’il y a des criminels et des victimes. Les criminels doivent assumer et réparer. Malheureusement, les victimes ne sont pas toujours au courant de cela. L’une des peurs de nos sociétés actuelles est que les victimes se lèvent et demandent réparation. La somme compensatoire serait si énorme qu’elle paraitrait irréaliste. »
Le militant du mouvement des droits civiques plaide non pas pour « un remboursement en pièces sonnantes et trébuchantes », comme le dit Louis-Georges Tin, mais plutôt pour un travail de mémoire et d’histoire. « Certains d’entre nous ne peuvent pas remonter leur généalogie à plus de deux générations. Comme des fruits coupés de leurs racines », explique-t-il. Le pasteur s’est ensuite référé à la Bible et à l’épisode de l’Exode des Juifs hors d’Egypte pour appuyer sa démonstration. Il a rappelé que Dieu a demandé au peuple juif de manger une nourriture amère lors de la fête de Pessah pour se souvenir de l’amertume et de l’acidité de l’esclavage.
Un Mois des mémoires pour réconcilier l'Etat et les associations
Bien qu’elles ne fassent pas référence à la Bible, les propos de Jesse Jackson concernant les réparations vont dans le sens des revendications des associations telles que le Conseil représentatif des associations noires de France (CRAN), ou le Mouvement international pour les réparations (MIR). Elles réclament, outre un dédommagement financier, une compensation symbolique par l’instauration d’un devoir de mémoire.
François Hollande s’oppose encore aux réparations financières mais a annoncé la création d’une fondation qui « diffusera la connaissance de l'esclavage, de la traite, mais aussi tout le combat des abolitionnistes ». Une politique que tente de mettre en place progressivement le Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage (CNMHE), organe consultatif, hébergé au ministère de l’Outre-mer. Présidé par Myriam Cottias, chercheuse au CNRS, le CNMHE réunit principalement des universitaires spécialisés dans la question.
Longtemps boudé par certaines associations ultramarines, la cérémonie du 10 mai posait problème. La glorification de personnalités blanches abolitionnistes au détriment de militants noirs qui ont lutté pour se délivrer de l’esclavage posait des questions déontologiques. Le 10 mai n’étant pas férié, et largement méconnu de la population française métropolitaine, les cérémonies se sont souvent résumées à des processions officielles et élitistes. Pour y remédier, le CNMHE a mis en place pour la seconde année consécutive, le Mois des mémoires qui se déroule du 27 avril au 10 juin. Quelque 90 évènements sont ainsi recensés sur une plateforme web dans le but de donner plus de visibilité à chaque initiative citoyenne ou institutionnelle.
François Hollande s’oppose encore aux réparations financières mais a annoncé la création d’une fondation qui « diffusera la connaissance de l'esclavage, de la traite, mais aussi tout le combat des abolitionnistes ». Une politique que tente de mettre en place progressivement le Comité national pour la mémoire et l’histoire de l’esclavage (CNMHE), organe consultatif, hébergé au ministère de l’Outre-mer. Présidé par Myriam Cottias, chercheuse au CNRS, le CNMHE réunit principalement des universitaires spécialisés dans la question.
Longtemps boudé par certaines associations ultramarines, la cérémonie du 10 mai posait problème. La glorification de personnalités blanches abolitionnistes au détriment de militants noirs qui ont lutté pour se délivrer de l’esclavage posait des questions déontologiques. Le 10 mai n’étant pas férié, et largement méconnu de la population française métropolitaine, les cérémonies se sont souvent résumées à des processions officielles et élitistes. Pour y remédier, le CNMHE a mis en place pour la seconde année consécutive, le Mois des mémoires qui se déroule du 27 avril au 10 juin. Quelque 90 évènements sont ainsi recensés sur une plateforme web dans le but de donner plus de visibilité à chaque initiative citoyenne ou institutionnelle.
Le concours national de la Flamme de l'Egalité lancé
Jesse Jackson, Myriam Cottias et les élèves du lycée Guillaume Tirel à Paris, lauréat du concours La Flamme de l'Egalité.
Lors de son après-midi au ministère de l’Outre-mer, le révérend Jesse Jackson a participé à la remise du prix du thèse du CNMHE. Il a ainsi récompensé Klara Boyer-Rossol pour sa recherche sur les Makoa de Madagascar. Le pasteur a également remis les prix du concours national de la Flamme de l’Egalité organisé par le Comité.
L’ensemble des établissements scolaires français a été invité à participer à ce concours en proposant un projet artistique sur « l'histoire des traites et des captures, sur la vie des esclaves et les luttes pour l'abolition, sur leurs survivances, leurs effets et leurs héritages contemporains ».
Environ 2 000 élèves ont pris part à cette première édition. Laurence De Cock, professeure en histoire-géographie a fait participer des élèves du lycée Guillaume Tirel de Paris, lauréats du concours. Selon elle, il faut aller plus loin et réformer les programmes scolaires : « Il faut faire en sorte que l’esclavage ne soit pas un chapitre à part dans les programmes mais que ce soit partie prenante de l’histoire du monde. Quand on parle de la mise en place du commerce international, il doit être question de la traite et de l’esclavage. »
L’ensemble des établissements scolaires français a été invité à participer à ce concours en proposant un projet artistique sur « l'histoire des traites et des captures, sur la vie des esclaves et les luttes pour l'abolition, sur leurs survivances, leurs effets et leurs héritages contemporains ».
Environ 2 000 élèves ont pris part à cette première édition. Laurence De Cock, professeure en histoire-géographie a fait participer des élèves du lycée Guillaume Tirel de Paris, lauréats du concours. Selon elle, il faut aller plus loin et réformer les programmes scolaires : « Il faut faire en sorte que l’esclavage ne soit pas un chapitre à part dans les programmes mais que ce soit partie prenante de l’histoire du monde. Quand on parle de la mise en place du commerce international, il doit être question de la traite et de l’esclavage. »
Une initiative originale à suivre : « Afro-futurisme : Passé-Présents-Futurs ? »
L’association française Black History Month propose une série de conversations et de projections autour du thème de l’afro-futurisme de manière à interroger le passé et le présent pour, ensemble, imaginer des possibilités élargies pour le futur. Il s’agit d’imaginer aujourd’hui un avenir délesté des maux du passé et du présent. Pour en savoir plus sur les journées Africana
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