Eunice Barber a fondu en larmes en racontant son interpellation
L'affaire remonte au samedi 22 mars. Eunice Barber était en voiture en compagnie de sa mère et de son neveu d'un an, lorsqu'un agent de police lui donne une consigne de circulation aux abords du Stade de France. L'athlète dont la langue maternelle est l'anglais tourne à gauche alors que l'agent de police lui demandait de tourner à droite. « Je n'ai pas compris son indication », explique-t-elle à la presse. C'est alors que tout bascule. « Le policier a tapé sur ma voiture. J'ai ouvert la vitre et ce policier m'a giflée. Je suis sortie de la voiture. D'autres policiers sont arrivés...L'un m'a tordu la main et un autre m'a tiré les cheveux puis ils m'ont plaquée au sol.»
« Je ne vais jamais pouvoir lancer le javelot »
Cette version donnée par l'athlète diffère de la version de la police. Selon elle, Eunice aurait refusé une consigne d'un agent et aurait continué à rouler à vitesse constante entraînant l'agent de l'ordre avec elle. Une fois la voiture arrêtée, la championne serait descendue hystérique et aurait insulté et frappé des policiers qui n'avaient plus d'autre choix que d'user de la force pour l'arrêter. Durant la scène l'athlète a mordu un agent de police. Elle le reconnaît: « Les policiers continuaient à me tordre les mains, mes bras, qui sont mon outil de travail. Je me disais alors « je ne vais jamais pouvoir relancer le poids et le javelot ». J'étais désespérée et j'ai mordu un policier. »
Neutralisée, la jeune femme de 32 ans est mise dans une voiture de police sous bonne garde. « Ils m'ont ensuite mise dans le fourgon, dit-elle. Là, deux femmes m'ont marché sur les mains et la tête. Elles m'ont dit: 'tu crois qu'on fait ça en Afrique'?...Elles m'ont dit: « tu as de la chance qu'il y a du monde sinon on pourrait te faire pire. Quand tu sortiras d'ici tu porteras des béquilles». »
Portant une minerve au cou, Eunice Barber a bénéficié de sept jours d'interruption temporaire de travail. Elle souffre d'insensibilité des deux mains et d'une élongation à l'épaule droite.
Française par choix
Championne du monde de l'heptathlon (1999); du saut en longueur (2003)
Née à Freetown, en Sierra Léone, Eunice Barber est repérée par l'attaché linguistique de l'ambassade de France qui lui propose de rejoindre son club. Elle débarque en France en 1993, elle a alors 19 ans. Elle progresse suffisamment pour finir à la cinquième place aux JO d'Atlanta. Sa carrière sera menacée par une blessure dont elle se remet courageusement pour reprendre la compétition au plus haut niveau après deux années d'interruption.
L'évolution de ses résultats en font une athlète convoitée à qui Américains et Anglais proposent de rejoindre leurs équipes en lui offrant la nationalité. Mais Eunice, l'anglophone, choisit la nationalité française en février 1999. Quatre mois plus tard, elle est la capitaine de l'équipe de France féminine qui participe à la Coupe d'Europe à Paris. L'équipe finit troisième, Eunice Barber est deuxième au saut en longueur. Au meeting de Charléty, elle emporte l'épreuve combinée de la Coupe d'Europe et bat le record de France du saut en longueur avec une performance de 7m01.
L'évolution de ses résultats en font une athlète convoitée à qui Américains et Anglais proposent de rejoindre leurs équipes en lui offrant la nationalité. Mais Eunice, l'anglophone, choisit la nationalité française en février 1999. Quatre mois plus tard, elle est la capitaine de l'équipe de France féminine qui participe à la Coupe d'Europe à Paris. L'équipe finit troisième, Eunice Barber est deuxième au saut en longueur. Au meeting de Charléty, elle emporte l'épreuve combinée de la Coupe d'Europe et bat le record de France du saut en longueur avec une performance de 7m01.
« Ils sont devenus gentils »
Championne d'Europe, recordwoman, et capitaine de l'équipe nationale féminine, Eunice Barber est alors une star reconnue lors des championnats du monde de Séville. Elle bat le record de l'Heptathlon et s'impose définitivement comme une championne jusqu'aux Jeux de Sydney. Sa préparation pour Sydney est néanmoins perturbée par des blessures à répétition et sa séparation d'avec son entraîneur quelques jours avant le début des épreuves. Depuis, Eunice Barber a quitté le devant de la scène de l'athlétisme et profite de la présence de sa mère venue la rejoindre.
Il ne fait de doute que les agents qui l'ont interpellée n'avaient pas reconnu la championne. Mais une fois au poste, une fois l'identité déclinée, « ils sont devenus gentils » précise-t-elle. « Pourquoi je ne l'ai pas dit avant? J'ai envie de vivre comme tout le monde. Je voulais qu'on me prenne pour ce que je suis: un être humain. »
Quatre jours après son interpellation, Eunice Barber a porté plainte.