Connectez-vous S'inscrire

Politique

Sorties scolaires : le recadrage salutaire d'Edouard Philippe, qui refuse une loi d'interdiction du voile

Rédigé par | Mercredi 16 Octobre 2019 à 08:00

           

« On peut porter un voile quand on accompagne une sortie scolaire », a déclaré, mardi 15 octobre, le chef du gouvernement, pour qui une loi d'interdiction n'est pas « l'enjeu d'aujourd'hui ». Un refus clair des plus bienvenus pour tenter d'apaiser le débat autour de la laïcité que des hommes et femmes politiques veulent dénaturer.



© Jacques Paquier/CC BY 2.0
© Jacques Paquier/CC BY 2.0
L'heure est à une mise au point, nécessaire face au climat délétère du moment. Alors qu'Emmanuel Macron est appelé à réagir face aux amalgames et à la haine visant les musulmans de France, le Premier ministre Édouard Philippe a fait part de son opposition quant à une loi interdisant le port des signes religieux, du voile en particulier, pour les accompagnatrices aux sorties scolaires.

« Je ne pense pas, pour ma part, que l’enjeu aujourd’hui soit de faire une loi sur les accompagnants scolaires », a faire part, lors des questions d’actualité à l’Assemblée nationale mardi 15 octobre, le chef du gouvernement, en réponse au député (LR) Jean-Louis Masson. Cet élu du Var lui demandait alors s'il était « prêt oui ou non à interdire le port du voile lors des sorties scolaires » afin de « sortir de l’ambiguïté ».

« On peut porter un voile quand on accompagne une sortie scolaire mais on n’a pas le droit de faire du prosélytisme et les autorités peuvent et doivent intervenir si tel est le cas. Voilà l'état du droit », a-t-il déclaré.

Une leçon de droit face aux députés

Edouard Philippe a rappelé en amont l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lequel « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ». Il a aussi rappelé les fondements de la loi de 1905 et le « double principe » qui régit la laïcité, à savoir « la liberté des citoyens de croire ou de ne pas croire (et) la neutralité absolue des pouvoirs publics s’agissant de faits religieux ».

Si les agents du service public « sont astreints à un strict devoir de neutralité qui leur interdit de manifester leurs croyances religieuses, comme d’ailleurs leurs convictions politiques, par des signes extérieurs, notamment vestimentaires », ce n'est pas le cas pour les usagers du service public, les parents d’élèves ou encore les étudiants, « c’est la loi ».

« Défendre la laïcité » tout en menant « sans faiblesse la lutte contre la radicalisation »

« L’enjeu, c’est d’éviter que les enfants, en raison des convictions religieuses de leurs parents pouvant relever du communautarisme ou de l’islam politique, échappent à l’école », a-t-il aussi estimé, en pointant le « danger de la déscolarisation »« bien plus immense que l’expression d’une liberté permise par la loi »

« Ma ligne, c’est de me battre pour défendre la laïcité (…), de mener sans faiblesse la lutte contre la radicalisation », a encore précisé le Premier ministre.

Le débat sur le port du voile pour les accompagnatrices scolaires a été violemment relancé après l'agression d'une femme par un élu du Rassemblement national lors d’une séance du conseil régional de Bourgogne-Franche-Comté le 11 octobre. Plutôt que de se contenter d'affirmer la primauté du droit, le ministre de l'Education nationale Jean-Michel Blanquer a affirmé que « le voile n'est pas souhaitable dans notre société ». Des propos taclés parmi les membres d'En Marche dont le député du Val d'Oise Aurélien Taché, qui a déploré une position floue du ministre de nature à ne pas calmer le débat.

Le recadrage d'Edouard Philippe est salutaire. Toutefois, le débat, qui divise dans les rangs même de la majorité, risque malheureusement de durer. A l'initiative des Républicains, des débats au Sénat et à l'Assemblée nationale autour de l'interdiction du voile sont en vue. Au grand dam des citoyens de confession musulmane, au premier chef, qui réclament la paix.

Lire aussi :
Macron appelé à condamner publiquement les discriminations et les amalgames contre les musulmans
Un élu RN étale sa méconnaissance de la laïcité pour tenter d'exclure une femme musulmane d'un lieu public
La laïcité pour principe rassembleur: lettre ouverte au Président de la République sur les parents accompagnateurs aux sorties scolaires


Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


SOUTENEZ UNE PRESSE INDÉPENDANTE PAR UN DON DÉFISCALISÉ !