Sous l’égide du Cheikh Khaled Bentounes, président d’honneur des Scouts musulmans de France et guide spirituel de la Confrérie Soufie Alawiyya, s’est ouvert la dixième tente d’Abraham. Marquant ainsi le quinzième anniversaire du scoutisme musulman, le colloque a voulu donner un nouvel élan d’espoir en abordant des thèmes difficiles comme Le Mal être de la jeunesse et le mal être environnemental.
« Nous n’héritons pas de la planète de nos parents, nous l’empruntons à nos enfants »
Jacques Bregeon, directeur du Collège des hautes études de l’Environnement et du Développement Durable (CHEE&DD)
Célèbre phrase de Saint Exupéry, résumant parfaitement la problématique actuelle de l’environnement. Plus qu’un message d’espoir, les scouts musulmans tirent la sonnette d’alarme. Après « le défi pour la terre » lancé par Nicolas Hulot, ainsi que la déclaration officielle de L’ONU : « D’ici à quarante ans, si nous ne nous mobilisons pas, l’espèce humaine est condamnée à disparaître », le message est clair mais les interrogations sont multiples : « Dans quelle société voulons-nous vivre ? Quelle planète allons-nous transmettre ? Quelles actions concrètes souhaitons-nous engager pour répondre aux questions et défis de notre temps ? »
L’islam offre une vision de notre planète très particulière. Elle est la seconde partie de la révélation, l’environnement s’ouvrant sous nos yeux comme un livre à découvrir, marquant une symbiose parfaite avec la révélation coranique. La planète, sa constitution, son fonctionnement, ses règles sont pour nous, musulmans, une partie de la révélation et plus encore, « une partie de la Face de Dieu, constituée de l’assemblage du livre de la création et du Saint Coran ».
C’est dans cette perspective que Jacques Bregeon, directeur du Collège des hautes études de l’Environnement et du Développement Durable (CHEE&DD) explique à la salle comble, l’état de notre planète actuellement : « Ce paysage n’est pas très réjouissant, mais l’important est que nous soyons tous bien informés, car ceci nous permet de dépasser nos différences et de conjuguer nos efforts. » Commençant ainsi son exposé par les premières photos de notre planète, prises de la lune en 1969, le directeur du CHEE&DD explique qu’à partir de ce moment-là, « nous avons compris que nous étions tous sur un même vaisseau. Nous sommes dans l’immensité cosmique et nous avons la responsabilité de ce monde. »
Attention danger !
vision du monde à travers le paramètre du PNB (Produit National Brut)
Ancien scout, Jacques Bregeon, va s’attacher à définir les points sensibles de notre planète et surtout quelles seraient les solutions envisageables pour notre survie. Trois grands enjeux nous concernent directement : le réchauffement climatique, la pénurie énergétique notamment du pétrole et le développement démographie asiatique en pleine expansion. Ces trois éléments sont liés et interdépendants.
Le plus grave pour notre survie reste le réchauffement climatique. « En matière de climat on ne peut rien y faire, on peut simplement freiner l’évolution. C’est un vrai enjeu pour l’humanité. […] il va falloir nous préparer à en subir les conséquences.» Explique Jacques Bregeon. Le CO², directement lié à ce phénomène, a une durée de vie de 100 ans, une fois largué dans l’atmosphère.
Le taux de CO² dans l'air est compris dans des cycles stables qui eurent lieu durant les 400 000 dernières années. Cependant aujourd’hui, ce taux a atteint un niveau totalement nouveau pour notre planète. D'autre part, ce réchauffement n’apparaît pas de façon uniforme sur la planète. Selon des prévisions mathématiques, les zones les plus touchées seront les parties nord de notre terre, causant une augmentation de la température ambiante de 8° Celsius. Les conséquences seront catastrophiques : la fonte des glaces causera la montée des niveaux marins ainsi que des perturbations climatiques phénoménales.
De plus, à partir de 2040 il ne sera plus question d’avoir une économie semblable à la notre, qui est entièrement basée sur le pétrole. Ce dernier va devenir de plus en plus rare, son prix va augmenter et le pétrole ne sera donc plus économiquement exploitable. Le problème majeur va se trouver dans la tentation du retour à l’exploitation du charbon. Très présente sur notre planète, cette énergie est extrêmement polluante et donc très dangereuse pour notre environnement. Les solutions envisagées seraient d'exploiter d'avantages d'énergies renouvelables comme l’éolien ou le solaire. La combinaison de toutes les sources d’énergie sera nécessaire à la demande croissante.
Enfin, la démographie joue un rôle primordial, n’oublions pas qu’au cours du 20ème siècle la population mondiale est passée de 1,6 milliards à 6,4 milliards d’habitants. Dans les cinquante ans qui viennent nous allons passer à plus de 9 milliards et demi d’êtres humains. « La lumière du monde sera totalement liée à la manière dont l’Inde et la Chine vont se développer sur un plan économique au cours des prochaines années. » Le développement humain de notre planète nous conduit déjà à consommer plus que ce que la planète peut raisonnablement nous offrir.
Les solutions se trouvent notamment dans le développement durable, viable, vivable et équitable ; dans les questions de gouvernance internationale et de son organisation. Trois leviers sont donc à étudier : le levier financier, le levier technologique : sachons par exemple que « le flux solaire est dix mille fois supérieur aux besoins de l’humanité, si nous pouvions en capter 1 dix millième de ce flux, nous n’aurions plus de problème énergétique. » Le dernier levier est politique. « Les Nation unies sont conscientes de tous ça mais n ‘ont malheureusement aucun impact sur les politiques des états. […] l’ONU en tant que « machin » n’a pas le pouvoir de faire bouger les choses. » Conclu Jacques Bregeon
Diversité
Un spectateur attentif
C’est donc autour de ces thèmes humains réunificateurs, malgré leur consonance négative, que le colloque s’est déroulé. Beaucoup de personnalités de tous horizons ont pris part à cette rencontre. De Antoine Sfeir , politologue, louant les mérites du dernier livre du Cheikh Khaled Bentounes, à Julien Dray, vice-président du Conseil régional Ile de France ; le plus étonnant et certainement le plus réjouissant, a été la présence de représentants de différentes religions ou courants de pensées, présents en France. Ainsi Lam Lhundroup de l’institut Karma Ling, pour les sensibilités bouddhistes, a pu s’exprimer notamment sur l’impossibilité de résoudre le problème de l’identité, car nul ne peut répondre aux questions telles que « qui suis-je ? Quel est le sens de ma vie ? » Reprenant ainsi une phrase du Cheikh Bentounes : « Le problème n’est pas de savoir de quelle religion je suis, mais quelle vérité je cherche ? » La présence d’Eric Julien, accompagnateur de Indiens Kogi de Colombie, et enfin les représentants israélites du scoutisme français, son directeur, ne parlant pas au micro pour cause de Shabbat, criant haut et fort « longue vie aux scouts musulmans de France ! »