Le collège privé catholique Stanislas à Paris est au cœur d'une tempête médiatique après la révélation de dérives dans l’application de son contrat d’association. © Facebook/Stanislas
Le groupe scolaire privé catholique Stanislas, situé dans le chic 6e arrondissement de la capitale, est aujourd’hui au cœur d’une tempête médiatique qu'une certaine élite parisienne aurait bien voulue s’en passer. Le prestigieux établissement dans lequel sont scolarisés les enfants de la ministre de l’Education nationale, Amélie Oudéa-Castéra, voit ses dérives exposées au grand jour après la révélation, mardi 16 janvier par Mediapart, du rapport de l’Inspection générale de l’Education, du Sport et de la Recherche (IGESR). Celui-ci, remis en juillet 2023, n’avait pas été rendu public par le ministère, alors dirigé par l’actuel Premier ministre Gabriel Attal. Pourtant, les conclusions de l’enquête administrative diligentée au collège livrent « des dérives dans l’application du contrat d’association ».
Des prises de position « intolérables » lors de cours religieux
La première d’entre elle n’est pas des moindres. De la maternelle aux cours préparatoires, Stanislas oblige en effet tout élève scolarisé à suivre une heure de catéchèse par semaine. Or, en vertu de la loi Debré de 1959, l'enseignement religieux ne peut être que facultatif. Ces cours, présentés par la direction comme « un apport culturel dans la formation des élèves », aurait en fait « une tendance au prosélytisme » selon le témoignage de plusieurs parents.
La mission, lit-on dans le rapport, « s’interroge sur les conditions du respect de la liberté de conscience auquel l’établissement s'est engagé en signant le contrat d’association », d’autant plus que lors de ces cours, « certains catéchistes expriment des convictions personnelles qui outrepassent les positions de l’Eglise catholique, par exemple sur l’IVG avec des propos en tenant des propos remettant en cause la loi ou susceptibles d’être qualifiés pénalement sur l’homosexualité ».
Sur ce point, « le caractère répété des prises de position intolérables » d’un intervenant en place pendant trois ans – écarté après mai 2023 – a été signalé par la mission, pour qui la situation révèle « un triple dysfonctionnement de la catéchèse, aggravé par le fait qu’elle est obligatoire et intégrée dans l’emploi du temps des élèves » : « l’absence de tout cadrage formalisé sur la teneur et le périmètre (des) interventions » de catéchistes dont le recrutement pose problème ainsi que « l’absence de protocole de remontée des informations alarmantes et de leur traitement ». Enfin, « la gravité des propos est minimisée par l’encadrement et leur possible impact psychologique sur des adolescents n’est pas pris en compte » notamment sur les questions relatives à l’orientation sexuelle et au viol.
La mission, lit-on dans le rapport, « s’interroge sur les conditions du respect de la liberté de conscience auquel l’établissement s'est engagé en signant le contrat d’association », d’autant plus que lors de ces cours, « certains catéchistes expriment des convictions personnelles qui outrepassent les positions de l’Eglise catholique, par exemple sur l’IVG avec des propos en tenant des propos remettant en cause la loi ou susceptibles d’être qualifiés pénalement sur l’homosexualité ».
Sur ce point, « le caractère répété des prises de position intolérables » d’un intervenant en place pendant trois ans – écarté après mai 2023 – a été signalé par la mission, pour qui la situation révèle « un triple dysfonctionnement de la catéchèse, aggravé par le fait qu’elle est obligatoire et intégrée dans l’emploi du temps des élèves » : « l’absence de tout cadrage formalisé sur la teneur et le périmètre (des) interventions » de catéchistes dont le recrutement pose problème ainsi que « l’absence de protocole de remontée des informations alarmantes et de leur traitement ». Enfin, « la gravité des propos est minimisée par l’encadrement et leur possible impact psychologique sur des adolescents n’est pas pris en compte » notamment sur les questions relatives à l’orientation sexuelle et au viol.
Une pression nette sur les filles
D’autres dérives ont aussi été constatées dans les cours de SVT (sciences de la vie et de la Terre), dirigés par certains professeurs qui ont pris le parti de « ne pas parler des infections sexuellement transmissibles (IST) », d’EMC (enseignement moral et civique) ou encore d’éducation à la sexualité qui entre « en porte-à-faux avec le projet éducatif » selon la mission.
Dans cet établissement historiquement réservé aux garçons, les espaces et les équipements sont « insuffisamment adaptés à la mixité », tandis que l’attention particulière à la tenue des jeunes filles est « empreinte de sexisme et véhiculent des stéréotypes de genre ». Les tenues doivent susciter le respect et manifester la « dignité de leur féminité » selon le règlement intérieur élaboré en 2016, « attribuable au directeur actuel ». Aux élèves qui dérogent à « l’esprit Stan », l’établissement peut employer, selon des témoins, des méthodes jugées « brutaux » pour écarter des élèves, menant ainsi à des « ruptures douloureuses ».
Dans cet établissement historiquement réservé aux garçons, les espaces et les équipements sont « insuffisamment adaptés à la mixité », tandis que l’attention particulière à la tenue des jeunes filles est « empreinte de sexisme et véhiculent des stéréotypes de genre ». Les tenues doivent susciter le respect et manifester la « dignité de leur féminité » selon le règlement intérieur élaboré en 2016, « attribuable au directeur actuel ». Aux élèves qui dérogent à « l’esprit Stan », l’établissement peut employer, selon des témoins, des méthodes jugées « brutaux » pour écarter des élèves, menant ainsi à des « ruptures douloureuses ».
Une affaire qui souligne le traitement brutal du dossier Averroès
Devant un rapport aussi édifiant, Stanislas va-t-il être déconventionné ? Ce n’est pas à l’ordre du jour. Amélie Oudéa-Castéra, pour qui « ce rapport ne remonte aucun fait d’homophobie, ni aucun cas de harcèlement », a annoncé un « plan d’action » comptant quinze mesures et qui sera suivi avec « rigueur ».
« Notre dossier n'a rien à voir avec celui de Stanislas. Mais on aurait préféré être traité comme Stanislas, c’est sûr », déclare, sous couvert d’anonymat, un cadre du lycée Averroès à Saphirnews. Le « deux poids deux mesures », c'est la nette impression que laisse le traitement politique de l'affaire secouant Stanislas par rapport à celle ébranlant le lycée musulman de Lille. Les griefs à son encontre – « imaginaires et artificiels » pour la défense – ont en effet justifié, aux yeux du préfet, la résiliation du contrat d'association.
« Tous nos cours sont mixtes, ce qui n’est pas le cas à Stanislas. Les propos qui sont reprochés au lycée sont très anciens et ont été tenus en dehors de l’établissement alors que ceux qui sont reprochés à Stanislas sont récents et ont été tenus devant des élèves », souligne le cadre. Le cours d’éthique musulmane, qui concentre plusieurs critiques sur lesquelles la direction s'est maintes fois expliquée, a toujours été facultatif pour les élèves. Quant aux dysfonctionnements administratifs et financiers, l'association a assuré avoir très tôt mis en place un protocole pour les corriger. Des efforts qui n'ont vraisemblablement pas pesé lourd dans la décision préfectorale.
Pas plus que le rapport de l’IGESR daté de juin 2020, que Saphirnews a pu consulter et qui présente le projet éducatif du lycée Averroès comme « le seul dans le paysage éducatif français à allier une conception musulmane de l’éducation à l’enseignement des valeurs républicaines ». « Rien dans les constats faits par la mission (…) ne permet de penser que les pratiques enseignantes divergent des objectifs et principes fixés et ne respectent pas les valeurs de la République. Elle en veut pour preuve les treize inspections d’enseignants qui ont été menées dans l’établissement depuis 2015, ce qui doit en faire l’établissement le plus contrôlé de l’académie, sans que jamais aucune remarque défavorable n’ait été formulée à l’encontre des pratiques enseignantes observées », lit-on.
« Notre dossier n'a rien à voir avec celui de Stanislas. Mais on aurait préféré être traité comme Stanislas, c’est sûr », déclare, sous couvert d’anonymat, un cadre du lycée Averroès à Saphirnews. Le « deux poids deux mesures », c'est la nette impression que laisse le traitement politique de l'affaire secouant Stanislas par rapport à celle ébranlant le lycée musulman de Lille. Les griefs à son encontre – « imaginaires et artificiels » pour la défense – ont en effet justifié, aux yeux du préfet, la résiliation du contrat d'association.
« Tous nos cours sont mixtes, ce qui n’est pas le cas à Stanislas. Les propos qui sont reprochés au lycée sont très anciens et ont été tenus en dehors de l’établissement alors que ceux qui sont reprochés à Stanislas sont récents et ont été tenus devant des élèves », souligne le cadre. Le cours d’éthique musulmane, qui concentre plusieurs critiques sur lesquelles la direction s'est maintes fois expliquée, a toujours été facultatif pour les élèves. Quant aux dysfonctionnements administratifs et financiers, l'association a assuré avoir très tôt mis en place un protocole pour les corriger. Des efforts qui n'ont vraisemblablement pas pesé lourd dans la décision préfectorale.
Pas plus que le rapport de l’IGESR daté de juin 2020, que Saphirnews a pu consulter et qui présente le projet éducatif du lycée Averroès comme « le seul dans le paysage éducatif français à allier une conception musulmane de l’éducation à l’enseignement des valeurs républicaines ». « Rien dans les constats faits par la mission (…) ne permet de penser que les pratiques enseignantes divergent des objectifs et principes fixés et ne respectent pas les valeurs de la République. Elle en veut pour preuve les treize inspections d’enseignants qui ont été menées dans l’établissement depuis 2015, ce qui doit en faire l’établissement le plus contrôlé de l’académie, sans que jamais aucune remarque défavorable n’ait été formulée à l’encontre des pratiques enseignantes observées », lit-on.
La brutalité de la décision prise à l’encontre d’Averroès interroge
Bien avant l’affaire qui secoue « Stan », les avocats d’Averroès dénonçaient une « rupture d’égalité » entre les établissements privés au regard du grand nombre de contrôles subis par le lycée ces dernières années. Me William Bourdon évoquait aussi le cas d'écoles catholiques dont des enquêtes journalistiques « ont montré qu’il y avait des projets pédagogiques souillés par des éléments de langage homophobes, racistes, parfois antisémites ». « Avez-vous eu connaissance de mesures prises aussi brutalement dans les établissements qui continuent à ronronner dans une idéologie parfois mortifère et toxique ? Le double standard est donc ici parfaitement objectivé », a-t-il alors affirmé, en décembre 2023, lors d’une conférence de presse annonçant des recours judiciaires contre la préfecture de Lille. Une déclaration qui prend, un mois après, plus de poids pour les alliés du groupe scolaire musulman.
La justice est appelée à trancher prochainement sur le cas du lycée Averroès, qui a déposé trois recours pour contester la décision préfectorale à son encontre. Quant à Stanislas, des voix s’élèvent pour réclamer des sanctions. Les sénateurs Ian Brossat et Pierre Ouzoulias ainsi que l’association SOS Homophobie appellent à la résiliation du contrat d’association et ont annoncé, mercredi 17 janvier, saisir la justice en effectuant un signalement auprès du procureur de Paris, au titre de l’article 40 du Code de la procédure pénale. La Ville de Paris a décidé la suspension du versement des subventions à Stanislas (plus de 1,3 million d’euros au titre de l'année 2022-2023), « dans l’attente des clarifications requises de la part de l’Etat ».
De son côté, la direction du groupe scolaire a réagi en affirmant que les inspecteurs « ne confirment pas les faits d'homophobie, de sexisme et d'autoritarisme mis en avant par les articles de presse ». Néanmoins, assure-t-elle, « nous avons en interne commencé à travailler sur les préconisations qui dépendent de notre responsabilité et de notre initiative : la formation et le suivi des intervenants en instruction religieuse, la remontée d’information sur tout incident de quelque nature qu’il soit, la reformulation d’un certain nombre de points du règlement intérieur et une explicitation de nos démarches d’orientation rappelant le libre choix des parcours académique de nos élèves en Seconde et en Terminale ».
Lire aussi :
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Loin des fantasmes, la réalité de l'établissement musulman Averroès racontée par un professeur
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De son côté, la direction du groupe scolaire a réagi en affirmant que les inspecteurs « ne confirment pas les faits d'homophobie, de sexisme et d'autoritarisme mis en avant par les articles de presse ». Néanmoins, assure-t-elle, « nous avons en interne commencé à travailler sur les préconisations qui dépendent de notre responsabilité et de notre initiative : la formation et le suivi des intervenants en instruction religieuse, la remontée d’information sur tout incident de quelque nature qu’il soit, la reformulation d’un certain nombre de points du règlement intérieur et une explicitation de nos démarches d’orientation rappelant le libre choix des parcours académique de nos élèves en Seconde et en Terminale ».
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