Dialogue, ateliers, repas pris en commun, découvertes des prières des musulmans et de celles des chrétiens… Une expérience d’une vie partagée pendant un weekend d’amitié islamo-chrétienne organisé du 5 au 8 mai 2017, à Taizé, où vit une communauté monastique chrétienne, fondée en 1940 par frère Roger. (Photo © Laurent Grzybowski)
Nous avons été nombreux à entendre parler du mur de barbelés de 4 m de haut et sur 175 km de frontières érigé entre la Serbie et la Hongrie que Viktor Orbán, populiste de la droite dure au pouvoir en Hongrie, a voulu mettre en place contre l’arrivée des migrants. Nous avons été nombreux à entendre parler des situations de détresse des réfugiés à Calais.
En ce mois de Ramadan, nous nous souvenons des corps échoués d’Aylan et de toutes celles et tous ceux qui sont enterrés anonymes sur l’ile de Lesbos, en Grèce. En ce mois de Ramadan, nous gardons en mémoire les visages et les regards d’hommes, de femmes et d’enfants fuyant la Syrie, l’Érythrée, le Soudan, l’Irak, bravant les mers et les montagnes jugés plus surs que leur propre pays.
En cette année, nous avons souvent désespéré de notre condition humaine. Pourtant, loin des caméras, silencieusement, des femmes et des hommes continuent de restaurer nos espoirs en l’avenir.
En ce mois de Ramadan, nous nous souvenons des corps échoués d’Aylan et de toutes celles et tous ceux qui sont enterrés anonymes sur l’ile de Lesbos, en Grèce. En ce mois de Ramadan, nous gardons en mémoire les visages et les regards d’hommes, de femmes et d’enfants fuyant la Syrie, l’Érythrée, le Soudan, l’Irak, bravant les mers et les montagnes jugés plus surs que leur propre pays.
En cette année, nous avons souvent désespéré de notre condition humaine. Pourtant, loin des caméras, silencieusement, des femmes et des hommes continuent de restaurer nos espoirs en l’avenir.
Une communauté chrétienne œcuménique
Un après-midi lumineux et ensoleillé automnal, au cœur du paysage immuable de Bourgogne avec ses vignobles, ses églises et son silence, transpercé par quelques jeux et cris d’enfants en arabe, me replonge instantanément dans les faubourgs de Beyrouth et les ruelles d’Al-Quds.
Pendant quelques minutes plantée devant cette petite maison de pierre, j’entends les rires de trois enfants. Intriguée, je retourne auprès de mes hôtes qui sont membres de la communauté monastique des Frères de Taizé, une communauté chrétienne œcuménique qui accueille depuis la Seconde Guerre mondiale d’abord des orphelins puis des jeunes chrétiens venus de partout dans le monde.
Taizé est une institution située au cœur de la Bourgogne, tout près de Cluny et de sa basilique drainant des dizaines de milliers de personnes depuis près de 70 ans. On aurait pu penser que ces hommes et ces femmes de foi qui ont fait le choix de se retirer de la vie civile puissent faire le choix aussi de fermer les yeux sur ce monde de guerres, qui semble si lointain quand on séjourne dans ce lieu. Ce n’est pas le choix des descendants de Frère Taizé, fondateur de la communauté monastique composé d’hommes qui prient et accompagnent les fidèles lors des trois prières communes qui rythment la journée.
Pendant quelques minutes plantée devant cette petite maison de pierre, j’entends les rires de trois enfants. Intriguée, je retourne auprès de mes hôtes qui sont membres de la communauté monastique des Frères de Taizé, une communauté chrétienne œcuménique qui accueille depuis la Seconde Guerre mondiale d’abord des orphelins puis des jeunes chrétiens venus de partout dans le monde.
Taizé est une institution située au cœur de la Bourgogne, tout près de Cluny et de sa basilique drainant des dizaines de milliers de personnes depuis près de 70 ans. On aurait pu penser que ces hommes et ces femmes de foi qui ont fait le choix de se retirer de la vie civile puissent faire le choix aussi de fermer les yeux sur ce monde de guerres, qui semble si lointain quand on séjourne dans ce lieu. Ce n’est pas le choix des descendants de Frère Taizé, fondateur de la communauté monastique composé d’hommes qui prient et accompagnent les fidèles lors des trois prières communes qui rythment la journée.
Une tradition d’accueil
(photo © Laurent Grzybowski)
Depuis les années 1970, les femmes et les hommes qui œuvrent au sein de la communauté de Taizé ont perpétué la tradition d’accueil de migrants et d’hommes et de femmes touchés par les conflits.
Ainsi, lors de la tragédie des boat people venus du Vietnam, une famille venue des terres bombardées et brulées au napalm par l’Amérique de Richard Nixon est venue s’installer. En pleine guerre civile et génocide rwandais, une autre famille a rejoint une petite maison préparée pour eux. Puis sont venus les Bosniaques musulmans. Des coptes chrétiens, une famille irakienne chrétienne et Abdelsattar et sa famille sont les derniers arrivants. Abdelsattar est père de trois enfants et d’un nourrisson de quelques mois, il est calligraphe. Originaires de Homs, sa famille et lui ont vécu quelques années au Liban, où Frère Maxime, un des moines de la communauté de Taizé, a fait leur connaissance.
Ainsi, lors de la tragédie des boat people venus du Vietnam, une famille venue des terres bombardées et brulées au napalm par l’Amérique de Richard Nixon est venue s’installer. En pleine guerre civile et génocide rwandais, une autre famille a rejoint une petite maison préparée pour eux. Puis sont venus les Bosniaques musulmans. Des coptes chrétiens, une famille irakienne chrétienne et Abdelsattar et sa famille sont les derniers arrivants. Abdelsattar est père de trois enfants et d’un nourrisson de quelques mois, il est calligraphe. Originaires de Homs, sa famille et lui ont vécu quelques années au Liban, où Frère Maxime, un des moines de la communauté de Taizé, a fait leur connaissance.
Malgré la guerre et ses traumatismes
Invitée à venir à témoigner auprès des frères Taizé lors du printemps dernier, j’avais aussi été sollicitée pour accueillir cette famille. Avec, entre autres, les premiers pas de leurs trois enfants à l’école de campagne. Âgés de 8, 6 et 5 ans, Souad et ses deux frères avaient été scolarisés par intermittence dans les camps de réfugiés qu’ils ont fréquentés pendant leur exil qui a duré trois ans. Malgré la guerre et ses traumatismes, ils n’ont qu’une seule hâte : lire, écrire, dessiner, jouer. L’institutrice est aussi émue et enthousiaste que je le suis face à leurs premiers mots prononcés dans la langue de Molière.
Le lendemain, je quitte Souad, petite fille frêle, et sa famille, rescapées du martyr syrien qui dure depuis plus de cinq ans. Et je repense à tous ces héros ordinaires qui sauvent notre humanité. « Celui qui sauve une âme sauve l’humanité entière », nous dit le Saint Coran.
Le lendemain, je quitte Souad, petite fille frêle, et sa famille, rescapées du martyr syrien qui dure depuis plus de cinq ans. Et je repense à tous ces héros ordinaires qui sauvent notre humanité. « Celui qui sauve une âme sauve l’humanité entière », nous dit le Saint Coran.
Sincérité et bienveillance
Il y a quelques semaines, je suis retournée à Taizé lors d’un weekend d’amitié islamo-chrétienne où plus de 300 personnes se sont rendues. Au côté d’un des moines de Taizé rencontré l’année dernière et qui est un de ces artisans de la nouvelle vie de cette famille syrienne, j’ai partagé mon parcours spirituel auprès d’un public composé de jeunes musulmans et de jeunes chrétiens.
Partager une expérience de foi n’est pas chose aisée. C’est d’autant plus vrai quand on le fait face à une personne d’une autre foi et qui a fait la démarche d’épouser une vie monastique.
Du fait de mes activités associatives, je dois avouer que je suis habituée à être au contact de femmes et d’hommes de foi. Dans un espace de respect et d’affirmation de soi. Pourtant, dans cet échange, j’ai pu effleurer l’espace d’une heure la beauté et la joie du désir de connaissance de l’autre et de partage fort, sincère et bienveillant.
Partager une expérience de foi n’est pas chose aisée. C’est d’autant plus vrai quand on le fait face à une personne d’une autre foi et qui a fait la démarche d’épouser une vie monastique.
Du fait de mes activités associatives, je dois avouer que je suis habituée à être au contact de femmes et d’hommes de foi. Dans un espace de respect et d’affirmation de soi. Pourtant, dans cet échange, j’ai pu effleurer l’espace d’une heure la beauté et la joie du désir de connaissance de l’autre et de partage fort, sincère et bienveillant.