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Un jeudi mémorable à l'Institut du monde arabe

Rédigé par Djebbar Amine | Vendredi 28 Janvier 2005 à 00:00

Le jeudi 20 janvier 2005 l’Institut du monde Arabe, à Paris, a rendu un vibrant hommage à Yasser Arafat disparu le 11 novembre dernier à l’hôpital de Percy en région parisienne. Outre l’évocation de son combat, c’est surtout sa personnalité et son charisme qui furent mis en exergue grâce à un parterre d’intervenants de grande qualité. Une soirée de souvenirs riche en émotions et en anecdotes.



Le jeudi 20 janvier 2005 l’Institut du monde arabe, à Paris, a rendu un vibrant hommage à Yasser Arafat disparu le 11 novembre dernier à l’hôpital de Percy en région parisienne. Outre l’évocation de son combat, c’est surtout sa personnalité et son charisme qui furent mis en exergue grâce à un parterre d’intervenants de grande qualité. Une soirée de souvenirs riche en émotions et en anecdotes.

La rencontre débute à 18h40 à l’auditorium de l’Institut du monde arabe (IMA). La salle est quasi comble (environ 300 places). C’est une foule assez hétérogène. Beaucoup de personnes d’un certain âge, mais aussi un grand nombre de jeunes. Leïla Shahid, porte parole de l’OLP en France, est parmi le public.

Une projection de film ouvre la séance. Elle dure une dizaine de minutes où l’on voit l’arrivée de Yasser Arafat par bateau, escorté par deux frégates militaires, en Grèce. Des documents d’archives de qualité vétuste mais exclusifs. Aucune voix off. L’accent est mis, à travers l’image, sur le comportement calme et observateur d’Abou Amar vis-à-vis de ses proches. Le film s’achève presque subitement sur l’accueil et les accolades de son homologue grec. La salle applaudit. Une certaine frustration demeure…la séquence était trop brève.

Politique, journalistes, historien

Le débat est animé par le philosophe François l’Yvonnet. Les invités sont prestigieux : Roland Dumas (avocat, écrivain, ministre des Affaires étrangères de 1984-1986 et 1988-1993), Nadia Benjelloun (écrivain, journaliste à la revue l’Esprit), Amnon Kapeliouk (journaliste israélien, collaborateur du Monde et du Monde diplomatique) et Elias Sanbar (écrivain et historien palestinien, directeur de la Revue d’études palestiniennes ).

' Cette soirée se veut être un pont entre deux cultures ', annonce François l’Yvonnet. Roland Dumas est le premier à prendre la parole. Son éloquence et sa rhétorique captivent le public. Il rappelle qu’il a connu Yasser Arafat durant sa fonction ministérielle et précise combien il regrette sa disparition. M. Dumas reviendra sur l’anecdote de la phrase désormais célèbre : ' c’est caduque '. Puis rendra hommage à l’homme de dialogue et à son envergure politique.

Nadia Benjelloun interviendra de manière plus poétique. De ses rencontres avec le raïs, entre 1988-1991, est né un livre d’entretiens. Le public eut droit à une lecture émouvante d’un de ses textes intitulé ' Le mont des oliviers '. Un clin d’œil complice à la ville de Jérusalem où elle avait donné rendez-vous à Yasser Arafat dans la dernière phrase de son livre. Madame Benjelloun terminera son intervention sous les vifs applaudissements de l’auditorium.

A. Kappeliouk est le journaliste israélien qui a le mieux connu Yasser Arafat. Parfaitement arabisant, leur collaboration s’étendra sur un quart de siècle. Il évoquera ses souvenirs en parlant de Yasser Arafat presque comme d’un membre de sa famille. ' Un jour, les israéliens regretteront Arafat ! ' conclut-il sous un tonnerre d’applaudissements.

Elias Sanbar offrira à l’assistance un des moments les plus plaisants de la soirée. Après avoir mis en valeur les dynamiques démocratiques construites par Yasser Arafat tout au long de sa vie, il rappela l’érudition et l’humour qui caractérisaient Abou Amar. Ce dernier, lors de ses conférences, aimait jouer à déformer des citations célèbres dans le but d’amuser son auditoire. C’est ainsi qu’il amalgama une citation de Ponce Pilat au profit d’Hérodote ou encore une citation de Machiavel prêtée à Karl Marx. L’évocation de ces anecdotes a occasionné des moments de fous rires dans une salle entièrement conquise.

Contre la diabolisation du personnage

Le caractère de Yasser Arafat qui fit l’unanimité des intervenants est sans nul doute sa qualité d’homme de paix et de dialogue. Ce soir-là, dans l’auditorium de l’IMA, nous étions aux antipodes du portrait de terroriste dressé par ses adversaires.

Comme elle avait commencée, la soirée s’est terminée sur une autre projection qui durera cinq petites minutes. Si l’atmosphère fut très consensuelle elle fut aussi d’une grande honnêteté intellectuelle. Chez Mehdi, 28 ans, l’enchantement était manifeste d’avoir participé à cette soirée. ' J’appréciais Arafat et je soutiens sa cause ' explique-t-il. Il aurait bien aimé avoir l’occasion de poser plus de questions. Pour Gaëlle, qui travaille sur place, ' Le sujet m’intéressait, je suis venue par curiosité. Je trouve que le premier film projeté n’a pas été assez introduit, mais les débats étaient bien menés '. La soirée du 20 janvier à l’IMA fut enrichissante sur le plan culturel et informatif. Mais somme toute, cette soirée fut bien trop courte.