Quand le programme 'pétrole contre nourriture' débute en décembre 1996, beaucoup de sociétés et de gouvernements étrangers voient là un premier pas vers un retour de l'Irak sur le marché pétrolier après une interruption depuis la guerre du Golfe en août 1990. Les exportations irakiennes, limitées par l'ONU, ont néanmoins reprises . Elles ont été multipliées par trois en valeur et en volume depuis 1996.
Un pétrole convoité
En décembre 1999, la fin de l'embargo imposé par les Nations unies, et par la même de l'existence d'un plafond pour les ventes de pétrole irakien, est envisagée. La résolution 1284du Conseil de sécurité du 17 décembre prévoit une suspension des sanctions pour une période de 120 jours renouvelable en échange d'une coopération avec une nouvelle commission de vérification et d'inspection des Nations unies (Unmovic).La Chine, la Russie et la France, estimant insuffisante la porté de la résolution qui prévoit une suspension et non une levé des sanctions, se sont abstenus. L'Irak l'a rejetée.
La reprise de l'activité pétrolière en Irak après la guerre du Golfe
La production
Sources : Arab Oil and Gas Directory, 2000, Arab Petroleum Research Center, 7 avenue d'Ingres, 75 016 Paris (Tel : 01 45 24 33 10), 2000 ; Middle East economic survey.
Année
Production moyenne. En milliers de barils par jour
Evolution par rapport à l’année précédente. En %
1989
2 785,8
+1,5
1990
2 110,0
-24,3
1991
285,8
-86,5
1992
526,2
+84,1
1993
659,5
+25,3
1994
748,7
+13,5
1995
736,9
- 1,6
1996
740,4
+ 0,5
1997
1 383,9
+ 86,9
1998
2 181,1
+ 57,6
1999
2 520
+ 15,5
La production a été fortement réduite en 1991, les infrastructures ayant été sérieusement endommagées par la guerre du Golfe. Depuis la mise en place du programme pétrole contre nourriture, les contrats de pièce de rechange accordées à Bagdad restent trop modestes par rapport aux besoins des infrastructures pétrolières .
En dépit de conditions d'exploitation difficiles, la production a été relancée et progresse de manière continue. La production de pétrole irakien était en juin 2000 de 3 millions de barils par jour, alors qu'elle s'élevait péniblement à 0,5 millions de barils/jour en 1996.
Mais selon le rapport du secrétaire général de l'ONU du 10 mars 2000, « l'état de l'industrie pétrolière irakienne, considéré comme lamentable dans son ensemble (...), ne s'est pas amélioré. » et l'Irak ne pourra maintenir sa production à long terme dans ces conditions. Suivant ces recommandations, le Conseil de sécurité a autorisé le 31 mars 2000, par la résolution 1293, l'Irak à importer 600 millions de dollars de matériel pour ses infrastructures pétrolières (contre 3OO précédemment) avec les recettes de chaque phase.
Les exportations
Les exportations de pétrole irakien, en quantité et en valeur, ont elles été multipliées par quatre entre la première phase et la septième phase (décembre 1996-juin 2000) du programme pétrole contre nourriture.
Avant 1990 : Les exportations de brut irakien ont atteint leur record de neuf années consécutives d'augmentation annuelle en 1989 avec 2,26 millions barils/jours.
Août 1990 : Mise en place de l'embargo par les Nations unies sur le pétrole brut irakien
20 mai 1996 : En vertu de L'application du programme pétrole contre nourriture (31/03/2000) signé entre l'Irak et les Nations unies et après une interruption de plus de six ans, l'Irak est autorisé à vendre une quantité limitée de pétrole par semestre, le volume précis de pétrole vendu variant selon les prix du baril.
Jusqu'en octobre 1999, le plafond était de 5,256 milliards de dollars pour une période de six mois. Mais le secrétaire général des Nations unies lui-même a souligné que la gravité de la situation était telle que même si le plafond des 5,2 milliards de dollars étaient atteints, cette somme « serait insuffisante pour répondre à tous les besoins humanitaires du peuple irakien ».
4 octobre 1999 : Le Conseil de sécurité des Nations unies adopte la résolution 1266 qui autorise l'Irak à exporter 3 milliards de dollars supplémentaires de pétrole jusqu'à la fin de la sixième phase, soit novembre 1999. L'Irak est donc autorisé pour cette période (juin-novembre 1999) à exporter au total plus de 8 milliards de dollars de pétrole.
L'Irak n'en a exporté que 7, 4 milliards de dollars, notamment du fait de l'état de ses infrastructures pétrolières et de l'arrêt de ses exportations durant trois semaines en protestation contre la résolution 1275 qui n'a reconduit le « programme pétrole contre nourriture » que pour une période 15 jours, les membres du Conseil de sécurité voulant profiter de cette période pour se mettre d'accord sur les modalités de suspension des sanctions imposées à Bagdad.
10 décembre : Par la résolution 1281 le Conseil de sécurité reconduit pour une période de six mois le programme pétrole contre nourriture limitant à 5, 26 milliards de dollars la vente de pétrole irakien par semestre pour acheter des produits de première nécessité. Bagdad reprend ses exportations de pétrole après une interruption de trois semaines.
17 décembre : La résolution 1284 du Conseil de sécurité de l'ONU, adoptée avec l'abstention de trois des cinq membres permanents (Russie, Chine et France), prévoit l'instauration d'un nouveau régime d'inspection de l'industrie d'armement en Irak, en échange de la supension des sanctions pour une période de 120 jours renouvelable. L'Irak a rejeté cette résolution . Ses exportations ne sont plus limitées par un plafond mais, selon un rapport du secrétaire général de l'ONU rendu public en mai 2000, l'état de ses infrastructures pétrolières ne permet à l'Irak que de se maintenir à son niveau actuel et non d'accroître sa capacité de production et d'exportation. Pour la phase VII (décembre 1999-mai 2000) les exportations en volume ont diminué mais la hausse du prix du baril de pétrole a permis à l'Irak d'augmenter ses gains.
8 juin 2000 : Par la résolution 1302 le Conseil de sécurité reconduit le programme pétrole contre nourriture pour une période de 6 mois.
Les destinations
En millions de barils pour la sixième phase du programme pétrole contre nourriture, en pourcentage du total des exportations irakiennes :
Europe
45 %
Etats-Unis
39 %
Extrême-orient
14 %
Brésil et Afrique du Sud
12 %
Il est intéressant de noter qu'avant août 1990 les États-Unis étaient le plus gros client de l'Irak, important en 1990 jusqu'à 32 % de la production irakienne soit 514 500 barils/jour.