Religions

Une fatwa de l’UOIF autorise les athlètes des JO à ne pas jeûner

Rédigé par Maria Magassa-Konaté | Jeudi 26 Juillet 2012 à 00:00

Entre 3 000 et 3 500 des 12 000 athlètes du monde entier qui vont participer aux jeux Olympiques de Londres sont musulmans. Quand certains ont décidé de jeûner durant la compétition, qui démarre vendredi 27 juillet, en plein mois du Ramadan, d’autres sportifs ne jeûneront pas se fiant à des avis religieux (fatwas) émis par les instances religieuses de leur pays. En France, la position du Dar al-fatwa de l’Union des organisations islamiques de France (UOIF) est la suivante : les sportifs se rendant aux JO de Londres peuvent être dispensés du jeûne car ils voyagent.



Il y a 6 ans, quand le Comité international olympique (CIO) avait fixé les dates des JO 2012 à Londres, la Commission islamique des droits de l’homme avait demandé à les décaler pour permettre aux musulmans de concourir hors période de jeûne et donc avec toutes leurs capacités physiques. En vain, le CIO n’avait pas cédé, prétextant que la compétition internationale était une manifestation laïque.

Résultat : les JO qui se tiendront du 27 juillet au 12 août coïncident avec le Ramadan qui a débuté le 20 juillet dans la plupart des pays (le 21 dans d’autres pays comme au Maroc).

Les athlètes de confession musulmane ne peuvent donc se fier qu’à leur conscience et aux fatwas émises par les différentes instances religieuses de leur pays. Pour les soulager, plusieurs d’entre elles ont autorisé leurs athlètes à ne pas jeûner durant la compétition.

En voyage

En France, les athlètes qui se rendent à Londres pour participer aux JO sont considérés comme des voyageurs. Dans ce sens, il leur est permis de ne pas jeûner durant leur voyage indique le Dar al-fatwa de l’UOIF. En effet, dans l’islam, le voyage, la maladie ou la grossesse sont des raisons valables pour ne pas effectuer le jeûne pendant le Ramadan.

C’est aussi ce qu’a décidé le mufti algérien El-Cheikh Mohamed Cherif Kahar, président de la Commission des fatwas auprès du Haut Conseil islamique. Dans une fatwa, il autorise les sportifs algériens à ne pas jeûner durant les JO.

Leurs voisins, les athlètes marocains, sont également autorisés à ne pas jeûner durant la compétition internationale. Abdel Bari El-Zouzoumi a émis une fatwa dans ce sens tout comme le Conseil supérieur marocain des oulémas. Le ministère des Affaires islamiques s’en est fait le porte-parole en rappelant que le conseil de théologiens avait « été saisi par les sportifs marocains, notamment la sélection de cyclisme ».

Aux Emirats arabes unis (EAU), même position. Les athlètes pourront manger et boire durant leur voyage, suite à l’avis religieux d’Ahmed Hadad, un mufti de Dubaï. Tous ces savants estiment que les sportifs qui concourent aux JO peuvent être considérés comme des voyageurs.

Rattrapage

A leur retour de voyage, ces sportifs de haut niveau devront rattraper les jours de jeûne qu’ils n’auront pas effectués. « Nos athlètes vont participer aux JO pour accroître le renom de notre pays, ils peuvent jeûner à leur retour en Malaisie », explique Harussani Zakaria, un mufti malaisien qui a autorisé les sportifs du pays à ne pas jeûner durant les JO.

C’est aussi la position du Conseil supérieur marocain des oulémas, qui invite les 72 sportifs marocains à rattraper leurs jours non respectés après la compétition.

S’ils se retrouvent dans l’incapacité de jeûner par la suite, ils pourront s’acquitter d’une compensation en nourrissant un pauvre par jour manqué.

Le sport : pas une excuse valable

Mais attention à ne pas généraliser cette règle. Si un athlète des JO est autorisé à manger durant le Ramadan, c’est parce qu’il voyage et non pas parce qu’il pratique un sport en pleine compétition, insiste Dar Al-fatwa de l’UOIF.

« Même si les JO sont un événement exceptionnel pour l’athlète, ce n’est pas une excuse valable pour ne pas jeûner », nous dit-on. Si les JO se passaient en France, les sportifs français n’auraient aucune raison de ne pas jeûner. Les athlètes britanniques musulmans ne sont donc pas autorisés à rater le jeûne du Ramadan en suivant cette règle, puisque les jeux Olympiques se déroulent chez eux. Par ailleurs, le sportif ne doit pas s'éterniser sur place auquel cas il n'est plus considéré comme un voyageur. Pourtant, beaucoup de sportifs mettent en avant la difficulté à suivre les entraînements et la compétition en jeûnant et se servent d’une telle fatwa pour ne pas suivre le Ramadan.

« Le Ramadan est l’un des piliers de l’islam », met en garde le Dar al-fatwa de l’UOIF. Un pilier, d’un point de vue religieux, incomparable avec un jeu sportif. Les frères Abdullah, deux footballeurs américains, ont privilégié la religion, en annulant leur participation aux JO et en se rendant à la place en pèlerinage à La Mecque, rapporte Le Figaro.

Effectivement, ce choix est avant tout personnel, estime l’instance de l’UOIF, qui rappelle que le Prophète Muhammad a dit : « Quiconque manque un jour du Ramadan sans une dérogation valable que Dieu agrée, il ne le rattraperait point par un jeûne continu jusqu’à son dernier jour, quand bien même il le ferait. »