La journée de la terre 30 mars 1976 - 30 mars 2006
Trente ans sont passés depuis cette journée importante de la lutte du peuple palestinien.
Le 30 mars 1976, les Palestiniens de l’intérieur, c’est-à-dire ceux qui sont restés dans leur pays après la fondation de l’Etat sioniste, organisent une grève générale en signe de protestation contre les expropriations de terres qui n'ont pas cessé depuis 1948. L'Etat sioniste, qui avait pour premier ministre Yitzhak Rabin, avait décidé la confiscation de 21.000 dunums en Galilée.
Sous la pression populaire, les mairies des villes et villages arabes de Galilée proclament la grève générale, pour le 30 mars.
L'armée et la police sionistes tirent sur les manifestants. 6 martyrs tombent, en Galilée et dans le Triangle. Une centaine de personnes furent blessées, et plus de trois cent Palestiniens furent arrêtés. Les régions de Galilée et du Triangle furent placées sous couvre-feu et déclarées zones militaires.
Le 30 mars 1976, une journée de révolte populaire, symbolique et capitale
Une révolte populaire :
Depuis 1948, les Palestiniens de l'Intérieur, qui étaient environ 150.000 Palestiniens, ont été placés sous régime militaire, dans le nouvel Etat créé, l'Etat sioniste d'Israël. De 1949 à 1966, Les Palestiniens ne pouvaient se déplacer hors de leurs villages ou régions, sans obtenir des autorisations du commandement régional de l'armée. C'est en instaurant le régime militaire que les autorités israéliennes sont parvenues à les exproprier de leurs terres et de leurs biens, en mettant en place une série de lois, les plus connues étant celles des "biens des absents présents", des terres non cultivées et des expropriations pour raisons militaires.
Un léger recul en arrière nous permet de mieux comprendre les conditions de vie de ces Palestiniens, restés dans leur pays. Dès 1947, juste après le vote inique de l'ONU créant un Etat juif sur la terre de la Palestine, les bandes armées sionistes soutenues par l'armée britannique, commencent à expulser les Palestiniens, en commettant plusieurs crimes dans les villages et les villes. Plus de 750.000 Palestiniens sont expulsés avant la fin de 1948, prenant le chemin de l'exil vers les régions voisines : Cisjordanie et bande de Gaza (le reste de la Palestine), Jordanie, Syrie et Liban.
C'est le début du nettoyage ethnique que les autorités israéliennes pratiquent jusqu'à aujourd'hui.
Les Palestiniens de l'Intérieur sont ceux qui ne furent pas expulsés vers les autres régions. Devenus minoritaires dans leur propre pays, ils furent soumis à la loi militaire et dépossédés de la majeure partie de leurs terres. En 1976, ils étaient devenus environ un demi-million de Palestiniens. Parmi eux, figurent les réfugiés intérieurs, ceux qui furent expulsés de leurs villes et villages tout en restant dans leur pays. Les lois promulguées par les autorités sionistes pour les déposséder de leurs terres furent appliquées par une main de fer : tout terrain non cultivé, à cause des entraves aux déplacements, fut confisqué et remis aux colons mais aussi les terres cultivées furent confisquées pour raisons militaires, puis remises aux colons. Toutes les terres appartenant au waqf musulman furent également confisquées.
La journée de la terre du 30 mars 1976 fut une réponse populaire à ces confiscations et ce vol légalisé des biens des Palestiniens. Ce fut la première révolte populaire depuis la Nakba, dans le territoire occupé en 1948.
Une révolte symbolique : la Journée de la terre est considérée par tous les Palestiniens comme une journée symbolique, parce que la terre est au coeur de l'entreprise coloniale qu'ils subissent depuis 1948. En effet, l'entreprise coloniale sioniste a eu et a toujours pour but de prendre la terre de la Palestine et expulser ses habitants, les Palestiniens. Ce qui s'est passé dans les territoires occupés en 1948 qui sont devenus l'Etat d'Israël, est en train de se passer dans les territoires occupés en 1967 de Cisjordanie et de la bande de Gaza : occupation militaire, colonisation de peuplement, confiscation des terres, entraves à la circulation, barrages, murs, etc... Le même phénomène se déroule actuellement en Cisjordanie, morcelée en plusieurs zones, comme le fut en 48 la terre de Palestine, morcelée en plusieurs régions : Galilée, Triangle et Naqab, des îlots de peuplement palestinien, encerclés et étouffés, pour favoriser leur départ.
Le désengagement de la bande de Gaza au cours de l'été 2005 ne doit pas leurrer : plusieurs facteurs ont favorisé ce désengagement, qui peut signifier la fin du rêve sioniste sur la bande de Gaza, mais pas sur le reste du pays. Le désengagement a mis fin aux colonies israéliennes qui y étaient implantées, mais n'a pas mis fin à l'encerclement et à la domination de cette partie du territoire palestinien par l'armée israélienne.
Une révolte capitale pour les Palestiniens : la Journée de la terre fut un moment important pour la réunification, dans la lutte, des trois composantes du peuple palestinien : La participation massive des Palestiniens de l'intérieur à la journée de la terre va précipiter leur émergence politique et leur permettre de rejoindre la lutte des autres composantes du peuple palestinien, celle de l'exil qui a pris les armes dès 1965 pour lutter contre Israël et celle qui vit dans les territoires occupés en 1967, en Cisjordanie et la bande de Gaza.
C'est cette date qui consacre la participation active des Palestiniens de l'intérieur à l'Organisation de Libération de la Palestine (OLP), seul représentant légitime du peuple palestinien, mais dont le rôle a été miné depuis les accords d'Oslo, en 1993, au détriment de l'Autorité palestinienne qui, elle, ne représente que les Palestiniens de la Cisjordanie et de la bande de Gaza. Les récentes élections législatives dans les territoires de l'Autorité palestinienne peuvent remettre en cause plusieurs de ces données.
Cependant, sur le terrain, les luttes communes et les rencontres se multiplient, des initiatives communes sont organisées, notamment sur le droit au retour des réfugiés, la commémoration de la Nakba, la lutte contre les expropriations, la solidarité envers les régions palestiniennes sinistrées. Récemment, une plateforme a rassemblé plus de 170 associations et formations politiques palestiniennes pour demander le boycott et l'isolement de l'Etat d'Israël. Ces associations et formations sont issues de l'exil, des territoires occupés en 1967 et des territoires occupés en 1948. C'est donc sur le terrain de la lutte pour la libération et le retour que l'unité du peuple palestinien se construit.