Politique

Vote des étrangers : une stratégie électorale du PS en œuvre?

La droite engage le bras de fer

Rédigé par | Mardi 29 Novembre 2011 à 09:12

Le débat sur le droit de vote et d'éligibilité des étrangers aux élections locales revient en force cette semaine. Selon un dernier sondage, 61 % des Français sont favorables à l’instauration de ce droit aux étrangers non-Européens. Une proposition de loi, qui rejoint une des positions soutenues par l’Appel pour une société multiculturelle, sera examinée le 8 décembre prochain au Sénat. La droite est bien décidée de son côté à bloquer le projet. Les étrangers constitueraient une mine électorale dans laquelle la gauche pourrait puiser à l’avenir dans les municipalités.



Le débat sur le droit de vote des étrangers n’est pas nouveau et n’a de cesse de diviser la classe politique depuis 30 ans. Cette fois, une majorité de Français souhaitent le changement. Selon le sondage BVA publié par Le Parisien - Aujourd’hui en France lundi 28 novembre, 61 % des Français se positionnent en faveur du droit de vote des étrangers extra-communautaires – non issus de l’Union européenne (UE) – pour les élections municipales.

Les résultats de ce sondage tombent à point nommé pour les défenseurs de ce droit. La proposition de loi, dans les cartons du Parti socialiste depuis 1981, va être soumise au vote le 8 décembre prochain au Sénat, longtemps dominé par la droite mais qui a basculé à gauche depuis fin septembre.

Les étrangers élus ne pourront pas devenir maires

Le droit de vote aux élections municipales et européennes est déjà accordé depuis plusieurs années aux citoyens européens en France. La loi, si adoptée, fera un nouveau pas en avant : elle permettra aux étrangers non-Européens résidant en France depuis plus de cinq ans en situation régulière de voter aux élections locales mais également d’être élu au poste de conseillers municipaux. En revanche, ils ne pourront pas devenir maires ou adjoints et ne pourront pas participer à l’élection du maire au conseil municipal.

Malgré ces restrictions, l’UMP ne veut pas voir une telle évolution s’opérer dans la vie politique. François Fillon s’est dit opposé « de toutes ses forces » au projet qui, selon lui et ses partisans, favorise le communautarisme. « Pour nous, le droit de vote ne se justifie pas par les impôts que l'on paye. C'est le résultat d'une volonté de partager un destin commun, c'est une volonté qui est scellée par l'acquisition de la nationalité française », a déclaré le Premier ministre samedi 26 novembre.

« Je suis contre les communautarismes, c'est pourquoi je suis contre le droit de vote à géométrie variable », a-t-il ajouté.

La droite craint le vote local des étrangers

Nicolas Sarkozy, qui avait été par le passé favorable à la proposition, la qualifié désormais de « hasardeuse ». Les élections présidentielles et législatives approchent à grand pas et le besoin de ne pas se mettre à dos l’aile dure de l’UMP, dont les idées tendent à se rapprocher du Front national, se fait sentir. Sur cette lignée, Claude Guéant, qui veut mettre un coup d’arrêt à l’immigration légale, a indiqué vouloir baisser le nombre d’entrées de 10 %, soit 20 000 personnes sur les 200 000 qu’accueille chaque année la France. Travailleurs et étudiants sont les premiers visés par les restrictions.

La droite, qui attise la peur des Français contre l’étranger, cache mal ses craintes. Si le projet de loi est adopté, les partis de gauche lors des élections municipales s’en trouveront renforcés. Et pour cause : les étrangers tendent à voter majoritairement pour la gauche.

Si la proposition reflète publiquement un engagement de la gauche depuis 30 ans, elle n’est aussi nullement dénuée d’intérêts pour le PS, qui prend au sérieux les préconisations du think tank Terra Nova sur la stratégie électorale que devraient adopter les socialistes pour 2012, centrée sur les jeunes, les diplômés, les femmes et les Français issus de la diversité et des quartiers populaires à défaut des ouvriers, qui basculent en temps de crise vers la droite et l’extrême droite. Une stratégie qui se met doucement en œuvre.

Un droit soutenu lors des Assises de la diversité

Stratégie électoraliste ou non, c’est surtout au nom de l’égalité que la plupart des Français se mobilisent en faveur du droit de vote.

C’est dans ce sens que les responsables des premières Assises nationales de la diversité culturelle à Paris, qui ont lancé l’Appel pour une société multiculturelle le 19 novembre dernier, ont appelé de leurs vœux l’instauration de ce droit, appliqué dans plusieurs pays de l’UE.

Si en France le débat reste toujours aussi sensible, il exacerbe bel et bien le clivage politique entre la droite et l’opposition à la veille des élections en 2012.



Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur