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Six Français de Guantanamo devant la justice

 Non
Mardi 4 Juillet 2006

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Non aux abus des droits de l'homme ..
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Non à la résistance terroriste ..
 guantanamo
Mercredi 5 Juillet 2006

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Guantanamo
Les auditions pipées des services secrets : à voir le docuement sur le site d eLibé
Fac-similé du télex «confidentiel diplomatique» donnant les détails des interrogatoires.
«Libération» prouve que les six islamistes jugés à Paris ont été interrogés illégalement à Guantanamo par des officiers français.
Par Patricia TOURANCHEAU
QUOTIDIEN : Mercredi 5 juillet 2006 - 06:00
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Un document exclusif que s'est procuré Libération atteste que les six prisonniers français des Américains à Guantanamo (Cuba) ont bel et bien été interrogés par les officiers français de la direction de la surveillance du territoire (DST) et de la direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), sur la base militaire, en janvier et en mars 2002. Or, les avocats de la défense de deux des six détenus, Nizar Sassi et Mourad Benchellali, issus de la banlieue lyonnaise, capturés en Afghanistan fin 2001, soutiennent depuis quatre ans que «des auditions clandestines ont été réalisées sur la base par des agents de renseignements français, hors de tout cadre légal, et ont nourri de façon illicite le dossier judiciaire». Mes William Bourdon et Jacques Debray avaient déposé une requête en nullité qui a été rejetée car ­ selon les juges ­ «la preuve n'était pas rapportée». La cour de cassation a abondé en ce sens le 18 janvier 2006. Impossible à l'époque de trouver trace de ces auditions fantômes. La pièce que nous publions change la donne en plein procès de ces six islamistes devant le tribunal de Paris.
Télex. Le télex «confidentiel diplomatie» envoyé de Washington le 1er avril 2002 au ministère des Affaires étrangères à Paris témoigne que les six Français ont non seulement été identifiés, mais également questionnés sur «leur parcours». Le document retrace en effet «la mission française à Guantanamo» conjointe «département DGSE-DST» du 26 au 31 mars 2002 au camp X-Ray : «Accueillie très cordialement, dès le début de ses travaux, par le général Dunlavey, commandant la Joint Task Force 170, elle a bénéficié d'un bon soutien logistique.» Il est précisé que «pendant la semaine écoulée, elle a rencontré: A. Pour compléments d'informations, nos deux compatriotes déjà vus lors de la première mission (26-29 janvier), Mourad Benchellali et Brahim Yadel. B. Pour identification et interrogatoire, Imad Achab Kanouni, Khaled Ben Mustapha, Redouane Khalid et Nizar Sassi.» Il est noté que «des informations recueillies à cette occasion, on retiendra les éléments suivants» – ­suit une foultitude de renseignements synthétisés sur une page. Leur situation scolaire, professionnelle et judiciaire : «Tous ne sont pas délinquants : seul Redouane Khalid a fait de la prison (quatre mois de préventive pour association de malfaiteurs) tandis que Nizar Sassi avouera des délits tels que vols de voitures et vente de stupéfiants», lit-on sur le télex diplomatique. Le terme «avouera» indique bien que Sassi se confie sans retenue à ces responsables français venus en sauveurs, après des semaines de séquestration dans les geôles américaines à Kandahar puis dans les cages du camp X-Ray.

Alias.Parti en Afghanistan sous un alias et muni d'un passeport falsifié, Mourad Benchellali a même révélé sa véritable identité aux agents français le 30 janvier 2002, comme il l'a expliqué hier au procès : «J'ai dit mon nom quand j'ai vu les agents de la DST. Avant, j'étais Jean-Baptiste Mihoub. Les Américains m'appelaient comme ça.» A son tour, Khaled Ben Mustapha a attaqué à l'audience la procureure qui se servait d'un procès-verbal de la DST du 10 septembre 2002. «Je suis ici parce qu'il y a tricherie, a protesté Ben Mustapha. A quatre reprises, à Guantanamo, nous avons été interrogés par des officiers de la DST qui se sont présentés comme des représentants du ministère des Affaires étrangères.» Lors d'un de ces entretiens «début 2002», Ben Mustapha leur a parlé «pour la première fois» de deux intermédiaires rencontrés à Londres, «Faouzi et el-Fassi». Or, ces deux noms se retrouvent dans le document brandi hier par la procureure, que la DST a fourni sept mois plus tard à la justice. «En 2002, où est-ce que je me trouvais ?, triomphe Ben Mustapha, à Guantanamo, pas à Paris.» La DST ne l'a donc pas entendu à ce sujet dans un cadre judiciaire, mais a repris les éléments tirés de ses interrogatoires officieux. Ennuyé, le président du tribunal correctionnel Jean-Claude Kross lui répète qu'en «l'état du dossier, il n'y a pas de preuve de l'existence certaine de ces interrogatoires» à Guantanamo.

«Preuve». Libération apporte aujourd'hui la pièce manquante. Et elle est de poids. Le télex de Washington traçant les grandes lignes de l'itinéraire des six Français va jusqu'à annoncer que «des fiches d'interrogatoire décrivant avec précision leur parcours seront remises aux différents services concernés dès le retour en France de la mission». Pour les avocats Bourdon et Debray, «ce télex diplomatique constitue la preuve» qu'ils cherchaient : «La DST a exploité des renseignements de manière illégale recueillis auprès de personnes retenues dans des conditions inhumaines, arbitraires et contraires au droit international. C'est très grave. On nous a menti, et toute l'enquête est affectée par cette déloyauté.» Les avocats ne sont pas sûrs de pouvoir arrêter le procès, mais comptent démontrer «l'irrégularité de la procédure».