Points de vue

« le CFCM n’a pas été entendu » Khalid Merroun

Rédigé par Entretien avec Khalid Merroun | Mardi 30 Décembre 2003 à 00:00

Khalid Merroun est recteur de la Grande Mosquée d’Evry. Il est membre du bureau national du CFCM. Présent lors de la réunion de crise du jeudi 18 décembre, Khalid Merroun s’exprime sur l’islam en France et sur la place du CFCM au sein du débat sur la laïcité.



 

Après le discours de Jacques Chirac, qu’en est il de l’islam en France ?

 

Il n’y a aucun problème à ce que l’islam s’intègre dans le cadre républicain dans notre pays. Le prophète de l’islam, qui est notre model , celui qui donne les directives du dogme musulman et de la pratique religieuse a dit :  « Vous êtes les experts de vos affaires de ce bas monde. » Voilà un hadith qui nous inscrit complètement et qui nous met à l’aise à l’adhésion du pacte républicain que nous avons signé avec l’ancien ministre de l’intérieur Jean Pierre Chevènement. Il est écrit dans le Coran, « Il n’y a point de contrainte en religion ». Mais je tiens à rajouter que cette islam est méconnu ! Dans son discours Jacques Chirac a mis sur le même plan la main de Fatima avec la croix, et l’étoile de David. Et bien nous avons écrit au président de la république, et nous avons dit que la main de Fatima, n’a rien à voir avec l’islam. Elle n’a pas à être comparé à la croix ou à l’étoile de David.

 

 

Et quel est le message que vous allez dire aux filles qui portent le foulard ?

 

En tant que recteur de la mosquée d’Evry que je suis, je n’ai pas d’ordre à donner à ces filles de porter ou de ne pas  porter le foulard. Je suis là pour les écouter, les soulager, pour leur apporter des solutions. Nous sommes une religion du savoir, d’Averroès, et de ceux qui ont inventé le zéro. Si elles sont contraintes de choisir entre le savoir et le foulard et bien dans la contrainte je suis navré de leur dire qu’il faille choisir le savoir. Mais je suis peiné qu’on arrive à leur donner qu’un seul choix. Mais je tiens aussi à souligner que notre souci aujourd’hui est de dire que nous ne voulons pas que la fille qui porte le foulard ou un fichu ou qui cache simplement ces cheveux soit l’ennemie de sa sœur qui n’a pas le foulard. Nous veillerons qu’il n’ait pas dérapage entre celles qui le portent et celles qui ne le portent pas.

 

 

Ne jugez vous pas cette loi discriminatrice envers la communauté musulmane ?

 

 Quant on arrive à faire une loi, c’est que le dialogue a levé séance. Au final quelle est la différence entre une fille qui porte le foulard, qui est polie, qui est correcte en classe et qui respecte son professeur , qui n’insulte pas son camarade de classe et celle qui est dévergondée, peu respectueuse et qui finalement s’inscrit plus à l’école de la rue qu’à l’école de la république ? Voilà où s’inscrit la discrimination. Je suis tout à fait d’accord avec l’association féministe qui se nomme ni p… ni soumise et je dis à la femme qui les soutient, que le CFCM est prêt à descendre dans les quartiers et à les soutenir. Voilà la largesse de l’ esprit de l’islam. Cependant nous disons que les femmes qui ne veulent pas porter le voile, qu’elles ne se prennes pas pour des muftis (ceux qui donnent la jurisprudence islamique ndr).  Et nous leur disons aussi qu’elles n’ont pas le monopôle de la liberté et qu’elles doivent être aussi tolérantes que la fille qui porte le voile. De même, la fille qui porte le voile n’a pas non plus le monopôle de la liberté. La liberté s’arrête là où commence celle des autres. 

 

Quelle a été la place du CFCM dans ce débat ?

 

Nous n’avons pas été auditionnés , entendus, écoutés par la commission Stasi, le CFCM n’a pas été entendu. Le Docteur Dalil Boubakeur a été entendu en tant que recteur de la mosquée de Paris et non en tant que président du CFCM. Mais nous avons appris avec satisfaction la promesses que nous allons être associés à l’élaboration de cette loi, ainsi qu’à l’observatoire de la laïcité. Nous allons être enfin écouté. Longtemps nous avons été traité de citoyen à part. Nous espérons qu’avec cette nouvelle lecture de la laïcité, nous allons être traité de citoyen à part entière.

                                                                                           

                                                                                                        Propos recueillis par Jihen Lazrak et Mom Nicolas