Elle bronzait en maillot de bain dans le parc Léo Lagrange à Reims, elle s'est fait tabassée. L’histoire ainsi résumée fait grand bruit plusieurs jours après les faits survenus le 22 juillet, depuis qu’un lien fallacieux de « cause à effet » ait été fait avec l’islam.
Tout a commencé avec un article du quotidien local L’Union qui a révélé l’histoire samedi 25 juillet : celle d’une jeune femme de 21 ans tabassée par un groupe de cinq jeunes, âgées de 16 à 24 ans et « originaires de différents quartiers de la ville », parce qu’elle portait le bikini. Une « tenue légère jugée indécente en pareil endroit » et « contraire à sa morale et sa conception des bonnes mœurs » pour l’une des filles du groupe à l’origine du « lynchage » en groupe. Dans un premier temps, L’Union, sans usage du conditionnel, a alors parlé d’un « discours aux relents de police religieuse ».
Tout a commencé avec un article du quotidien local L’Union qui a révélé l’histoire samedi 25 juillet : celle d’une jeune femme de 21 ans tabassée par un groupe de cinq jeunes, âgées de 16 à 24 ans et « originaires de différents quartiers de la ville », parce qu’elle portait le bikini. Une « tenue légère jugée indécente en pareil endroit » et « contraire à sa morale et sa conception des bonnes mœurs » pour l’une des filles du groupe à l’origine du « lynchage » en groupe. Dans un premier temps, L’Union, sans usage du conditionnel, a alors parlé d’un « discours aux relents de police religieuse ».
Un emballement médiatique et politique
Dès la diffusion de l'article, la reprise de l'information dans la presse généraliste a été immédiate et les réseaux sociaux se sont enflammés avec le hashtag #jeportemonmaillotauParcLeo. La fachosphère fait ses choux gras de l'histoire mais pas que. Entre commentaires pleins de sous-entendus ou explicites visant l'islam, les hommes politiques ont été nombreux à avoir réagi sans connaître le fond de l’affaire. « Les agresseuses de la femme en maillot de bain n'ont qu'à se baigner sur la plage saoudienne de Vallauris. Là-bas l'Etat les chouchoutera... », a tweeté le vice-président du Front national Florian Philippot. Stéphane Ravier, maire FN à Marseille, a écrit : « À #Reims, une femme rouée de coups pour "port de maillot de bain" : la charia en bas d'chez soi, c'est maintenant ! » tandis qu'Eric Ciotti, étiqueté Les Républicains, dans le même style que la députée LR Valérie Boyer, tweete : « Agression inacceptable par laquelle on veut nous imposer un mode de vie qui n'est pas le notre. Intransigeance ! »
« La liberté de la femme, la régression de la liberté de la femme... Un scandale en 2015 », lâche Nadine Morano, avec une photo de Brigitte Bardot en bikini, la même postée en août 2014 pour fustiger le port du voile.. « Pour une fois silence remarquable des habituels défenseurs de la “liberté vestimentaire” », indique Gilles Clavreul, délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, comme un tacle aux organisations de lutte contre l'islamophobie.
Réaction tout aussi précipitée, SOS Racisme a aussitôt organisé un rassemblement en maillot de bain au parc Léo Lagrande. Moins d'une dizaine de personnes ont répondu à l’appel de l’association dimanche 26 juillet. Mais celle-ci a contribué à grossir médiatiquement l'affaire en incitant les internautes à poster des photos d'elles en maillot « pour dire non à une morale de l'oppression liberticide », suggérant par là que le mobile religieux était à l'origine de l'agression.
« La liberté de la femme, la régression de la liberté de la femme... Un scandale en 2015 », lâche Nadine Morano, avec une photo de Brigitte Bardot en bikini, la même postée en août 2014 pour fustiger le port du voile.. « Pour une fois silence remarquable des habituels défenseurs de la “liberté vestimentaire” », indique Gilles Clavreul, délégué interministériel à la lutte contre le racisme et l’antisémitisme, comme un tacle aux organisations de lutte contre l'islamophobie.
Réaction tout aussi précipitée, SOS Racisme a aussitôt organisé un rassemblement en maillot de bain au parc Léo Lagrande. Moins d'une dizaine de personnes ont répondu à l’appel de l’association dimanche 26 juillet. Mais celle-ci a contribué à grossir médiatiquement l'affaire en incitant les internautes à poster des photos d'elles en maillot « pour dire non à une morale de l'oppression liberticide », suggérant par là que le mobile religieux était à l'origine de l'agression.
Comment un fait divers se transforme en affaire d’Etat
C’est pourtant une toute autre version de l’histoire qui se dessine. Le parquet de Reims a affirmé que « ni la victime ni les auteures des coups n’ont fait état, lors des auditions, d’un mobile religieux ou d’un mobile moral qui aurait déclenché l’altercation ».
L’une des membres du groupe témoigne sur BuzzFeed, après sa garde à vue et assure qu’il ne s’agissait pas d’un lynchage. « J’étais en effet avec trois amies et ma petite sœur mercredi vers 16h30, quand nous sommes allées au parc Léo Lagrange. Nous sommes passées devant trois filles en maillot de bain et j’ai juste dit à ma copine que si c’était moi, je n’oserais pas me mettre dans cette tenue. Mais j’ai dit ça car je suis complexée, absolument pas pour des questions religieuses ou morales. Je suis musulmane oui, mais tolérante », déclare celle qui est désormais convoquée en septembre devant la justice, avec ses camarades, pour « violences en réunion ».
« Lorsque l’une des trois filles m’a entendue parler, elle m’a interpellée pour me dire qu‘"avec mon physique, elle comprenait que je n’ose pas me mettre en maillot". Elle a également dit que j’étais grosse. Je suis allée vers elle pour lui donner une gifle, puis elle s’est battue avec mon amie. À partir de là, j’ai tout fait pour les séparer. Elles se sont battues seulement toutes les deux, avant que des témoins puis un policier en civil ne s’interposent », poursuit-elle. Si la victime a bien eu quatre jours d'incapacité totale de travail (ITT), son amie a également reçu un arrêt de travail de 10 jours.
Tout en réaffirmant son soutien à la victime, le maire (LR) Arnaud Robinet a déploré, dimanche 26 juillet dans un communiqué, les amalgames visant les musulmans. Il est « intolérable de stigmatiser une communauté ou une autre pour un acte commis par quelques uns et sans connaître le fond de cette affaire. J’en appelle à toutes les Rémoises et à tous les Rémois et leur demande de garder leur calme. Laissons la police et la justice faire leur travail ». Et laissons aussi l'islam tranquille, faire porter la toge du bouc émissaire est pénible pour les musulmans.
L’une des membres du groupe témoigne sur BuzzFeed, après sa garde à vue et assure qu’il ne s’agissait pas d’un lynchage. « J’étais en effet avec trois amies et ma petite sœur mercredi vers 16h30, quand nous sommes allées au parc Léo Lagrange. Nous sommes passées devant trois filles en maillot de bain et j’ai juste dit à ma copine que si c’était moi, je n’oserais pas me mettre dans cette tenue. Mais j’ai dit ça car je suis complexée, absolument pas pour des questions religieuses ou morales. Je suis musulmane oui, mais tolérante », déclare celle qui est désormais convoquée en septembre devant la justice, avec ses camarades, pour « violences en réunion ».
« Lorsque l’une des trois filles m’a entendue parler, elle m’a interpellée pour me dire qu‘"avec mon physique, elle comprenait que je n’ose pas me mettre en maillot". Elle a également dit que j’étais grosse. Je suis allée vers elle pour lui donner une gifle, puis elle s’est battue avec mon amie. À partir de là, j’ai tout fait pour les séparer. Elles se sont battues seulement toutes les deux, avant que des témoins puis un policier en civil ne s’interposent », poursuit-elle. Si la victime a bien eu quatre jours d'incapacité totale de travail (ITT), son amie a également reçu un arrêt de travail de 10 jours.
Tout en réaffirmant son soutien à la victime, le maire (LR) Arnaud Robinet a déploré, dimanche 26 juillet dans un communiqué, les amalgames visant les musulmans. Il est « intolérable de stigmatiser une communauté ou une autre pour un acte commis par quelques uns et sans connaître le fond de cette affaire. J’en appelle à toutes les Rémoises et à tous les Rémois et leur demande de garder leur calme. Laissons la police et la justice faire leur travail ». Et laissons aussi l'islam tranquille, faire porter la toge du bouc émissaire est pénible pour les musulmans.
Mise à jour lundi 27 juillet à 19h45 : SOS Racisme, qui a organisé en toute hâte un rassemblement en bikini à Reims, a nié une quelconque responsabilité dans l'emballement médiatique de l'affaire. Le comité rémois de l'association a affirmé, dans un communiqué paru sur sa page Facebook, avoir organisé la manifestation en déclarant avoir eu « la faiblesse d’accorder une certaine confiance à un média tel que L’Union ». « A chaque prise de parole, nous nous sommes indignés d’une violence envers une femme sur un motif qui nous semblait par ailleurs relever d’une atteinte à la liberté (de se vêtir, en l’occurrence) », a-t-il ajouté. Pourtant, aucune mobilisation aussi forte que celui lancée à Reims n'a été engagée de sa part par le passé lors de violentes agressions contre des femmes musulmanes en raison de leur tenue vestimentaire, quand bien même les faits étaient accrédités, constate-t-on.
De son côté, L'Union s'est expliqué après la parution de son article où le mobile religieux y a été évoqué comme étant à l'origine de la bagarre. « Se voir reprocher le port d’un maillot de bain pouvait s’interpréter comme une critique relevant de la morale. D’où cette phrase dans son sujet évoquant "un discours aux relents de police religieuse", c’est-à-dire "ressemblant à" a voulu écrire le journaliste. Une formulation maladroite assurément car perçue comme l’affirmation que l’affaire était la manifestation certaine d’un interdit religieux », se justifie-t-on. « Les extrapolations s’amplifient sans que nous ne puissions les moduler. »
Dans un édito, la rédactrice en chef évoque « un emballement symptomatique d’une société à cran ». « Ce que montre ce bikini gate, c’est la fragilité d’une France à fleur de peau, sur les nerfs, où chacun regarde l’autre avec méfiance », écrit-elle, alors même que le journaliste n'avait pas employé le conditionnel à l'évocation du mobile religieux, en l'absence de témoignages et de sources accréditant une telle thèse. Si un mea culpa est tout de même formulé du côté du journal local, il n'en est rien du côté de ceux, dans les médias, qui ont repris en chœur l'histoire sans précaution, et plus encore d'une certaine classe politique qui en a profité pour exprimer leur islamophobie primaire.
Mise à jour mercredi 29 juillet : La réaction de SOS Racisme à l'affaire.
Lire aussi :
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Nadine Morano exprime son mépris absolu des femmes voilées en France
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De son côté, L'Union s'est expliqué après la parution de son article où le mobile religieux y a été évoqué comme étant à l'origine de la bagarre. « Se voir reprocher le port d’un maillot de bain pouvait s’interpréter comme une critique relevant de la morale. D’où cette phrase dans son sujet évoquant "un discours aux relents de police religieuse", c’est-à-dire "ressemblant à" a voulu écrire le journaliste. Une formulation maladroite assurément car perçue comme l’affirmation que l’affaire était la manifestation certaine d’un interdit religieux », se justifie-t-on. « Les extrapolations s’amplifient sans que nous ne puissions les moduler. »
Dans un édito, la rédactrice en chef évoque « un emballement symptomatique d’une société à cran ». « Ce que montre ce bikini gate, c’est la fragilité d’une France à fleur de peau, sur les nerfs, où chacun regarde l’autre avec méfiance », écrit-elle, alors même que le journaliste n'avait pas employé le conditionnel à l'évocation du mobile religieux, en l'absence de témoignages et de sources accréditant une telle thèse. Si un mea culpa est tout de même formulé du côté du journal local, il n'en est rien du côté de ceux, dans les médias, qui ont repris en chœur l'histoire sans précaution, et plus encore d'une certaine classe politique qui en a profité pour exprimer leur islamophobie primaire.
Mise à jour mercredi 29 juillet : La réaction de SOS Racisme à l'affaire.
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