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Monsieur Bouziane a le droit d’être Salafiste

Rédigé par Bamba Amara | Mercredi 22 Juin 2005 à 00:00

           

Le tribunal correctionnel de Lyon a relaxé l’imam Bouziane, qui officiait à Vénissieux dans la banlieue lyonnaise. La décision de justice qui est intervenue hier mardi 21 juin est un désaveu du magistrat instructeur et du Parquet. Elle se fonde sur l’article 9 et 10 de la Cour européenne des droits de l’homme portant sur la liberté de religion et la liberté d’expression. Les deux associations féministes qui s’étaient portées partie civile ont ainsi été déboutées. Elles ont décidé de faire appel.



Le tribunal correctionnel de Lyon a relaxé l’imam Bouziane qui officiait à Vénissieux dans la banlieue lyonnaise. La décision de justice qui est intervenue hier mardi 21 juin est un désaveu du magistrat instructeur et du Parquet. Elle se fonde sur l’article 9 et 10 de la Cour européenne des droits de l’homme portant sur la liberté de religion et la liberté d’expression. Les deux associations féministes qui s’étaient portées partie civile ont ainsi été déboutées. Elles ont décidé de faire appel.

 

La double expulsion médiatisée

 

L’imam Abdelkader Bouziane fut d’abord expulsé de France le 21 avril 2004. Un coup médiatique du ministère de l’Intérieur sous la pression de la polémique soulevée par les propos de l’imam dans une revue lyonnaise. Une fois la polémique calmée, la décision fut suspendue par une décision de justice et l’imam a pu rentrer en France. Son come-back fut à son tour médiatisé et la polémique repartit de plus belle. S’en suit une nouvelle expulsion le 5 octobre 2004 après le vote d’une nouvelle loi qui ouvre « la chasse aux imams » car, dans leur majorité, les imams de France ne sont pas Français. A notre dernier contact avec l’imam Salafiste à qui SaphirNet.info souhaitait donner la parole, l’intéressé s’apprêtait à accomplir le pèlerinage à la Mecque. Père de seize enfants dont dix mineurs, M. Bouziane a été renvoyé en Algérie, son pays d’origine. Le 30 juin, le tribunal examinera la validité de l’arrêté d’expulsion.

 

Au mois d’avril 2004, l’imam Bouziane avait soutenu les thèses Salafistes en répondant aux questions d’un journaliste de Lyon-Mag. Il autorisait ainsi le mari à battre son épouse en cas d’infidélité conjugale. Au lendemain de la loi antifoulard, la diffusion de cette interview avait soulevé un tollé, tant dans les rangs des mouvements féministes que dans ceux des musulmans. Fadela Amara, du mouvement Ni pute ni soumise, habituée aux amalgames sur la question islamique et celle des banlieues, avait regretté les propos de l’imam qu’elle qualifie de « réalité amère de nos banlieues ». De nombreux responsables politiques s’étaient « alarmés » quand ils n’étaient pas « scandalisés » par des thèses que les musulmans connaissent et combattent depuis des siècles et que l’on retrouve dans de nombreux livres en vente libre en librairie. Tous se sont félicités de la décision d’expulser M. Bouziane. L’urgence semblait faire nécessité, la justice et le droit en ont fait les frais sous la pression des médias et des politiques. 

 

Les musulmans ne sont pas tous des Salafistes

 

Pour sa part, le Conseil régional du culte musulman de la région Rhône-Alpes avait diffusé un communiqué en date du 21 avril 2004, dans lequel il prenait ses distances par rapport aux propos de l’imam.  Car si tous les Salafistes sont musulmans, il est un peu naïf de penser que tous les musulmans sont des Salafistes. Mais surtout, il est innocent d’attribuer à un imam le rôle de directeur de conscience que l’on connaît dans d’autres religions. En prononçant la relaxe de l’imam Bouziane, le président du tribunal correctionnel de Lyon a tenu à préciser qu’« il n’appartient pas à un tribunal de faire une intrusion dans le domaine de la conscience religieuse.» Une sagesse à laquelle le monde politique gagnerait à se référer en prenant en compte la diversité des approches de la manière d’être musulman.

 

Le Salafisme est une lecture de l’islam née dans un contexte de perdition de la pratique religieuse. Les Salafistes ont tenté et réussi à stopper la débauche et à rétablir une certaine éthique à La Mecque, à une époque où la pratique de la religion musulmane était délaissée. Le rigorisme de cette lecture du Coran, profilé dans un contexte de réaction radicale, est aujourd’hui plus que caduc et inapproprié. Et, n’eût été la puissance et la générosité des pétrodollars, ce mouvement n’aurait certainement pas franchi les limites du royaume saoudien tant il n’a pu s’adapter à l’évolution du monde y compris aux progrès en cours dans la société qui l’a vu naître. En victimisant l’imam Bouziane parce qu’il est Salafiste, plutôt que de lui opposer les autres lectures du Coran, allant jusqu’à faire voter une loi permettant son expulsion, le législateur français offre un plateau au mouvement Salafiste. Avec un tel traitement du fait musulman, il n’est pas pessimiste de croire que le Salafisme a de beaux jours devant lui en France.

 






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