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Société

A Paris, une « Nuit du Ramadan » en catimini

Rédigé par Mérième Alaoui | Mercredi 8 Juillet 2015 à 20:00

           

La « Nuit du Ramadan » est un rendez-vous avant tout culturel organisé par la mairie de Paris depuis de nombreuses années. Chaque année, elle est l'objet de critique et de polémique et on n'y a pas échappé cet été. Saut que cette fois, l’absence totale de communication municipale intrigue. La mairie de Paris s'explique.



Chaque année, la mairie de Paris organise la « Nuit du Ramadan ». Une soirée devenue un rendez-vous culturel comme il peut en exister dans plusieurs villes de France. Les défenseurs de la laïcité peuvent se détendre : cette soirée n'a rien de religieuse. L'édition 2015, qui a eu lieu lundi 6 juillet, a réuni 450 convives dont le recteur de la Grande Mosquée de Paris Dalil Boubekeur, réunis autour d’Anne Hidalgo dans une soirée ambiancée par le groupe marocain Binobin (qui signifie littéralement « entre deux »)

Comme les années précédentes, les polémiques n’ont pas tardé a enfler de toutes parts, particulièrement du côté de la droite. Dans une tribune publiée au Figaro, Madeleine de Jessey, secrétaire nationale en charge des programmes de formation pour les Républicains, déclare ne pas comprendre pourquoi « les crèches (de Noël, ndlr) représentaient une telle atteinte à la laïcité en décembre dernier, et pourquoi la rupture du jeûne échappe aujourd'hui miraculeusement à ce régime » et dénonce une « laïcité à géométrie variable ».

Rappelons que la polémique autour de ces crèches n'avait pas été soulevé à la mairie de Paris. En réponse à cette tribune, une universitaire a fait « l'éloge » d'une laïcité à géométrie variable, « en formulant le souhait qu'elle garantisse à la religion chrétienne historiquement ancrée dans notre pays un statut privilégié, à raison de sa haute valeur culturelle ».
A Paris, une « Nuit du Ramadan » en catimini

Black-out autour de l'événement

Du côté de Twitter, c'est la fachosphère - portée notamment par Wallerand de Saint-Just, critique annuelle de la « très communautariste » soirée au nom du Front national - qui a pris le relai. Serait-ce pour éviter toute polémique que la Ville de Paris a fait l’impasse totale sur la communication de cet événement ? Pas du tout, nous répond la municipalité mercredi 8 juillet, qui confirme tout de même le manque évident de promotion de l'événement. Il était cependant voulu et ce, pour trois raisons, nous explique-t-on. « Cette année, nous n’avons invité que 450 personnes alors qu’il y en avait 1 000 l’année dernière. On ne voulait pas créer d’appel d’air et surtout susciter des déceptions. Nous avons privilégié la communication ciblée à l’attention des associations », déclare le chargé de communication de la mairie.

La presse n'y était pas conviée. En période Vigipirate renforcé, il s’agissait aussi de ne pas communiquer sur un événement qui rassemble autant de monde. « D’autant que pour des raisons de sécurité, nous ne pouvions pas accepter davantage de personnes que le chiffre de 450 de façon stricte », assure-t-on.

Enfin, le choix de diviser le nombre de convives s’explique également par des « raisons d’économies budgétaires ». « Tous les services sont concernées », indique la mairie. S’il n’y a pas eu d’annonce de la soirée en amont, il ne faut pas non plus s'attendre à un compte-rendu, à un article municipal et encore moins à de photographies de la soirée : « ce n’est qu’une soirée parmi tant d’autres pour la Ville, il n’y a pas de raisons de faire un d'effort de communication particulier. » Même après l'événement, alors que le service communication de la mairie de Paris est particulièrement actif sur les réseaux sociaux, de même qu'Anne Hidalgo, pour relayer des déclarations et activités de grande et petite importance. En somme, circulez, il n'y a rien à voir.

« Ce sont des fêtes qui font partie de notre patrimoine culturel »

Pour la maire, invitée de BFMTV mercredi face à Jean-Jacques Bourdin, « cette polémique ne m’intéresse pas , il y a des gens qui cherchent à stigmatiser une partie de la population parce qu'elle serait coupable d’être musulmane ». Et de rassurer l'opinion en précisant qu’elle est une « laïque convaincue » et que la « Nuit du Ramadan » est célébrée à l’Hôtel de ville « comme les fêtes de Hanoukka ou les fêtes de Noel (…) cela ne me gène pas car ce sont des fêtes qui font partie de notre patrimoine culturel ».

L’actuelle maire de Paris suit ainsi les traces de son prédécesseur, Bertrand Delanoë qui a lancé ces soirées. En 2011, il se justifiait déjà dans les colonnes de Marianne : « La Ville organise une telle soirée chaque année depuis 2001, à l’Hôtel de Ville ou en d’autres lieux. Ce moment de rassemblement s’inscrit dans une logique conviviale et culturelle, et n’a strictement aucun caractère religieux, à l’instar d’autres manifestations que la Ville accueille ou organise, comme Hanoukka, Vesak (fête bouddhiste, ndlr), la Saint Maroun (pour les chrétiens maronites, ndlr), le Nouvel an chinois, le Nouvel an berbère ou l’arbre de Noël, sans n’avoir jamais suscité la moindre réaction. »

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