Les 27 sénateurs de la mission commune d’information sur la filière viande en France ont rendu publiques leurs conclusions. Parmi les 40 propositions du rapport, la 39e préoccupe particulièrement les cultes musulman et juif : « instaurer un étiquetage obligatoire du mode d’abattage, selon des modalités non stigmatisantes » pour l’ensemble des viandes brutes et transformées.
La mission a été constituée à la demande du groupe UDI-UC du Sénat après le scandale de la viande de cheval, qui a éclaté en février 2013. Bien qu’elle n’ait eu « aucune conséquence connue en termes de santé publique », « la tromperie et les pratiques de l’industrie agroalimentaire révélées à cette occasion ont profondément choqué les consommateurs », indique le rapport adopté le 17 juillet. Cette affaire n’a pas épargné le secteur du halal.
La mission a été constituée à la demande du groupe UDI-UC du Sénat après le scandale de la viande de cheval, qui a éclaté en février 2013. Bien qu’elle n’ait eu « aucune conséquence connue en termes de santé publique », « la tromperie et les pratiques de l’industrie agroalimentaire révélées à cette occasion ont profondément choqué les consommateurs », indique le rapport adopté le 17 juillet. Cette affaire n’a pas épargné le secteur du halal.
Un étiquetage « non discriminatoire »
La mission a des objectifs clairs : « dresser un état des lieux de la filière viande, relancer le secteur, restaurer la confiance des consommateurs », nous indique sa rapporteure Sylvie Goy-Chavent. C’est sur ce dernier point que s’inscrit la proposition 39, votée « à l’unanimité » par les sénateurs.
« Nous insistons sur le caractère non stigmatisant de l’étiquetage. C’est une question de transparence et d’information pour tous les consommateurs » qui peuvent « acheter sans le savoir des viandes abattues rituellement mais déclassés » des filières halal et casher, explique la sénatrice (UDI) de l’Ain.
Les modalités de l’étiquetage n’ont pas encore été décidées mais « un système de codes pour indiquer les différents types d'étourdissement et les cas dans lesquels il n'y a pas d'étourdissement » est envisagé.
« Nous insistons sur le caractère non stigmatisant de l’étiquetage. C’est une question de transparence et d’information pour tous les consommateurs » qui peuvent « acheter sans le savoir des viandes abattues rituellement mais déclassés » des filières halal et casher, explique la sénatrice (UDI) de l’Ain.
Les modalités de l’étiquetage n’ont pas encore été décidées mais « un système de codes pour indiquer les différents types d'étourdissement et les cas dans lesquels il n'y a pas d'étourdissement » est envisagé.
Le bien-être animal pour stigmatiser l’abattage religieux
Les cultes ne sont pas contre la transparence : ils la réclament tout autant. Toutefois, la stigmatisation de l’abattage rituel est sur un tout autre plan. La proposition a été discutée dans le cadre d’un débat sur le bien-être animal qui, bien que légitime, finit par conclure que l’abattage rituel est source de souffrances plus grandes pour les animaux. Il est même décrit dans le rapport comme « une exception aux règles du bien-être animal à l'abattoir », ce qui dérange profondément les représentants religieux.
Par ailleurs, les risques sanitaires liés à l'abattage rituel ont aussi été discutés. Aucun élément ne conclut pour l'heure à un risque plus accru mais l’étiquetage permettrait d'avoir « des statistiques fiables à ce sujet » à travers l'analyse des viandes, selon la mission. Se dirigerait-on ainsi vers une interdiction de l’abattage sans étourdissement préalable ?
Par ailleurs, les risques sanitaires liés à l'abattage rituel ont aussi été discutés. Aucun élément ne conclut pour l'heure à un risque plus accru mais l’étiquetage permettrait d'avoir « des statistiques fiables à ce sujet » à travers l'analyse des viandes, selon la mission. Se dirigerait-on ainsi vers une interdiction de l’abattage sans étourdissement préalable ?
Sylvie Goy-Chavent
La rapporteure, une opposante à l’abattage rituel
Cette inquiétude est aussi alimentée en raison des convictions profondes de Sylvie Goy-Chavent*. Elle a déposé, en novembre 2012, une proposition de loi visant à rendre obligatoire l'étourdissement des animaux avant tout abattage au nom du bien-être animal. En collaboration avec la Fondation Brigitte Bardot, elle avait pris une pleine page de pub dans Le Parisien dans pour promouvoir son texte malgré l'atteinte à la liberté de culte manifeste.
« Il ne faut pas mélanger » les travaux de la mission, « collectifs » et « mes convictions personnelles », nous répond-t-elle devant ce constat. « Je ne suis pas contre l’abattage rituel mais pour l’étourdissement systématique », dit-elle. Devant cette contradiction que nous relevons, elle répond que les communautés musulmane et juive des pays européens qui aujourd’hui interdisent la pratique ont bien réussi « à s’adapter » et que des représentants du culte musulman en France ne sont pas « farouchement opposés » à l’étourdissement.
Des propos inquiétants pour les cultes. Mais à ce stade, la mission « n’est pas favorable à une interdiction de l’abattage sans étourdissement, qui doit rester une dérogation ». L’instauration de l’étiquetage obligatoire du mode d’abattage est la seule proposition sur la table… pour le moment.
« Il ne faut pas mélanger » les travaux de la mission, « collectifs » et « mes convictions personnelles », nous répond-t-elle devant ce constat. « Je ne suis pas contre l’abattage rituel mais pour l’étourdissement systématique », dit-elle. Devant cette contradiction que nous relevons, elle répond que les communautés musulmane et juive des pays européens qui aujourd’hui interdisent la pratique ont bien réussi « à s’adapter » et que des représentants du culte musulman en France ne sont pas « farouchement opposés » à l’étourdissement.
Des propos inquiétants pour les cultes. Mais à ce stade, la mission « n’est pas favorable à une interdiction de l’abattage sans étourdissement, qui doit rester une dérogation ». L’instauration de l’étiquetage obligatoire du mode d’abattage est la seule proposition sur la table… pour le moment.
Des musulmans moins réticents à l’étiquetage...
Les responsables juifs ont été plus prompts à la dénoncer que les musulmans, traversés par des débats récurrents sur la licéité de l’étourdissement préalable avant l’abattage que pratiquent aujourd’hui notamment les Grandes Mosquées de Paris, de Lyon et d’Evry. Tous trois ont été auditionnés le 23 mai avec Mohammed Moussaoui, désormais ex-président du Conseil français du culte musulman (CFCM) qui avait, lui, martelé son opposition à l’étourdissement.
Ceux pour qui l’étourdissement rend illicite (haram) la consommation des produits carnés voient alors l’étiquetage comme un moyen de lutter contre le « faux halal ». Sylvie Goy-Chavent l’a bien compris et a repris cet argument à son compte pour promouvoir la proposition qu’elle soutient naturellement pour avoir été à l’initiative, en janvier 2013, d’un texte de loi similaire.
... mais inquiets
« Des musulmans peuvent être séduits par cette proposition qui leur permettrait d’éviter les viandes étiquetées "halal", alors qu’elles sont issues d’un abatage avec étourdissement. Cependant, il suffit de lire attentivement le rapport de la commission pour s’apercevoir que les objectifs de ceux qui demandent l’étiquetage sont ailleurs », réagit M. Moussaoui, en réaction à la publication du rapport.
« Ce n'est pas la volonté d'informer utilement le consommateur qui est à l'origine de la demande de l'étiquetage. C'est la volonté de mettre fin au statut dérogatoire de l'abattage rituel, en imposant l'étourdissement préalable à la mise à mort des animaux. La multiplication des contraintes imposées à l'abattage rituel vise à décourager les professionnels d'en faire ou d'accepter à le faire avec étourdissement », juge-t-il. Les cultes veillent, le rapport sera rediscuté à la rentrée au Sénat.
Ceux pour qui l’étourdissement rend illicite (haram) la consommation des produits carnés voient alors l’étiquetage comme un moyen de lutter contre le « faux halal ». Sylvie Goy-Chavent l’a bien compris et a repris cet argument à son compte pour promouvoir la proposition qu’elle soutient naturellement pour avoir été à l’initiative, en janvier 2013, d’un texte de loi similaire.
... mais inquiets
« Des musulmans peuvent être séduits par cette proposition qui leur permettrait d’éviter les viandes étiquetées "halal", alors qu’elles sont issues d’un abatage avec étourdissement. Cependant, il suffit de lire attentivement le rapport de la commission pour s’apercevoir que les objectifs de ceux qui demandent l’étiquetage sont ailleurs », réagit M. Moussaoui, en réaction à la publication du rapport.
« Ce n'est pas la volonté d'informer utilement le consommateur qui est à l'origine de la demande de l'étiquetage. C'est la volonté de mettre fin au statut dérogatoire de l'abattage rituel, en imposant l'étourdissement préalable à la mise à mort des animaux. La multiplication des contraintes imposées à l'abattage rituel vise à décourager les professionnels d'en faire ou d'accepter à le faire avec étourdissement », juge-t-il. Les cultes veillent, le rapport sera rediscuté à la rentrée au Sénat.
* Sylvie Goy-Chavent a fait savoir, après la publication du rapport de la mission, avoir porté plainte auprès du procureur de la République de Bourg-en-Bresse pour avoir été insultée et menacée de mort sur la Toile par des groupes juifs qui l’ont accusé d'« antisémitisme ». Le journal israélien JSSNews est notamment poursuivi pour la publication, le 13 juillet, d’un article titré « Abattage rituel : interdit en Pologne, une sénatrice antisémite (?) tente de l'interdire en France » et de ses commentaires. « Je suis choquée par de telles réactions », qui contraste avec celles « très courtoises du culte musulman ».
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