Farid Abdelkrim est l'auteur de « Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste », paru en février 2015, dans lequel il raconte ses années passées à l'Union des organisations islamiques de France (UOIF).
Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste raconte le cheminement d'un jeune de France devenu islamiste en se pensant musulman. Un « jeune de la seconde génération » dans un quartier de Nantes avec sa bande de potes, Cyril, Thierry, Olivier, Christophe... Avec sa quête face au vide laissé par le décès du père. Avec Scareface, Malcolm X, Elvis Presley… pour références. Avec le sempiternel « eux et nous » qu'il ne comprend pas puisqu'il ignore qu'il est Arabe, qu'il ne réalise pas qu'il est Algérien... Trop agité pour l'école, il décroche et devient un petit voyou à la petite semaine.
Quand il entre dans l'adolescence, ses repères sont ceux que la rue lui a donnés. Sur cette pente ordinaire qui conduit certains en prison et d'autres au cimetière, Farid Abdelkrim doit son salut à sa mère. Une authentique maman du bled, aimante et attentionnée mais surtout suffisamment ancrée dans ses valeurs pour freiner la dérive de son fils turbulent.
Quand il entre dans l'adolescence, ses repères sont ceux que la rue lui a donnés. Sur cette pente ordinaire qui conduit certains en prison et d'autres au cimetière, Farid Abdelkrim doit son salut à sa mère. Une authentique maman du bled, aimante et attentionnée mais surtout suffisamment ancrée dans ses valeurs pour freiner la dérive de son fils turbulent.
L'UOIF des Frères musulmans
Quand il rencontre l'islam, Farid Abdelkrim n'a pas de maître spirituel. Deux étudiants, deux belles rencontres, lui mettent le pied à l'étrier. Une situation banale en France. C'est donc par accident qu'il prête allégeance à l'imam local de l'UOIF, un membre des Frères. Mais du mouvement lui-même, Farid Abdelkrim n'en savait rien. Par sens du devoir, il s'engouffre dans la ligne des Frères musulmans qui veulent ramener les jeunes générations à l'islam. Ainsi naquit, au cœur de la jeunesse musulmane de France, le duo Farid Abdelkrim - Hassan Iquioussen qui a fait les beaux jours de Jeunesse musulmane de France (JMF) dans les années 1990. Cela vaut pour la façade.
En interne, on est loin d'imaginer ce que Farid Abdelkrim révèle dans son livre. D'un côté, l'UOIF se défend d'être une cellule des Frères musulmans en France. C'est pourquoi elle a changé sa dénomination « islam en France » pour « islam de France ». De l'autre côté, le livre décrit des dignitaires de l'UOIF incapables d'épouser la réalité française dont Farid est l'unique représentant au Conseil d'administration. Entre leurs mains, l'arabe, la langue du Coran, est un tel enjeu de pouvoir que, pour faire bonne figure, Farid Abdelkrim s'y met assidûment. Il a beau fini par parler l'arabe, il n'en deviendra pas un Frère authentique à leurs yeux car trop Français, raconte-t-il. La France, sa culture, sa liberté d'opinion et d'expression comme son sens de la responsabilité lui collent à la peau.
De frustrations en frustrations, Farid Abdelkrim quitte le devant de la scène de l'UOIF. Quand il réapparaît en 2005, Saphirnews l'accueille pour parler de « La France des islams, ils sont fous ces musulmans », une collection de scènes aux allures de pamphlets sur les islamistes. Avec le recul, ce livret apparaît comme une soupape de sécurité dont l'islamiste Abdelkrim a eu besoin pour continuer à supporter ses pairs. Déjà, à l'époque, ce livret présageait un autre Abdelkrim, le vrai, celui qui s'ouvre enfin à nous dans Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste.
En interne, on est loin d'imaginer ce que Farid Abdelkrim révèle dans son livre. D'un côté, l'UOIF se défend d'être une cellule des Frères musulmans en France. C'est pourquoi elle a changé sa dénomination « islam en France » pour « islam de France ». De l'autre côté, le livre décrit des dignitaires de l'UOIF incapables d'épouser la réalité française dont Farid est l'unique représentant au Conseil d'administration. Entre leurs mains, l'arabe, la langue du Coran, est un tel enjeu de pouvoir que, pour faire bonne figure, Farid Abdelkrim s'y met assidûment. Il a beau fini par parler l'arabe, il n'en deviendra pas un Frère authentique à leurs yeux car trop Français, raconte-t-il. La France, sa culture, sa liberté d'opinion et d'expression comme son sens de la responsabilité lui collent à la peau.
De frustrations en frustrations, Farid Abdelkrim quitte le devant de la scène de l'UOIF. Quand il réapparaît en 2005, Saphirnews l'accueille pour parler de « La France des islams, ils sont fous ces musulmans », une collection de scènes aux allures de pamphlets sur les islamistes. Avec le recul, ce livret apparaît comme une soupape de sécurité dont l'islamiste Abdelkrim a eu besoin pour continuer à supporter ses pairs. Déjà, à l'époque, ce livret présageait un autre Abdelkrim, le vrai, celui qui s'ouvre enfin à nous dans Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste.
Un livre intéressant et important
L'an dernier, nos sources ont annoncé le livre chez un éditeur musulman. Un choix conforme à la tradition communautariste des Frères. Le livre paraît ce mois de février, mais aux éditions Les points sur les i. Ce détail en dit long sur le chemin parcouru par l'auteur, qui offre ainsi ses confessions à un large public sans connotation religieuse. Car, pour musulman qu'il soit, pour arabisant qu'il soit, Farid Abdelkrim se positionne contre un « islam en France ». C'est le projet d'un « islam de France » qu'il porte courageusement dans ce livre comme sur scène, dans ses spectacles, depuis qu'il a tombé l'habit de l'islamiste pour celui de l'humoriste.
« L'islam n'a pas de couleur, il prend la couleur du vase qui le contient », disait Amadou Hampaté Bâ, une voix musulmane d'Afrique. Dans « Aux cinq couleurs de l'islam » (Ed. Maisonneuve et Larose, 1995), un recueil d'articles de recherche, l'orientaliste Vincent Monteil donne une illustration scientifique de la variété des manières d'être musulman sur les cinq continents. Depuis deux décennies, la nécessité d'un islam répondant aux besoins spirituels des fidèles dans le respect de leurs réalités françaises est martelée par Tareq Oubrou, recteur de la mosquée de Bordeaux. Il n'est pas étonnant que celui-ci soit devenu le référent spirituel d'un grand nombre de musulmans de France, dont Farid Abdelkrim.
C'est pourquoi le livre de Farid Abdelkrim est non seulement intéressant mais il est important, car il brise le silence sur l'incurie des dirigeants associatifs musulmans de France, incapables de donner ni une image claire, ni une dignité légitime à leur religion dans l'espace public français. L'auteur expose les mécanismes qui musellent les voix au sein de l'UOIF. Sans s'y attarder, il explique que, malgré leurs diplômes universitaires, leurs paroles intelligentes, les dirigeants de l'UOIF sont loin de pouvoir incarner les espoirs de renouveau que l'on est tenté de placer en eux.
Lui, Farid Abdelkrim, a pris la parole. D'aucuns l'accuseront de traîtrise. Mais il a du caractère et il assume, car il n'invente rien. Il raconte ce qu'il a vécu et dénonce ceux qui, du haut de leurs convictions, lui ont brisé la sienne : donner sa nationalité française à sa religion. Combien d'autres islamistes en herbe, comme lui l'était, refusent de se poser la question que Farid Abdelkrim pose aux leaders musulmans de France : « Et si on s'était trompé ? »
« L'islam n'a pas de couleur, il prend la couleur du vase qui le contient », disait Amadou Hampaté Bâ, une voix musulmane d'Afrique. Dans « Aux cinq couleurs de l'islam » (Ed. Maisonneuve et Larose, 1995), un recueil d'articles de recherche, l'orientaliste Vincent Monteil donne une illustration scientifique de la variété des manières d'être musulman sur les cinq continents. Depuis deux décennies, la nécessité d'un islam répondant aux besoins spirituels des fidèles dans le respect de leurs réalités françaises est martelée par Tareq Oubrou, recteur de la mosquée de Bordeaux. Il n'est pas étonnant que celui-ci soit devenu le référent spirituel d'un grand nombre de musulmans de France, dont Farid Abdelkrim.
C'est pourquoi le livre de Farid Abdelkrim est non seulement intéressant mais il est important, car il brise le silence sur l'incurie des dirigeants associatifs musulmans de France, incapables de donner ni une image claire, ni une dignité légitime à leur religion dans l'espace public français. L'auteur expose les mécanismes qui musellent les voix au sein de l'UOIF. Sans s'y attarder, il explique que, malgré leurs diplômes universitaires, leurs paroles intelligentes, les dirigeants de l'UOIF sont loin de pouvoir incarner les espoirs de renouveau que l'on est tenté de placer en eux.
Lui, Farid Abdelkrim, a pris la parole. D'aucuns l'accuseront de traîtrise. Mais il a du caractère et il assume, car il n'invente rien. Il raconte ce qu'il a vécu et dénonce ceux qui, du haut de leurs convictions, lui ont brisé la sienne : donner sa nationalité française à sa religion. Combien d'autres islamistes en herbe, comme lui l'était, refusent de se poser la question que Farid Abdelkrim pose aux leaders musulmans de France : « Et si on s'était trompé ? »
La schizophrénie islamiste
Dans les faits, la jeunesse musulmane de France est redevable des imams des organisations comme l'UOIF. Car, s'il massacre la langue de Molière, l'imam maîtrise la langue du Coran et des textes fondateurs de l'islam. S'il ignore l'Histoire de France et les ressorts de la société française, l'imam connaît les versets et hadiths qui apaisent le cœur. Il en résulte, sur le sujet islam, une schizophrénie qui peut être redoutable autant pour le vivre-ensemble que pour l'épanouissement personnel.
Cette maladie de jeunes, que salafistes et tablighis dramatisent à souhait, ne conduit pas forcément au « jihadisme » mais elle pousse à l'islamisme. C'est lui que Farid Abdelkrim épingle dans son précédent livre. Dans Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste, il nous décrit sa propre guérison en exposant son itinéraire à l'UOIF. Sans fausse humilité, il affiche le courage qu'il lui a fallu pour briser ses liens, questionner ses idées reçues pour en arriver à assumer sa vocation, son talent et vivre enfin la personnalité qui est la sienne : un citoyen français de confession musulmane... Un épanouissement personnel au bout d'un beau cheminement, dont la solitude, la richesse et aussi la rudesse inspirent désormais ses spectacles.
Un islamiste qui se fait humoriste ! En soit, c'est déjà assez drôle. Et si le public s'amuse, il rit parfois jaune. Car au détour d'une scène de son spectacle, comme au détour d'une page de son livre, Farid Abdelkrim nous porte de surprise en courage en secouant les minarets. Et, au moment où le monde politique parle de réformer le Conseil français du culte musulman qu'il a planté dans le dos du citoyen musulman, il faut reconnaître que l'islam de France avait besoin d'une figure reconnue comme Farid Abdelkrim pour donner un bon coup de pied dans le poulailler.
Cette maladie de jeunes, que salafistes et tablighis dramatisent à souhait, ne conduit pas forcément au « jihadisme » mais elle pousse à l'islamisme. C'est lui que Farid Abdelkrim épingle dans son précédent livre. Dans Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste, il nous décrit sa propre guérison en exposant son itinéraire à l'UOIF. Sans fausse humilité, il affiche le courage qu'il lui a fallu pour briser ses liens, questionner ses idées reçues pour en arriver à assumer sa vocation, son talent et vivre enfin la personnalité qui est la sienne : un citoyen français de confession musulmane... Un épanouissement personnel au bout d'un beau cheminement, dont la solitude, la richesse et aussi la rudesse inspirent désormais ses spectacles.
Un islamiste qui se fait humoriste ! En soit, c'est déjà assez drôle. Et si le public s'amuse, il rit parfois jaune. Car au détour d'une scène de son spectacle, comme au détour d'une page de son livre, Farid Abdelkrim nous porte de surprise en courage en secouant les minarets. Et, au moment où le monde politique parle de réformer le Conseil français du culte musulman qu'il a planté dans le dos du citoyen musulman, il faut reconnaître que l'islam de France avait besoin d'une figure reconnue comme Farid Abdelkrim pour donner un bon coup de pied dans le poulailler.
Farid Abdelkrim, Pourquoi j'ai cessé d'être islamiste, Itinéraire au cœur de l'islam en France, Les points sur les i, février 2015, 250 p., 18,90 €.
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