A la surprise générale , Luc Ferry s'est rendu hier au 84e congrès de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP) alors qu'il avait initialement annulé sa visite. A moins d'une quinzaine de jours des épreuves écrites du baccalauréat, cette visite avait surtout pour objet de rassurer les parents d'élèves quant au déroulement de ces épreuves. Pour ce faire il n'a pas exclu le recours aux forces de l'ordre, notamment à La Réunion où il a qualifié la situation de ' presque insurrectionnelle '. Une fermeté qui laisse entrevoir une tentative de rallier les parents d'élèves à sa cause.
Pour assurer le déroulement des examens, fermeté de rigeur
Ces derniers jours, on ne compte plus les universités qui ont dû reporter leurs examens, soit par manque de surveillants et de professeurs pour assurer un déroulement normal, soit du fait de professeurs ou d'étudiants bloquant l'accès aux amphithéâtres . A La Réunion, ce sont des épreuves du bac professionnel prévues lundi dernier qui n'ont pu avoir lieu faute d'examinateurs.
Devant quelque 400 délégués de parents d'élèves, le ministre de l'éducation nationale a affirmé que menacer la tenue des examens revêt un caractère ' politique ' : c'est ' prendre les élèves en otage pour obtenir par chantage ce qu'on n'a pas réussi à obtenir dans les urnes', a-t-il renchéri devant des parents d'élèves ' inquiets et angoissés ' quant à la tenue des examens de fin d'année mais aussi des conseils de classe.
Luc Ferry a dit compter ' sur la responsabilité des organisations syndicales qui ont toutes appelé au non-boycott des examens '. Cependant en cas de non respect de ce cadre, notre ministre a déjà tout prévu : ' sans vouloir mettre de l'huile sur le feu (...) on fera appel aux forces de l'ordre si c'est nécessaire et on fera appel à des enseignants pour corriger les examens, comme la loi nous le permet '.
Si l'on en croit les récents sondages, le ministre sur ce point bien précis serait en adéquation avec l'opinion publique française qui à 88% se dit d'accord (dont 72% tout à fait d'accord) pour affirmer que ' l'exercice du droit de grève ne doit pas empêcher les élèves de passer les examens '. Cette fermeté annoncée par Luc Ferry viendrait également conforter des parents d'élèves qui à travers un de leurs représentants , Christian Janet, président de la Fédération des parents d'élèves de l'enseignement public (PEEP), s'est indigné mercredi : ' Les syndicats nationaux disent, ici ou là, qu'ils sont contre cette espèce de prise d'otage des élèves par une minorité d'enseignants, mais d'un autre côté ils ne le condamnent pas directement et clairement, c'est quelque chose pour nous qui est assez inadmissible '
Le spectre du boycott, un enjeu de taille pour le gouvernement contre les syndicats :
Conscient du filon que le gouvernement va essayer d'exploiter contre leur mouvement, Gérard Aschieri, secrétaire général de la FSU, a vivement critiqué les propos tenus par le ministre : ' Il a l'air de vouloir jeter de l'huile sur le feu et semble toujours ignorer ce qu'est le dialogue social ', a-t-il dit. ' La meilleure garantie qu'il pourrait donner pour que les examens se déroulent normalement et pour que les jeunes ne soient pas pénalisés, c'est de faire les gestes significatifs qui permettraient de rouvrir le dialogue ', a-t-il ajouté. Dans ce bras de fer entamé, Gérard Aschieri renvoie la balle au gouvernement qui : 'essaie de jouer l'opinion publique contre nous, de nous prendre en otages mais il y a encore le temps, avant le 12 juin et le bac, pour ouvrir de vraies négociations' .
Luc Ferry a pour sa part répété mercredi à l'Assemblée nationale que le gouvernement était 'toujours ouvert au dialogue et à la concertation' avec les syndicats de l'enseignement mais qu'il était hors de question de retirer les réformes. 'On ne peut pas demander en préalable à une négociation le retrait pur et simple des mesures envisagées, ce n'est pas sérieux', a-t-il dit. Quelle que soit l'issue de ce ping-pong entre le gouvernement et les syndicats d'enseignants, pour de nombreux lycéens ou collégiens, qui ont déjà des projets d'inscription en fac, ou de travail, dès les examens obtenus, un report du calendrier des épreuves, même minime, peut parfois être catastrophique. D'autant qu'il interviendrait, dans certains endroits, après pratiquement deux mois sans cours.