Jean-Louis Debré a formulé le vœu de revenir à deux sessions législatives par an dans une lettre de cinq pages adressée aux 577 députés, qui commencent tout juste leurs vacances au terme d'une session extraordinaire notamment consacrée à l'adoption des projets de loi sur l'assurance-maladie et la décentralisation. Le système mis en œuvre par Philippe Séguin en 1995 a montré ses limites.
Un système qui doit être ' rénové '
Selon lui la machine législative s'emballe, il se propose de 'contrer cette inflation'. Pour cela, Jean-Louis Debré propose donc de revenir sur la session unique sans pour autant revenir à la situation d'avant 1995. Si la première session se déroulait, comme par le passé, d'octobre à décembre, la seconde se prolongerait jusqu'à la fin juillet, et non plus la fin juin.
Dans l'intersession, de janvier à avril, Debré suggère de maintenir une séance hebdomadaire de questions d'actualité, au lieu de deux, pour que 'l'Assemblée nationale continue naturellement sa mission de contrôle de l'action gouvernementale'.
Comme son collègue de l'Assemblée nationale, le président du Sénat, Christian Poncelet a critiqué récemment les 'cadences infernales', et il s'en est pris à la session unique, 'cette fausse bonne idée qui n'a suscité que des espoirs déçus'.
Le débat sur l'organisation du travail parlementaire concerne au premier chef les assemblées, il ne pourra aboutir sans l'accord du gouvernement. Le calendrier de la session étant inscrit dans la Constitution, une nouvelle révision constitutionnelle est en effet nécessaire pour le modifier. 'Aucun projet en ce sens n'est à l'ordre du jour', assure-t’on à Matignon et au ministère chargé des Relations avec le Parlement.
Si une remise question du calendrier parlementaire devait être envisagée, elle devrait être précédée d'un long travail de réflexion mené avec des constitutionnalistes et d'une concertation réelle avec l'opposition.
Si le passage par une révision constitutionnelle était finalement jugé trop lourd, les deux assemblées pourraient se contenter d'aménager leurs règlements intérieurs en fixant des 'crédits temps' permettant de limiter la durée de certaines interventions en séance.
Grand défenseur de la session unique lorsqu'il était député, Pierre Mazeaud, aujourd'hui au Conseil constitutionnel, estimait que cette réforme ne serait efficace qu'en étant accompagnée d'une interdiction du cumul des mandats, afin qu'un député soit davantage attiré par le travail législatif que par sa circonscription.
L'absence de ce second volet explique sans doute les constats d'échec ou d'insuffisance dressés aujourd'hui.
Le président de l'Assemblée déplore d'avoir à inscrire cette session écoulée dans 'le livre des records parlementaires' : Record d'heures passées en séance, d'amendements déposés, de longueur des textes examinés. Sans parler des articles de loi dont on pourrait aisément se passer : 'Nos concitoyens seront sans doute rassurés depuis que, grâce à la loi réformant l'assurance-maladie, les 'régimes d'assurance-maladie font bénéficier tous les assurés sociaux des progrès de la médecine' !', ironise-t-il.
Une réforme sur la place du Parlement
Élu président de la République le 7 mai 1995, Jacques Chirac s'engageait moins de deux semaines plus tard, dans un message au Parlement, à 'soumettre sans délai un projet de loi constitutionnelle tendant à apporter les modifications nécessaires pour organiser une session unique de Parlement'.
Il s'agissait, disait le nouveau chef de l'État, de 'remettre le Parlement à sa vraie place, une place centrale' lui permettant de 'redevenir le lieu privilégié et naturel du débat politique'
Jusqu'en 1995, les députés siégeaient six mois dans l'année, en deux sessions de trois mois (octobre-décembre et avril-juin).
En prônant la session continue, Philippe Séguin visait un triple objectif : aligner le Parlement français sur la quasi-totalité des grandes démocraties ; renforcer le contrôle du gouvernement afin que celui-ci travaille en permanence sous le regard du Parlement ; améliorer enfin le travail législatif : plus de jours au cours de la session (jusqu'à 120) devait éviter le recours aux séances de nuit ou au débord des discussions sur les week-ends. Toute l'année à Paris, les députés avaient ainsi l'assurance théorique d'être repartis dans leurs circonscriptions le jeudi soir.
Cette nouvelle organisation devait en outre faire reculer l'absentéisme. 'Il n'y a pas eu d'inflation législative', se félicitait Philippe Séguin en clôturant, le 25 juin 1996, la première session unique.