C’est la grande absente de cette campagne. En 2004, pourtant, elle inondait, des mois durant, les téléviseurs des français, plongés à nouveau, et malgré eux, dans la fièvre de 1905. Trois ans plus tard, la laïcité, l’un des fondements de la république française, n’aura jamais autant brillé par son absence qu’à cette élection.
La continuité socialiste
Un petit coup d’œil rapide sur les programmes des deux prétendants à la magistrature suprême, permet à peine de l’apercevoir. Seule le pacte présidentielle de Ségolène Royal en parle directement, à travers la proposition d’une charte de la laïcité, qui sera inscrite dans la constitution. C’est en tout cas, en ces termes, que le site officiel du PS en parle.
"Refuser toute remise en cause de la loi de 1905, c’est affirmer la permanence de la valeur de la laïcité et sa modernité face aux problèmes de notre temps. C’est pourquoi il conviendra de s’opposer à toute remise en cause de cette loi, mais également d’intégrer à la Constitution une “Charte de la Laïcité”. Cette Charte rappellera l’histoire du principe de la laïcité et expliquera ses conséquences sur l’organisation de la vie en société."
Par cette mesure, Ségolène Royal entend prendre le contre-pied des propos de Nicolas Sarkozy qui se prononçait, l’an dernier, en faveur d’un toilettage de la loi de 1905, régissant la séparation du pouvoir temporel et spirituel. Pour le chef de l’UMP, il s’agissait alors d’adapter la loi à la nouvelle donne musulmane, en favorisant le financement de mosquées, parent pauvre des lieux de culte français.
Si l’on ignore toujours le contenu exact de cette charte, et si elle sera suivie de mesures concrètes, une chose est sûre. La position du Parti socialiste sur la laïcité n’a semble t’il pas évolué ou changé, depuis la proposition, majoritairement soutenu par le bureau national, du projet de loi interdisant le port de tout signes religieux à l’école, qui a donné la loi du 15 mars 2004. Il s’agit essentiellement d’une laïcité de combat, assez peu ouverte sur le fait religieux, et voyant d’un mauvais œil l’expression publique de convictions religieuses.
A contrario, la posture de Nicolas Sarkozy sur cette question de la laïcité, ne présente pas la même continuité. Depuis 2004, l’ancien ministre de l’intérieur et des cultes, a connu de multiples évolutions dans sa réflexion et son discours sur le rôle et la place de la laïcité (un résumé des discours prononcés sur la laïcité est disponible sur le site officiel de Nicolas Sarkozy).
"Refuser toute remise en cause de la loi de 1905, c’est affirmer la permanence de la valeur de la laïcité et sa modernité face aux problèmes de notre temps. C’est pourquoi il conviendra de s’opposer à toute remise en cause de cette loi, mais également d’intégrer à la Constitution une “Charte de la Laïcité”. Cette Charte rappellera l’histoire du principe de la laïcité et expliquera ses conséquences sur l’organisation de la vie en société."
Par cette mesure, Ségolène Royal entend prendre le contre-pied des propos de Nicolas Sarkozy qui se prononçait, l’an dernier, en faveur d’un toilettage de la loi de 1905, régissant la séparation du pouvoir temporel et spirituel. Pour le chef de l’UMP, il s’agissait alors d’adapter la loi à la nouvelle donne musulmane, en favorisant le financement de mosquées, parent pauvre des lieux de culte français.
Si l’on ignore toujours le contenu exact de cette charte, et si elle sera suivie de mesures concrètes, une chose est sûre. La position du Parti socialiste sur la laïcité n’a semble t’il pas évolué ou changé, depuis la proposition, majoritairement soutenu par le bureau national, du projet de loi interdisant le port de tout signes religieux à l’école, qui a donné la loi du 15 mars 2004. Il s’agit essentiellement d’une laïcité de combat, assez peu ouverte sur le fait religieux, et voyant d’un mauvais œil l’expression publique de convictions religieuses.
A contrario, la posture de Nicolas Sarkozy sur cette question de la laïcité, ne présente pas la même continuité. Depuis 2004, l’ancien ministre de l’intérieur et des cultes, a connu de multiples évolutions dans sa réflexion et son discours sur le rôle et la place de la laïcité (un résumé des discours prononcés sur la laïcité est disponible sur le site officiel de Nicolas Sarkozy).
Le recul de Sarkozy
Ainsi, le candidat UMP, après s’être prononcé contre la loi du 15 mars 2004, craignant une stigmatisation des musulmans, a rapidement durci son discours.
"Il n’est pas question d’accepter des agents la manifestation de convictions religieuses. A mon sens, le plus gênant dans le port du voile au guichet (…)est la manifestation du rejet d’une des composantes essentielles du pacte républicain (…)Un agent public ne peut pas piocher, dans le pacte républicain, ce qui l’arrange et ce qui ne l’arrange pas.
A l'hôpital, il faut interdire aux patients de récuser un médecin pour des raisons religieuses.
La loi exige que sur une carte d’identité, la photographie du titulaire soit tête nue, que ce soit un homme ou une femme. Cette obligation d’ordre public s’impose à tous, aussi bien aux sœurs chrétiennes qu’aux femmes musulmanes. Les religions n’ont aucune légitimité pour contester cette loi."
Dans le même esprit, les lieux publics sont ouverts à tous sans distinction de race, d’opinion politique ou de religion. Ce principe non plus, ne peut se négocier. Si l’on accepte aujourd’hui de séparer l’accès aux piscines des femmes pour des raisons religieuses, faudra-t-il demain accepter un accès distinct aux théâtres et aux restaurants, puis accepter de séparer les riches des pauvres, puis les hommes blancs des hommes noirs ? »
Sur la question de l’école et des fêtes religieuses, Sarkozy revient aussi sur ses positions, en les durcissant également.
"L’école ne doit distinguer personne en fonction de critères religieux, raciaux ou sociaux car accepter que l’enseignement soit différent en fonction des origines, des convictions politiques ou des convictions religieuses des élèves reviendrait à abandonner toute idée de liberté de pensée et d’égalité des chances. A quels extrêmes nous mènerait cette logique ?
De même, il n’est de mon point de vue pas question de modifier le calendrier scolaire pour accorder aux uns et aux autres des jours fériés en fonction de chaque fête religieuse. Je sais fort bien que notre calendrier est inspiré des fêtes chrétiennes. Nous héritons de siècles d’histoire qu’il serait illusoire de vouloir gommer au nom d’une conception sectaire de la laïcité. Il serait parfaitement choquant et infondé de vouloir créer un calendrier scolaire chrétien, un calendrier juif et un calendrier musulman. De fait, ce n’est pas aux religions de définir le contenu de la laïcité."
"Il n’est pas question d’accepter des agents la manifestation de convictions religieuses. A mon sens, le plus gênant dans le port du voile au guichet (…)est la manifestation du rejet d’une des composantes essentielles du pacte républicain (…)Un agent public ne peut pas piocher, dans le pacte républicain, ce qui l’arrange et ce qui ne l’arrange pas.
A l'hôpital, il faut interdire aux patients de récuser un médecin pour des raisons religieuses.
La loi exige que sur une carte d’identité, la photographie du titulaire soit tête nue, que ce soit un homme ou une femme. Cette obligation d’ordre public s’impose à tous, aussi bien aux sœurs chrétiennes qu’aux femmes musulmanes. Les religions n’ont aucune légitimité pour contester cette loi."
Dans le même esprit, les lieux publics sont ouverts à tous sans distinction de race, d’opinion politique ou de religion. Ce principe non plus, ne peut se négocier. Si l’on accepte aujourd’hui de séparer l’accès aux piscines des femmes pour des raisons religieuses, faudra-t-il demain accepter un accès distinct aux théâtres et aux restaurants, puis accepter de séparer les riches des pauvres, puis les hommes blancs des hommes noirs ? »
Sur la question de l’école et des fêtes religieuses, Sarkozy revient aussi sur ses positions, en les durcissant également.
"L’école ne doit distinguer personne en fonction de critères religieux, raciaux ou sociaux car accepter que l’enseignement soit différent en fonction des origines, des convictions politiques ou des convictions religieuses des élèves reviendrait à abandonner toute idée de liberté de pensée et d’égalité des chances. A quels extrêmes nous mènerait cette logique ?
De même, il n’est de mon point de vue pas question de modifier le calendrier scolaire pour accorder aux uns et aux autres des jours fériés en fonction de chaque fête religieuse. Je sais fort bien que notre calendrier est inspiré des fêtes chrétiennes. Nous héritons de siècles d’histoire qu’il serait illusoire de vouloir gommer au nom d’une conception sectaire de la laïcité. Il serait parfaitement choquant et infondé de vouloir créer un calendrier scolaire chrétien, un calendrier juif et un calendrier musulman. De fait, ce n’est pas aux religions de définir le contenu de la laïcité."
Un consensus républicain
La position sarkoziste est donc double. Elle se compose d’un discours très éloquent sur la laïcité, une sorte de morceau d’idéalisme républicain. "Qu’est-ce que c’est la laïcité à la française ? C’est une loi qui reconnaît un droit. Le droit de croire, de vivre sa foi et de le transmettre à ses enfants. C’est cela la laïcité à la française ! C'est aussi le droit de ne pas croire. A égalité de traitement, pour les uns comme pour les autres. Ce n’est pas une interdiction, la laïcité à la française.
D’ailleurs, si les religions étaient si peu importantes et si le droit de croire n’était pas quelque chose de fondateur, alors pourquoi faire une loi ? Cette loi garantit un droit jugé fondamental, comme le droit de manifester, de s’exprimer, le droit de croire, de vivre sa religion, de la pratiquer, de la transmettre à ses enfants. C’est cela la laïcité à la française !
La laïcité est à mes yeux la reconnaissance du besoin que l’homme éprouve d’espérer et donc de croire, sans jamais tenter d’orienter ses pas vers telle ou telle religion, autant que celle du droit de ne pas croire.
La loi de 1905 est une loi de liberté qui a apaisé, parce qu’elle a reconnu des droits et parce qu’elle a organisé une séparation respectueuse entre l'Etat d’un côté, qui s’occupe du temporel, les religions de l’autre, qui s’occupent du spirituel."
Un discours solennel de respect envers la liberté de croire ou de ne pas croire qui se décline, paradoxalement, par des propositions moins ouvertes, plus repliées, à l’image du refus répété par Nicolas Sarkozy, de toute forme d’expression religieuses dans les lieux publics (école, administrations), du refus d’inclure d’autres fêtes religieuses dans le calendrier national, de réserver des espaces horaires aux femmes pour leurs activités sportives, plus largement le refus de prise en compte et de respect d’une certaine pudeur religieuse. Une position qui place l’ancien ministre de l’intérieur en accord total avec l’esprit du programme socialiste de Ségolène Royal. Cette convergence ira jusqu’à reprendre, dans un discours et en des termes très proches, la proposition de Ségolène Royal d’une charte de la laïcité. "Pour promouvoir la laïcité, nous pourrions diffuser largement une "charte de la laïcité et de la citoyenneté", dans les écoles, lors des retraits de cartes d'électeur ou des journées d'appel de préparation à la défense… Elle devrait également être remise aux étrangers dans le cadre du "contrat d'accueil et d'intégration" que j'ai fait adopter dans la loi sur l'immigration choisie."
Ce repli a amené Nicolas Sarkozy a se prononcer, en 2006, en faveur d’une révision de la loi de 1905 pour financer le culte musulman. Proposition rapidement abandonné, comme la expliqué lui-même le candidat de l’UMP, dans une interview de notre confrère La Croix.
"La Croix : Si vous êtes élu, quelles suites donnerez-vous au rapport Machelon qui proposait de donner la possibilité aux communes de financer les lieux de culte ?
Nicolas Sarkozy : Je n’avancerai pas sur ce sujet tant qu’il n’y aura pas de consensus en la matière.
Vous renoncez donc à modifier la loi de 1905 ?
N.S : Oui. Je poursuivrai la discussion avec l’ensemble des religions. C’est un sujet sur lequel on ne peut avancer sans consensus."
Un recul, traduit explicitement par l’absence de propositions concrète sur la laïcité dans le programme UMP du candidat Sarkozy.
On voit donc, en écoutant les discours des uns et des autres, que la question laïque fait l’objet, aujourd’hui en France, d’un consensus républicain. Il n’y a plus de clivage, comme ce fut longtemps le cas, entre la droite et la gauche, sur cette question. Tout deux partagent une vision laïque de fermeture et non plus d’ouverture, d’exclusion et non d’inclusion. La page 1905 semble bien tournée.
D’ailleurs, si les religions étaient si peu importantes et si le droit de croire n’était pas quelque chose de fondateur, alors pourquoi faire une loi ? Cette loi garantit un droit jugé fondamental, comme le droit de manifester, de s’exprimer, le droit de croire, de vivre sa religion, de la pratiquer, de la transmettre à ses enfants. C’est cela la laïcité à la française !
La laïcité est à mes yeux la reconnaissance du besoin que l’homme éprouve d’espérer et donc de croire, sans jamais tenter d’orienter ses pas vers telle ou telle religion, autant que celle du droit de ne pas croire.
La loi de 1905 est une loi de liberté qui a apaisé, parce qu’elle a reconnu des droits et parce qu’elle a organisé une séparation respectueuse entre l'Etat d’un côté, qui s’occupe du temporel, les religions de l’autre, qui s’occupent du spirituel."
Un discours solennel de respect envers la liberté de croire ou de ne pas croire qui se décline, paradoxalement, par des propositions moins ouvertes, plus repliées, à l’image du refus répété par Nicolas Sarkozy, de toute forme d’expression religieuses dans les lieux publics (école, administrations), du refus d’inclure d’autres fêtes religieuses dans le calendrier national, de réserver des espaces horaires aux femmes pour leurs activités sportives, plus largement le refus de prise en compte et de respect d’une certaine pudeur religieuse. Une position qui place l’ancien ministre de l’intérieur en accord total avec l’esprit du programme socialiste de Ségolène Royal. Cette convergence ira jusqu’à reprendre, dans un discours et en des termes très proches, la proposition de Ségolène Royal d’une charte de la laïcité. "Pour promouvoir la laïcité, nous pourrions diffuser largement une "charte de la laïcité et de la citoyenneté", dans les écoles, lors des retraits de cartes d'électeur ou des journées d'appel de préparation à la défense… Elle devrait également être remise aux étrangers dans le cadre du "contrat d'accueil et d'intégration" que j'ai fait adopter dans la loi sur l'immigration choisie."
Ce repli a amené Nicolas Sarkozy a se prononcer, en 2006, en faveur d’une révision de la loi de 1905 pour financer le culte musulman. Proposition rapidement abandonné, comme la expliqué lui-même le candidat de l’UMP, dans une interview de notre confrère La Croix.
"La Croix : Si vous êtes élu, quelles suites donnerez-vous au rapport Machelon qui proposait de donner la possibilité aux communes de financer les lieux de culte ?
Nicolas Sarkozy : Je n’avancerai pas sur ce sujet tant qu’il n’y aura pas de consensus en la matière.
Vous renoncez donc à modifier la loi de 1905 ?
N.S : Oui. Je poursuivrai la discussion avec l’ensemble des religions. C’est un sujet sur lequel on ne peut avancer sans consensus."
Un recul, traduit explicitement par l’absence de propositions concrète sur la laïcité dans le programme UMP du candidat Sarkozy.
On voit donc, en écoutant les discours des uns et des autres, que la question laïque fait l’objet, aujourd’hui en France, d’un consensus républicain. Il n’y a plus de clivage, comme ce fut longtemps le cas, entre la droite et la gauche, sur cette question. Tout deux partagent une vision laïque de fermeture et non plus d’ouverture, d’exclusion et non d’inclusion. La page 1905 semble bien tournée.