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L’Enigme Yasser Arafat

Rédigé par Ammar B. | Vendredi 12 Septembre 2003 à 00:00

           

« Il faut tuer Arafat » écrit l’éditorialiste du Jérusalem Post, quotidien israélien de langue anglaise. Le Cabinet d’Ariel Sharon, Premier ministre israélien, a donné son accord à son armée, pour expulser Yasser Arafat de Palestine. Mais le cabinet exige qu’un plan de cette action lui soit proposé avant exécution. Hier, jeudi, des éléments de l’armée israélienne ont occupé des positions à 300 m de la Mukataa, le quartier général d’Arafat où il est tenu emprisonné par l’armée israélienne depuis le mois de décembre 2001.



' Il faut tuer Arafat ' écrit l’éditorialiste du Jérusalem Post, quotidien israélien de langue anglaise. Le Cabinet d’Ariel Sharon, Premier ministre israélien, a donné son accord à son armée, pour expulser Yasser Arafat de Palestine. Mais le cabinet exige qu’un plan de cette action lui soit proposé avant exécution. Hier, jeudi, des éléments de l’armée israélienne ont occupé des positions à 300 m de la Mukataa, le quartier général d’Arafat où il est tenu emprisonné par l’armée israélienne depuis le mois de décembre 2001.

Le désespoir d’Israël
La démission de Abu Mazen du poste de Premier ministre a fini de désespérer les dirigeants israéliens. En accord avec Washington, Israël avait choisi Abu Mazen et avait pratiquement imposé leur choix à Yasser Arafat. Il avait alors l’espoir que M Mazen saurait faire adopter des positions convenables dans le sens de la ' feuille de route ', le dernier plan de paix impulsé par les Etats Unis qui a l’avantage de prévoir la création d’un Etat palestinien en 2005.

Or, en expliquant sa démission, Abu Mazen reproche à Israël de n’avoir pas œuvré dans le sens de l’accord de paix. Car, le nouveau Premier ministre qu'il était avait réussi à obtenir une trêve du Hamas, du Jihad islamique ainsi que des autres mouvements palestiniens. Mais, durant cette période, Israël avait intensifié ses opérations militaires contre les dirigeants palestiniens, entraînant des contre-attaques palestiniennes prévisibles et brisant la trêve signée par les mouvements au moment même où les pourparlers allaient bon train pour la reconduire.

D’autre part, du point de vue palestinien, la promesse israélienne de libérer les prisonniers palestiniens ne fut pas honorée. Puisque la mesure a touché moins de 5% de la population concernée. Elle fut perçue comme un manque de volonté réelle qualifiée de 'vaste plaisanterie ' par un dirigeant du Fatah et de ' poudre aux yeux ' par Yasser Arafat.

Par ailleurs, la nomination de Abu Mazen n’a pas entraîné d’assouplissement dans le siège de la Mukataa et n’a pas affecté la construction du mur de séparation qui s’aventure à l’intérieur des terres palestiniennes rendant caduque, avant terme, le projet de création d’un Etat palestinien en 2005, comme le prévoit 'la feuille de route'.

La vraie nature de l’obstacle Arafat
Déjà en 1993, les accords d’Oslo avaient déjà vu le vœu israélien de doter l’Autorité palestinienne d’une police à fort effectif chargée de réprimer le Hamas, ouvertement opposé aux accords. Forte d’environ 35 000 hommes, Israël estime que les forces de police palestiniennes sont capables d’arriver à bout des militants du Hamas et du Jihad islamique dont les attaques suicide en Israël entretiennent un sentiment d’insécurité permanent au seins des populations. Or Yasser Arafat, qui est aussi le chef d'un parti politique, le Fatah, a compris depuis longtemps qu’il ne pouvait diriger son pays sans tenir compte de la popularité du Hamas, la seule vraie opposition nationale populaire à son pouvoir politique.
Le Hamas n’est pas un mouvement politique classique. Issu du mouvement des frères musulmans en 1987, il n'affichera pas d'ambitions politiques. Sa stratégie première visait à générer un changement de comportement au sein du peuple de Palestine sous l'occupation israélienne. Il est alors apprécié par Israël qui l'encourage et l'aurait financé dans le but de créer une division au sein de la lutte menée par l'OLP. Mais rapidement, le Hamas élargit son champ d'action et politise son discours en prenant pour cible l'occupant israélien dont il devient alors l'ennemie numéro 1. En plus de ses activités politiques, le Hamas a poursuivi une véritable action d’encadrement, d’écoute et une série d’actions caritatives auprès de la population palestinienne dans le désarroi dont il  a l'adhésion ou la sympathie dans une très grande majorité de municipalités, surtout après depuis la seconde Intifada. Une opération de police d’envergure à l’encontre du mouvement islamiste ferait courir des risques de guerre civile en Palestine. Un risque que Yasser Arafat évite en gardant la main sur l’appareil sécuritaire palestinien que Israël veut pouvoir contrôler.
La nomination du président du parlement, Abu Alaa, au poste de Premier ministre n’a pas changé l’orientation politique de Yasser Arafat. Abu Alaa éprouve des difficultés à former son gouvernement en raison des pressions qu'il subit pour le choix du ministre chargé de la Sécurité intérieure. Mohammed Dahlan, ancien tenant du poste est la source du problème car 'Il est le préféré des Américains, le Fatah n'en veut pas' explique-t-on au Fatah.

Les réactions à la décision d’expulsion
L’idée d’expulser Yasser Arafat, président élu de Palestine, pour se choisir eux-mêmes d’autres interlocuteurs est une stratégie que les Israéliens semblent être les seuls à comprendre. En d’autres temps, dans les colonies d’Afrique et dans les pays soumis par l’armée d’Hitler, la même attitude avait été adoptée par les forces d'occupation. Mais, dans le cadre d’une recherche de paix, cette attitude reste assez incomprise voire impopulaire.
Pour le président français, Jacques Chirac: 'Yasser Arafat est l'autorité légitime de l'Autorité palestinienne. (…) Je pense, et je crois que l'Union européenne considère également, que ce serait une grave erreur de chercher à l'éliminer du champ politique.' Le président égyptien, Hosni Mubarak parle d’une 'monumentale erreur.'
Pour le ministre canadien des Affaires étrangères, Bill Graham, ' Le Canada craint que l'expulsion de Yasser Arafat nuise au processus de paix et ait un impact négatif sur les interlocuteurs palestiniens qui se sont montrés constructifs. '
Aux Etats Unis, Le porte-parole du Département d'Etat Richard Boucher explique : 'Nos vues sur M. Arafat n'ont pas changé. Nous pensons toujours qu'il fait partie du problème, pas de la solutionMais dans le même temps, nous pensons qu'il ne serait pas utile de l'expulser, car cela ne ferait que lui donner une autre tribune pour s'exprimer.' Quant à Shimon Pérès, ancien Premier ministre israélien, actuellement dans l’opposition, l’expulsion de Yasser Arafat serait une 'grosse erreur'. 'En dehors de la Moukataa, Arafat sera nuisible plus efficacement qu'il ne l'est maintenant', a ajouté Shimon Pérès.

Le président égyptien s’est dit prêt à accueillir Arafat si la demande lui était adressée. Peu avant le début de l’été, la reprise des travaux de construction d’une résidence du chef de l’Autorité palestinienne à Tunis avait alimenté des rumeurs d’une expulsion prochaine de Arafat.





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