Dimanche dernier, les bases de l’Union des citoyens musulmans de l’Agglomération drouaise (UCMAD) ont été lancées. Les initiateurs inscrivent leur mouvement dans le cadre d’une réaction citoyenne ' contre la criminalisation de toute une population '. Ce mouvement qui n’est pas encore une association se donne pour but de canaliser et d’organiser la protestation contre le type de traitement dont les musulmans de Dreux ont été victimes le jour de l’Aïd.
Une compagnie de police pour gâcher l’Aïd
L’Aïd el-kébir 2005, fut un jour de deuil à Dreux. A la demande du sous-préfet, une compagnie de CRS avait été spécialement mobilisée dans la ville. Officiellement, il s’agissait de gérer le flux de la circulation automobile en ce jour de fête. En pratique, c’est à une véritable chasse aux musulmans que se sont livrés les agents de l’ordre.
Pendant que les fidèles étaient en prière, à l’intérieur des mosquées, l’assaut fut lancé sur les parkings des mosquées. Les nombreuses voitures en défaut de stationnement aux abords des mosquées de Dreux furent verbalisées à raison de 35 € le PV. Du jamais vu. Intimidation ou provocation ? Les Drouais y ont vu une volonté affichée de gâcher leur fête. Mais le zèle excessif des agents de l’ordre public n’en resta pas là.
Une fois la prière terminée, les fidèles purent découvrir un imposant dispositif quadrillant les quartiers à forte population musulmane. Les points de passages stratégiques furent investis par des barrages de police. Les voitures entrant et les voitures sortant de ces quartiers furent arrêtées et systématiquement fouillées avec une attention particulière portée sur le coffre. Sans ménagement aucun, sans même la courtoisie conventionnelle des agents de l’ordre public. Dans ce déferlement inhabituel d’agents de police, le quadrillage des quartiers, l’avalanche de procès verbaux, la conduite rustre et frénétique des contrôles routiers, les musulmans drouais ont vu une attitude ' arrogante et méprisante envers une population qu’on a essayé de criminaliser ' confie un responsable associatif.
Le CRCM est une coquille vide
L’effet de surprise passé, chacun à compris que ce remue-ménage n’était qu’une chasse ouverte aux contrevenants à la réglementation sur le sacrifice du mouton. Si l’intention est admise par les responsables associatifs, la méthode est inadmissible. Il fallait donc réagir. Ils jugent vain de compter sur Conseil régional du culte musulman (CRCM) sensé organiser le culte. Pour les jeunes musulmans de Dreux, le CRCM est une ' coquille vide '. Ce conseil n’a aucune présence avérée dans la gestion du culte. De plus le président du CRCM est vivement mis à l’index par les initiateurs du mouvement naissant. Selon eux, cette situation est une preuve supplémentaire de l’incapacité des responsables du CRCM à organiser proprement le culte dans la ville.
Pour d’autres drouais, il y a une question d’argent derrière le mauvais traitement infligé aux musulmans durant l’Aïd. Sur décision sous-préfectorale en accord avec le président du CRCM et quelques éleveurs triés sur le volet, une situation de monopole a été créée autour des centres habilités à vendre le mouton de l’Aïd. D’après un acteur associatif qui a souhaité garder l’anonymat, il s’agit là d’une utilisation du CRCM à des fins personnelles. Il s’avère en effet que, le président du CRCM, M Erraji détient l’un des quatre centres réservés à la vente du mouton de l’Aïd. Il est donc parti prenante de ce monopole qui leur permet d’imposer le prix du mouton à 250 € par tête. (Notre enquête montre que l’agneau est acquis entre 60 à 80 € par l’éleveur). De nombreuses familles musulmanes n’ont pu participer à la fête.
Pour dénoncer cette situation mais aussi pour protester contre l’organisation de l’Aïd à Dreux, l’Union des citoyens musulmans de l’agglomération de Dreux organise un rassemblement le samedi 5 février devant la sous préfecture. Selon les organisateurs, il s’agit d’exprimer l’amertume et l’indignation de musulmans drouais qui se sont sentis criminalisés par les contrôles intensifs et les procès verbaux abusifs qui leur ont été dressés le jour de leur fête religieuse. Il s’agit aussi de réclamer plus de moyens matériels pour faciliter l’organisation du culte dans la région. Il s’agit aussi de se démarquer des responsables locaux du CRCM qui, disent-ils, ' ne représentent qu’eux même et ne peuvent être juge et parti dans l’organisation de l’Aïd'.