Une première version de ce texte a été publiée aujourd’hui dans les colonnes du Courrier de Genève, nous publions en exclusivité sur SaphirNet.info la version originale.
Des dizaines de milliers de personnes1 ont pris part au rassemblement marquant le premier anniversaire de l’invasion de l’Iraq en brandissant des pancartes maculées de sang sur lesquelles étaient inscrites le nom désabusement écorché du premier ministre britannique « Bliar » (menteur).
'Je ne peux pas croire que les attaques en Iraq remontent déjà à un an et que le gouvernement continue à nous mentir, à refuser d’admettre qu’il nous a entraîné dans une guerre sur la base d’un mensonge, et qu’aux anciens mensonges il ne cesse d’en ajouter de nouveaux' martèle Jane Calveley, secrétaire pour la région de Liverpool de RESPECT, une nouvelle coalition politique issue du mouvement anti-guerre.
Les fantômes des guerres afghanes et iraquiennes et les mystifications qui les ont accompagnée n'en finissent plus de hanter les couloirs de la carrière politique de Tony Blair.
Début mars, cinq jeunes britanniques retournent de l’enfer des camps de Guantanamo. Les temoignagnes2 de trois d’entre eux pour l’hebdomadaire centre-gauche, The Observer, sont accablants pour un gouvernement qui il y a encore quelques semaines affirmait que leur détention était totalement justifiée.3
Passages à tabac, transfert dans des cellules exiguës d’isolement pendant plusieurs semaines, violents interrogatoires auxquels assistent parfois les membres des services secrets britanniques n’y feront rien. Pas le moindre élément n’est venu confirmer les thèses présumées de 'combattants ennemis' et 'membre d’Al Qaida'. Apres plus de deux ans, il aura donc fallu se résigner… sous la menace de l’ouverture d’une procédure judiciaire de la Court Suprême britannique et sous la pression des campagnes menées par les familles et les organisations des droits de l’homme. D’autres détenus britanniques croupissent dans les cages de l’île cubaine et aucune preuve officielle n’a encore été avancée pour justifier leur emprisonnement.
Crainte après les attentats de Madrid
Les attaques sanglantes de Madrid ont réveillé la hantise de représailles dans la capitale anglaise, hantise que tente d’exploiter le gouvernement britannique… avec l’habileté qu’on lui connaît.
'Une attaque sur Londres est inévitable' entonnait dans un entretien pour le Guardian4, Sir John Stevens, chef des forces de police londoniennes, au côté du Maire de Londres, le travailliste Ken Livingstone. Mais dans la ville qui dispose de l’un des systèmes de vidéo-surveillance les plus développés qui soit, nos deux compères s’empressent d’ajouter que Londres est l’une des villes les plus sures de la planète et que toutes les dispositions sont prises pour qu’elle le reste.
Ainsi samedi matin, Harry et Simon Westaway, deux frères alpinistes membres de Greenpeace, franchissent en quelques secondes les deux grilles qui séparent le pont de Westminster de la Maison du Parlement, l’un des endroits les plus surveillés de la planète donc… En un peu moins d’une heure, ils escaladent Big Ben et déroulent une banderole pour exiger une nième fois la vérité... dérisoires barricades. Jusqu'où encore l'enfermement, jusqu'à quand la peur ?
Il s'agirait maintenant de s'interroger sur le pourquoi et le pour qui de ces attentats sans évacuer ces questions derrière les délires racistes que nos gouvernements savent si bien instrumentaliser.
1 25 000 d’après la police, 100 000 d’après les organisateurs.
2 The Observer, 14/03/2004.
3 Ces témoignages coïncident d’après le journaliste qui les a recueilli avec les observations de sa visite à Guatanamo et d’autres attestations de prisonniers.
4 Guardian, 17/04/2004.