L'adage bambara soutient que "A ka dogo be mogoya tigne" (Le peu se partage sous nos toits). Ce sens du partage, de l'entraide a toujours eu raison de l'égoïsme dans les familles maliennes. Selon les explications de Younoussa Touré, chercheur à l'Institut des sciences humaines, notre société est bâtie sur la tradition de rendre visite aux parents, aux amis. Il existe de vieilles habitudes de nomadisme, de voyager pour connaître d'autres cieux. Ce désir de changer d'air accentue le sens de la solidarité, de don de soi et de partage de la nourriture.
Il y a bien longtemps que la belle-fille offre des repas succulents à ses beaux parents dans les familles maliennes. Cette tradition remonte loin. La famille peut recevoir un invité selon les liens d’affinités. C'est une façon de renforcer la cohésion entre les familles sans distinction. Ce geste traduit les bons rapports entre les personnes, les familles, les villages. Ces milliers d'échanges amicaux traversent même les frontières et soudent les pays de la sous-région, témoigne le chercheur Touré.
Ce phénomène persiste encore dans notre quotidien. Le mois de carême n'échappe pas à cette règle. Bien au contraire ; il est accentué durant tout le mois de jeûne musulman. Le Ramadan, neuvième mois du calendrier islamique, est un mois sacré pour tous les musulmans. Ce temps est consacré au recueillement et à la méditation. Mais c'est aussi une période de fête pendant laquelle toutes les gourmandises sont satisfaites. Les repas sont savoureux et surtout copieux. Malgré les préceptes d'humilité de l'Islam et de retenue des médecins. L'aspect gastronomique de cette tradition d'échange de plats succulents entre amis est au centre du présent article.
Du lever au coucher du soleil, les musulmans s'abstiennent de boire et de manger. Pendant la journée une activité intense anime les cuisines. Les femmes préparent de multiples plats spéciaux qui agrémentent le Ramadan. Ils varient d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre. A la tombée de la nuit, les membres de la famille et leurs amis se réunissent pour partager un repas constitué de plats parfumés et savoureux. Presque chaque jour un plat spécial est envoyé à un parent ou un ami dans une famille voisine ou un autre quartier de la ville.
Ce repas spécial en guise de cadeau est destiné aux proches, selon le degré d'affinité. Le précieux repas offert aux parents et amis occupe une place de choix pendant le mois de carême.
Il y a bien longtemps que la belle-fille offre des repas succulents à ses beaux parents dans les familles maliennes. Cette tradition remonte loin. La famille peut recevoir un invité selon les liens d’affinités. C'est une façon de renforcer la cohésion entre les familles sans distinction. Ce geste traduit les bons rapports entre les personnes, les familles, les villages. Ces milliers d'échanges amicaux traversent même les frontières et soudent les pays de la sous-région, témoigne le chercheur Touré.
Ce phénomène persiste encore dans notre quotidien. Le mois de carême n'échappe pas à cette règle. Bien au contraire ; il est accentué durant tout le mois de jeûne musulman. Le Ramadan, neuvième mois du calendrier islamique, est un mois sacré pour tous les musulmans. Ce temps est consacré au recueillement et à la méditation. Mais c'est aussi une période de fête pendant laquelle toutes les gourmandises sont satisfaites. Les repas sont savoureux et surtout copieux. Malgré les préceptes d'humilité de l'Islam et de retenue des médecins. L'aspect gastronomique de cette tradition d'échange de plats succulents entre amis est au centre du présent article.
Du lever au coucher du soleil, les musulmans s'abstiennent de boire et de manger. Pendant la journée une activité intense anime les cuisines. Les femmes préparent de multiples plats spéciaux qui agrémentent le Ramadan. Ils varient d'un pays à l'autre, d'une région à l'autre. A la tombée de la nuit, les membres de la famille et leurs amis se réunissent pour partager un repas constitué de plats parfumés et savoureux. Presque chaque jour un plat spécial est envoyé à un parent ou un ami dans une famille voisine ou un autre quartier de la ville.
Ce repas spécial en guise de cadeau est destiné aux proches, selon le degré d'affinité. Le précieux repas offert aux parents et amis occupe une place de choix pendant le mois de carême.
Toujours les bienvenus
L'occasion est belle pour les épouses de se distinguer en valorisant leurs talents de cordon bleu. Le fumet des fritures et des sauces envahit les narines des passants dans la rue. Ils résistent difficilement à la tentation de jeter un coup d'œil à l'intérieur de la maison d'où s'échappent les doux effluves. Il est 9 heures du matin dans la famille Traoré à Kalanbacoro, lorsque l'équipe pour la friture prend place. Quatre personnes sont occupées à éplucher trois sacs de pommes de terre. Environ une trentaine de kilos de bananes plantain (loko en bambara) attendent leur tour. L'ambiance est au travail et à la concentration.
A quelques pas du groupe des éplucheuses un petit groupe de filles plongent plus de 40 poulets dans de la marinade. L'organisatrice de ce festin est une fervente bru en quête de la plus haute estime et des faveurs de ses beaux-parents, de ses voisins et surtout des amis de son mari à travers Bamako. Cette cuisine en équipe est de longue haleine. Les femmes mobilisées jouent un ballet merveilleux autour des fourneaux. Les taquineries et les éclats de rires traduisent la joie des cuisinières à s'acquitter d'une tâche agréable à leurs yeux. En effet les souvenirs de ces assemblées particulières de cuisine collective meublent les souvenirs des cuisinières bien des années après.
Mais les épouses seules se souviennent aussi de ces journées de corvée qui obligent à se plier en quatre pour être au four et au moulin en même temps. Le résultat est réconfortant. Il s'agit de renouveler le pacte d'amitié ou d'amour, en ce qui concerne les beaux-parents. "C'est une tradition. Depuis une vingtaine d'années, j'offre des repas spéciaux de rupture de jeûne à mes amis. Je prie Dieu pour pouvoir honorer et faire plaisir à mes chers parents le plus longtemps possible", commente la maîtresse de maison, Awa C.
Ce repas cadeau est-il conforme à la religion ? Les érudits musulmans enseignent que le Tout-Puissant recommande aux musulmans de multiplier les actes de bienveillance à l'égard de leurs prochains pendant le mois de carême, s'ils en ont les moyens. L'islam est une religion ouverte à tout le monde. Accomplir un geste de solidarité ou d'amitié vis-à-vis de son prochain est un acte de reconnaissance envers Dieu. La solidarité est le mot clé du Ramadan.
Mais il faut reconnaître que le social a pris le dessus. Les échanges de civilités se pratiquaient chez nous bien avant l'arrivée de l’Islam. Même si la pratique en est recommandée par cette religion, il n’y a aucun passage dans le Saint Coran, selon l'érudit A. K., qui impose d’offrir des repas spéciaux aux autres.
A quelques pas du groupe des éplucheuses un petit groupe de filles plongent plus de 40 poulets dans de la marinade. L'organisatrice de ce festin est une fervente bru en quête de la plus haute estime et des faveurs de ses beaux-parents, de ses voisins et surtout des amis de son mari à travers Bamako. Cette cuisine en équipe est de longue haleine. Les femmes mobilisées jouent un ballet merveilleux autour des fourneaux. Les taquineries et les éclats de rires traduisent la joie des cuisinières à s'acquitter d'une tâche agréable à leurs yeux. En effet les souvenirs de ces assemblées particulières de cuisine collective meublent les souvenirs des cuisinières bien des années après.
Mais les épouses seules se souviennent aussi de ces journées de corvée qui obligent à se plier en quatre pour être au four et au moulin en même temps. Le résultat est réconfortant. Il s'agit de renouveler le pacte d'amitié ou d'amour, en ce qui concerne les beaux-parents. "C'est une tradition. Depuis une vingtaine d'années, j'offre des repas spéciaux de rupture de jeûne à mes amis. Je prie Dieu pour pouvoir honorer et faire plaisir à mes chers parents le plus longtemps possible", commente la maîtresse de maison, Awa C.
Ce repas cadeau est-il conforme à la religion ? Les érudits musulmans enseignent que le Tout-Puissant recommande aux musulmans de multiplier les actes de bienveillance à l'égard de leurs prochains pendant le mois de carême, s'ils en ont les moyens. L'islam est une religion ouverte à tout le monde. Accomplir un geste de solidarité ou d'amitié vis-à-vis de son prochain est un acte de reconnaissance envers Dieu. La solidarité est le mot clé du Ramadan.
Mais il faut reconnaître que le social a pris le dessus. Les échanges de civilités se pratiquaient chez nous bien avant l'arrivée de l’Islam. Même si la pratique en est recommandée par cette religion, il n’y a aucun passage dans le Saint Coran, selon l'érudit A. K., qui impose d’offrir des repas spéciaux aux autres.
Forte affluence au niveau des vendeurs de volaille
Du début du Ramadan jusqu'à la fin de la troisième semaine, il règne une forte affluence au niveau des vendeurs de volaille, de pommes de terre, de bananes. Chaka Daou marchand de poulets au marché Dibida soutient que seules les veilles de réveillon de la Saint Sylvestre en décembre enregistrent des achats massifs comparables à ceux du mois de ramadan.
La ménagère Maïmouna attend avec impatience ses poulets. Elle ne se préoccupe pas de la difficulté financière. "Dieu merci ! dit-elle. J'arrive à couvrir mes besoins." Alors elle ne regarde pas à la dépense. "C’est une seule fois dans l'année et le jeu en vaut la chandelle. Les paroles de remerciements et les bénédictions des destinataires me satisfont pleinement", clame à la face des autres acheteurs la pimpante Maïmouna en emportant un gros lot de poulets.
Les époux contribuent principalement à la réalisation de ce repas spécial. Le technicien Amadou Sylla travaille dans une structure de la place. Il débourse gros chaque année. Le repas cadeau de cette famille est offert dès la première semaine du mois sacré. Notre technicien révèle que son épouse se prémunit bien avant le jour "j". Le couple vote un budget d'au moins 75.000 Fcfa. "Mes parents sont habitués à recevoir mes plats. Je lutte pour maintenir la tradition que j'ai instaurée", commente avec fierté Mme Sylla qu'accompagne son mari au marché.
A l'approche de l'heure de la rupture du jeûne, deux plats de viande garnie de fritures atterrissent à côté du vieux Soungalo, âgé de 72 ans. Mon amie Mariam avait tenu à me conduire auprès de son grand-père pour assister à l'arrivée des repas spéciaux offerts au sage par ses nombreuses belles-filles et autres alliés. Il savourait paisiblement ses mets, symbole de haute considération et de mérites reconnus dans le maintien de la cohésion familiale. Les donatrices du jour sont deux belles-filles qui manifestent leur attention particulière à leur belle famille.
Le repas spécial dans l'esprit de toutes les femmes mariées est une épreuve de visibilité dans la grande famille africaine. Ce plat très particulier prouve que "je suis une femme idéale", atteste l'une des belle-filles du doyen Soungalo, qui a préféré garder l'anonymat.
La nouvelle mariée Aissata figurait dans le lot de la vague 2009 des mariées du "sounkalo makono" passé (le mois précédent le Ramadan). « C'est le moment idéal pour attirer l'affection des membres de ma nouvelle famille », souligne la "kognomousso". Elle bénéficie pour cette première fois de l'aide de quelques amies encore célibataires. Le groupe est en train de concocter un énorme plat de boulettes de viande épicée, destiné à ses beaux-parents. Les ingrédients entassés autour de ces femmes donne une idée de l'importance du budget spécial englouti au marché.
Le menu spécial s’égrène tout le mois de ramadan. Il est surtout composé de poisson, de viande, de poulet, de pintades. Les garnitures sont à base de pommes de terre, d'ignames, de banane plantain. Ce choix selon les explications, n'est pas fortuit. Aïssata soutient que ce choix permet de rompre avec le repas ordinaire de riz ou de gâteau de mil.
Les ego des couples ne semblent pas souffrir de la crise financière qui frappe le trésor public du pays. La vue de certains repas spéciaux heurte la bienséance. L'orgie et le gâchis inconsciemment tolérés pendant le ramadan contribueront à déséquilibrer longtemps des milliers de couples. Et dire que l'Islam prohibe l'ostentation !
Auteur : Hadeye Traoré - 11/09/2009
Source : L'essor
La ménagère Maïmouna attend avec impatience ses poulets. Elle ne se préoccupe pas de la difficulté financière. "Dieu merci ! dit-elle. J'arrive à couvrir mes besoins." Alors elle ne regarde pas à la dépense. "C’est une seule fois dans l'année et le jeu en vaut la chandelle. Les paroles de remerciements et les bénédictions des destinataires me satisfont pleinement", clame à la face des autres acheteurs la pimpante Maïmouna en emportant un gros lot de poulets.
Les époux contribuent principalement à la réalisation de ce repas spécial. Le technicien Amadou Sylla travaille dans une structure de la place. Il débourse gros chaque année. Le repas cadeau de cette famille est offert dès la première semaine du mois sacré. Notre technicien révèle que son épouse se prémunit bien avant le jour "j". Le couple vote un budget d'au moins 75.000 Fcfa. "Mes parents sont habitués à recevoir mes plats. Je lutte pour maintenir la tradition que j'ai instaurée", commente avec fierté Mme Sylla qu'accompagne son mari au marché.
A l'approche de l'heure de la rupture du jeûne, deux plats de viande garnie de fritures atterrissent à côté du vieux Soungalo, âgé de 72 ans. Mon amie Mariam avait tenu à me conduire auprès de son grand-père pour assister à l'arrivée des repas spéciaux offerts au sage par ses nombreuses belles-filles et autres alliés. Il savourait paisiblement ses mets, symbole de haute considération et de mérites reconnus dans le maintien de la cohésion familiale. Les donatrices du jour sont deux belles-filles qui manifestent leur attention particulière à leur belle famille.
Le repas spécial dans l'esprit de toutes les femmes mariées est une épreuve de visibilité dans la grande famille africaine. Ce plat très particulier prouve que "je suis une femme idéale", atteste l'une des belle-filles du doyen Soungalo, qui a préféré garder l'anonymat.
La nouvelle mariée Aissata figurait dans le lot de la vague 2009 des mariées du "sounkalo makono" passé (le mois précédent le Ramadan). « C'est le moment idéal pour attirer l'affection des membres de ma nouvelle famille », souligne la "kognomousso". Elle bénéficie pour cette première fois de l'aide de quelques amies encore célibataires. Le groupe est en train de concocter un énorme plat de boulettes de viande épicée, destiné à ses beaux-parents. Les ingrédients entassés autour de ces femmes donne une idée de l'importance du budget spécial englouti au marché.
Le menu spécial s’égrène tout le mois de ramadan. Il est surtout composé de poisson, de viande, de poulet, de pintades. Les garnitures sont à base de pommes de terre, d'ignames, de banane plantain. Ce choix selon les explications, n'est pas fortuit. Aïssata soutient que ce choix permet de rompre avec le repas ordinaire de riz ou de gâteau de mil.
Les ego des couples ne semblent pas souffrir de la crise financière qui frappe le trésor public du pays. La vue de certains repas spéciaux heurte la bienséance. L'orgie et le gâchis inconsciemment tolérés pendant le ramadan contribueront à déséquilibrer longtemps des milliers de couples. Et dire que l'Islam prohibe l'ostentation !
Auteur : Hadeye Traoré - 11/09/2009
Source : L'essor