Un point sur l’avancement du projet AMIF a été fait lundi 21 janvier à l'UNESCO. Autour de l’essayiste Hakim El Karoui, on comptait des personnalités de la société civile et du monde religieux. De g. à dr. : Tarik Abou Nour, Hakim El Karoui, Abdelhaq Nabaoui, Mohamed Chirani, Mohamed Bajrafil, Tareq Oubrou et Sadek Beloucif.
La structuration de l’Association musulmane pour l’islam de France (AMIF) se fait attendre mais Hakim El Karoui l’assure : les statuts seront déposés « dans quelques jours ». « Nous ne croyons pas pouvoir tout faire d'un coup », signifie l’essayiste, auteur de deux rapports pour l’Institut Montaigne, face aux journalistes venus à la conférence de presse organisée lundi 21 janvier à l’UNESCO.
Avec Hakim El Karoui, on comptait onze personnalités de la société civile et du monde religieux, parmi lesquelles le médecin Sadek Beloucif, le comédien Farid Abdelkrim, l’avocat Hosni Maati, le recteur de la mosquée de Bordeaux Tareq Oubrou, l’imam de la mosquée d’Ivry-sur-Seine Mohamed Bajrafil, le théologien Tarik Abou Nour et l’aumônier militaire et hospitalier Abdelhaq Nabaoui.
Hakim El Karoui « n'a pas plus de poids que le reste du groupe », défend Mohamed Bajrafil, insistant sur la dimension collective du travail de structuration de l’AMIF.
Avec Hakim El Karoui, on comptait onze personnalités de la société civile et du monde religieux, parmi lesquelles le médecin Sadek Beloucif, le comédien Farid Abdelkrim, l’avocat Hosni Maati, le recteur de la mosquée de Bordeaux Tareq Oubrou, l’imam de la mosquée d’Ivry-sur-Seine Mohamed Bajrafil, le théologien Tarik Abou Nour et l’aumônier militaire et hospitalier Abdelhaq Nabaoui.
Hakim El Karoui « n'a pas plus de poids que le reste du groupe », défend Mohamed Bajrafil, insistant sur la dimension collective du travail de structuration de l’AMIF.
L’AMIF veut agir sur le volet financier et religieux de l’islam de France
L’AMIF est ainsi présentée comme « un tiers de confiance au service des fidèles et des opérateurs des marchés liés au culte musulman », dont le travail est, selon les mots de Hakim El Karoui, « fondé sur un savoir-faire professionnel et l’absence de conflit d’intérêts » dans le but de « permettre l’insertion paisible de l’islam dans la République ».
Le paysage idéal de l’organisation musulmane en France dessiné par les promoteurs de l’AMIF est structuré par quatre piliers. Tandis que le volet culturel est assuré par la Fondation de l’islam de France, le volet institutionnel est conservé par le Conseil français du culte musulman (CFCM). « On ne remet pas en cause la capacité de représentation institutionnelle du CFCM, il peut représenter les mosquées », souligne Hakim El Karoui.
Mais s’agissant du volet financier, c’est à l’AMIF de l’assurer, fait-on soigneusement comprendre, quand bien même le CFCM a créé, en août 2018, son association pour le financement du culte musulman, toujours non opérationnelle à ce jour. Entre l’AMIF et l’AFSCM, « que le meilleur gagne », se contente de dire Hakim El Karoui. Mais les promoteurs de l’AMIF, avec un optimisme tout affiché à ce stade, entendent bien réussir là où le CFCM s’enlise depuis des années. « Si l’AMIF réussit à s’installer comme un tiers de confiance, on peut imaginer un budget de 10 millions d'euros » à l’année, estime l’essayiste.
Mais s’agissant du volet financier, c’est à l’AMIF de l’assurer, fait-on soigneusement comprendre, quand bien même le CFCM a créé, en août 2018, son association pour le financement du culte musulman, toujours non opérationnelle à ce jour. Entre l’AMIF et l’AFSCM, « que le meilleur gagne », se contente de dire Hakim El Karoui. Mais les promoteurs de l’AMIF, avec un optimisme tout affiché à ce stade, entendent bien réussir là où le CFCM s’enlise depuis des années. « Si l’AMIF réussit à s’installer comme un tiers de confiance, on peut imaginer un budget de 10 millions d'euros » à l’année, estime l’essayiste.
Une AMIF à trois têtes
A l’intérieur de l’AMIF, deux associations sont en cours de création : l’une sous le régime de la loi de 1905 qui sera chargée du cultuel et qui fonctionnera grâce à des dons et des legs qu’elle entend réinvestir dans la production et la diffusion d’un discours religieux, « bien plus que dans la construction de mosquées ».
En parallèle, une association soumise à la loi de 1901 sera chargé des affaires culturelles. Son travail sera essentiellement tourné vers la régulation des marchés du pèlerinage et du halal, minés par « le manque de transparence et de professionnalisme » doublé de « conflits d’intérêts à tous les étages », soulève Hakim El Karoui. Les taxes que l’AMIF pourrait tirer des opérateurs ainsi que les marges tirées du travail d’accréditation et des services permettront d’investir dans les activités qui ne relèvent pas du religieux.
Sont cités particulièrement la lutte contre les discriminations, l’amélioration de l'image de l’islam en France et la lutte contre la radicalisation. Sur ce point, « il ne s’agit pas de se substituer à ce que fait l’Etat », souligne Farid Abdelkrim, qui décrit une AMIF qui se propose d’investir aussi bien « le champ du réel et celui du virtuel ».
« Le vide idéologique a permis à l’idéologie salafiste jihadiste de se répandre à une telle rapidité et je crois qu’aujourd’hui le grand défi sera la capacité à diffuser un islam accessible et compatible avec le vivre-ensemble en France, pour la jeunesse », assure, pour sa part, Mohamed Chirani, ex-consultant chargé de la prévention de la radicalisation.
En parallèle, une association soumise à la loi de 1901 sera chargé des affaires culturelles. Son travail sera essentiellement tourné vers la régulation des marchés du pèlerinage et du halal, minés par « le manque de transparence et de professionnalisme » doublé de « conflits d’intérêts à tous les étages », soulève Hakim El Karoui. Les taxes que l’AMIF pourrait tirer des opérateurs ainsi que les marges tirées du travail d’accréditation et des services permettront d’investir dans les activités qui ne relèvent pas du religieux.
Sont cités particulièrement la lutte contre les discriminations, l’amélioration de l'image de l’islam en France et la lutte contre la radicalisation. Sur ce point, « il ne s’agit pas de se substituer à ce que fait l’Etat », souligne Farid Abdelkrim, qui décrit une AMIF qui se propose d’investir aussi bien « le champ du réel et celui du virtuel ».
« Le vide idéologique a permis à l’idéologie salafiste jihadiste de se répandre à une telle rapidité et je crois qu’aujourd’hui le grand défi sera la capacité à diffuser un islam accessible et compatible avec le vivre-ensemble en France, pour la jeunesse », assure, pour sa part, Mohamed Chirani, ex-consultant chargé de la prévention de la radicalisation.
Quant à la lutte contre les discriminations, l’avocat Hosni Maati évoque la possibilité pour l’AMIF, dans sa phase opérationnelle, de « se constituer partie civile pour des faits d’islamophobie mais aussi d’antisémitisme » afin d’« assurer la cohésion nationale et assurer l’effectivité du terme fraternité » présent dans la devise française.
Un conseil théologique, « épine dorsale de l’islam de France »
« On ne dit pas qu’il faut interdire le financement étranger mais on pense qu’il faut créer un écosystème français car c’est comme cela qu’on répondra aux principaux défis auxquels est confronté l’islam de France », précise Hakim El Karoui, qui souhaite faire de l’AMIF « un certificateur des certificateurs » du halal ou encore « un CSA du pèlerinage » grâce à « la légitimité que les musulmans nous donneront ».
Avec les deux associations, qui devraient compter en leur sein 25 administrateurs dans chaque conseil d’administration, un conseil théologique « indépendant » est « en cours de construction » avec un noyau dur constitué « entre six et dix théologiens ».
Parce que « l'illusion de la connaissance est plus dangereuse que l'ignorance », indique Abdelnor Chehlaoui, ce conseil se révèle essentiel dans le cadre de la structuration de l’AMIF. « Le discours religieux est l’épine dorsale d'un islam de France apaisé, serein et qui répond aux besoins d’un contexte très spécifique, celui de la France », déclare le théologien Tarik Abou Nour, dont le travail autour du statut des imams est son cheval de bataille tant la précarité de ces ministres du culte demeure importante.
Avec les deux associations, qui devraient compter en leur sein 25 administrateurs dans chaque conseil d’administration, un conseil théologique « indépendant » est « en cours de construction » avec un noyau dur constitué « entre six et dix théologiens ».
Parce que « l'illusion de la connaissance est plus dangereuse que l'ignorance », indique Abdelnor Chehlaoui, ce conseil se révèle essentiel dans le cadre de la structuration de l’AMIF. « Le discours religieux est l’épine dorsale d'un islam de France apaisé, serein et qui répond aux besoins d’un contexte très spécifique, celui de la France », déclare le théologien Tarik Abou Nour, dont le travail autour du statut des imams est son cheval de bataille tant la précarité de ces ministres du culte demeure importante.
Outre l’insuffisance du nombre d’imams en France et l’ingérence étrangère que ce problème génère, Tarik Abou Nour déplore « le désordre dans les fatwas (avis religieux, ndlr) et dans l’accaparement de responsabilités et de compétences qui ne sont pas les leurs » par des imams autoproclamés. Pour lui, l’AMIF met un point d’honneur à « respecter les spécialités de chacun ».
Le conseil religieux se veut « pluriel, reflet de la diversité des musulmans de France », « ouvert aux femmes » et à « des personnalités désignées pour leur expertise sans qu'ils n'aient de fonctions religieuses stricto sensu ». A ce titre, « nous n'excluons personne à partir du moment qu'ils (les aspirants membres au conseil, ndlr) ont la bonne compétence », rappelle Mohamed Bajrafil.
Il sera notamment doté d’un « comité de la pastorale, de la prédication (…) chargé de définir le temps liturgique, et établissant des règles générales pour le sermon du vendredi et le fonctionnement de la prédication », un comité sur la formation des cadres religieux – « un besoin impérieux » pour Abdelhaq Nabaoui – ou encore un comité sur le dialogue interconvictionnel.
Le conseil religieux se veut « pluriel, reflet de la diversité des musulmans de France », « ouvert aux femmes » et à « des personnalités désignées pour leur expertise sans qu'ils n'aient de fonctions religieuses stricto sensu ». A ce titre, « nous n'excluons personne à partir du moment qu'ils (les aspirants membres au conseil, ndlr) ont la bonne compétence », rappelle Mohamed Bajrafil.
Il sera notamment doté d’un « comité de la pastorale, de la prédication (…) chargé de définir le temps liturgique, et établissant des règles générales pour le sermon du vendredi et le fonctionnement de la prédication », un comité sur la formation des cadres religieux – « un besoin impérieux » pour Abdelhaq Nabaoui – ou encore un comité sur le dialogue interconvictionnel.
Une implication des acteurs « au service de l’islam et de la France »
« Nous ne disputons la représentativité ni la représentation des musulmans à quelque organisation théologique ou associative que ce soit. Nous ne cherchons pas à avoir le monopole de la pensée », indique l’imam de la mosquée d’Ivry-sur-Seine, qui dit s’être impliqué dans l’AMIF dans l'optique de « travailler pour nos enfants ». « Je n’ai pas envie que mes enfants et tous ceux des générations qui viennent après la nôtre aient à se poser des questions à savoir si leur islamité cadre avec leur francité. C’est la raison pour laquelle, avec des amis, je me suis embarqué sur le bateau de l’AMIF dont j’espère qu’il arrivera à bon port. »
À leurs détracteurs qui sont « dans une démarche d’exclusion », adoptant l’expression « soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre les intérêts des musulmans », il martèle : « Les personnes qui sont là n’ont aucun intérêt si ce n’est de servir leur religion et leur pays. Je n’ai rien à gagner dans cette affaire. (...) Si on voulait tenir compte de ce qui se dit dans les réseaux sociaux, on a plus à perdre qu’à gagner... » en s’impliquant dans le projet de l’AMIF. Et Tareq Oubrou de conclure : il s’agit d’« une initiative de démocratie par le bas » avec « des musulmans qui se sont pris en charge ».
Le projet de l’AMIF se veut résolument ambitieux. Reste à voir dans quelle mesure les ambitions affichées par ses instigateurs vont pouvoir se concrétiser, dans un contexte où le leadership musulman est âprement disputé depuis des mois.
À leurs détracteurs qui sont « dans une démarche d’exclusion », adoptant l’expression « soit vous êtes avec nous, soit vous êtes contre les intérêts des musulmans », il martèle : « Les personnes qui sont là n’ont aucun intérêt si ce n’est de servir leur religion et leur pays. Je n’ai rien à gagner dans cette affaire. (...) Si on voulait tenir compte de ce qui se dit dans les réseaux sociaux, on a plus à perdre qu’à gagner... » en s’impliquant dans le projet de l’AMIF. Et Tareq Oubrou de conclure : il s’agit d’« une initiative de démocratie par le bas » avec « des musulmans qui se sont pris en charge ».
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Pourquoi ils ont choisi de s’impliquer dans l’AMIF
Ibrahim Keita Sorel, dirigeant associatif : « J’ai rejoint le projet car j’ai été sensible par la diversité des acteurs. C’est une des rares fois où on a un projet dans lequel se côtoient des acteurs de la société civile, des cadres religieux (…) avec un projet qui vise à rendre service aux fidèles (…) et qui soit attaché à éviter les conflits d’intérêts et à faciliter l’insertion paisible de l’islam dans notre pays. »
Farid Abdelkrim : « J’ai rejoint l'AMIF car j’ai le sentiment d’avoir personnellement une part de responsabilité dans le désordre qui nous occupe en ce moment en France dès qu’il s’agit d’islam. À un petit niveau mais j’ai quand même ma part de responsabilité puisque j'ai passé une quinzaine d’années chez les Frères musulmans (Musulmans de France), que j’ai été président des Jeunes musulmans de France et je considère que j’ai contribué à faire en sorte que l’islam soit devenue une religion en France qui (...) ne parle plus à beaucoup de monde. L’idée centrale pour moi, c’est comment faire en sorte que cette religion puisse à nouveau parler à un certain nombre de gens. »
Mohamed Bajrafil : « Nous sommes un groupe de personnes, d’hommes et de femmes épris d’amour à la fois pour leur religion et pour leur patrie et qui essayent, avec les moyens qui sont les leurs (de faire émerger l’AMIF), convaincus que leur devoir est de proposer quelque chose qui, pour eux, serait à même de répondre au double défi de la francité et de l’islamité, étant convaincus qu’on n’a pas à choisir entre être Français et être musulman. »
Ibrahim Keita Sorel, dirigeant associatif : « J’ai rejoint le projet car j’ai été sensible par la diversité des acteurs. C’est une des rares fois où on a un projet dans lequel se côtoient des acteurs de la société civile, des cadres religieux (…) avec un projet qui vise à rendre service aux fidèles (…) et qui soit attaché à éviter les conflits d’intérêts et à faciliter l’insertion paisible de l’islam dans notre pays. »
Farid Abdelkrim : « J’ai rejoint l'AMIF car j’ai le sentiment d’avoir personnellement une part de responsabilité dans le désordre qui nous occupe en ce moment en France dès qu’il s’agit d’islam. À un petit niveau mais j’ai quand même ma part de responsabilité puisque j'ai passé une quinzaine d’années chez les Frères musulmans (Musulmans de France), que j’ai été président des Jeunes musulmans de France et je considère que j’ai contribué à faire en sorte que l’islam soit devenue une religion en France qui (...) ne parle plus à beaucoup de monde. L’idée centrale pour moi, c’est comment faire en sorte que cette religion puisse à nouveau parler à un certain nombre de gens. »
Mohamed Bajrafil : « Nous sommes un groupe de personnes, d’hommes et de femmes épris d’amour à la fois pour leur religion et pour leur patrie et qui essayent, avec les moyens qui sont les leurs (de faire émerger l’AMIF), convaincus que leur devoir est de proposer quelque chose qui, pour eux, serait à même de répondre au double défi de la francité et de l’islamité, étant convaincus qu’on n’a pas à choisir entre être Français et être musulman. »
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