Le Vatican appelle les musulmans, notamment ceux qui sont engagés dans le dialogue interreligieux, à « condamner sans conditions, ni ambiguïté » le drame des chrétiens d'Irak. Les musulmans condamnent avec force et clarté ces crimes et dénoncent l'invocation délirante de la religion pour les justifier. Dire notre solidarité et exprimer notre sentiment horrifié et ému au sujet des exactions commises contre les chrétiens d'Orient est un devoir. Les populations musulmanes d'Irak refusent de voir disparaître une partie d'eux-mêmes. Reste que trois points méritent une clarification.
Le premier a trait au risque d'amalgame. Le fait que les appels lient la dénonciation du drame des chrétiens d'Irak à la crédibilité des musulmans pose un grave problème, comme si l'usurpation du nom par des fous criminels était de notre responsabilité et comme si les autorités musulmanes étaient muettes. Cela ne correspond pas à la réalité. Depuis l'apparition de ces sectes monstrueuses, les élites musulmanes les dénoncent. L'inquisition n'est pas plus dans l'Evangile que le terrorisme ne l'est dans le Coran.
En tant que citoyens de confession musulmane nous sommes opposés à l'usurpation du nom de l'islam qui secrète cet amalgame abject. Nous devons faire preuve de discernement en évaluant les sombres vingt dernières années face à quinze siècles d'histoire. Les musulmans, héritiers d'une civilisation universelle et épris de liberté, de paix et de justice, souffrent de cet injustifiable amalgame.
Le deuxième point concerne les causes. Ne pas faire allusion aux causes du drame, c'est indirectement accuser la société musulmane. Le vivre-ensemble entre les chrétiens et musulmans de l'Orient est millénaire, malgré des tensions passagères. Il a fallu la guerre d'Afghanistan, l'invasion de l'Irak, les ingérences et les manipulations, la contrefaçon de la religion par des régimes archaïques, pour voir proliférer des sectes barbares.
Les groupes terroristes, surmédiatisés, sèment le chaos. Ils nuisent aux musulmans, aux valeurs abrahamiques, au patrimoine commun. Ils font le jeu de ceux qui divisent pour régner, qui s'inventent un nouvel ennemi pour asseoir leur hégémonie. Ils cherchent à nous couper du monde, à annihiler toute perspective de démocratisation. Cela encourage l'islamophobie et le prétendu choc des civilisations. Dans toutes les régions du monde où les terroristes sévissent, les chiffres sont éloquents : pour 100 victimes assassinées par eux plus de 90 sont musulmanes ! Le fait est éloquent.
Le premier a trait au risque d'amalgame. Le fait que les appels lient la dénonciation du drame des chrétiens d'Irak à la crédibilité des musulmans pose un grave problème, comme si l'usurpation du nom par des fous criminels était de notre responsabilité et comme si les autorités musulmanes étaient muettes. Cela ne correspond pas à la réalité. Depuis l'apparition de ces sectes monstrueuses, les élites musulmanes les dénoncent. L'inquisition n'est pas plus dans l'Evangile que le terrorisme ne l'est dans le Coran.
En tant que citoyens de confession musulmane nous sommes opposés à l'usurpation du nom de l'islam qui secrète cet amalgame abject. Nous devons faire preuve de discernement en évaluant les sombres vingt dernières années face à quinze siècles d'histoire. Les musulmans, héritiers d'une civilisation universelle et épris de liberté, de paix et de justice, souffrent de cet injustifiable amalgame.
Le deuxième point concerne les causes. Ne pas faire allusion aux causes du drame, c'est indirectement accuser la société musulmane. Le vivre-ensemble entre les chrétiens et musulmans de l'Orient est millénaire, malgré des tensions passagères. Il a fallu la guerre d'Afghanistan, l'invasion de l'Irak, les ingérences et les manipulations, la contrefaçon de la religion par des régimes archaïques, pour voir proliférer des sectes barbares.
Les groupes terroristes, surmédiatisés, sèment le chaos. Ils nuisent aux musulmans, aux valeurs abrahamiques, au patrimoine commun. Ils font le jeu de ceux qui divisent pour régner, qui s'inventent un nouvel ennemi pour asseoir leur hégémonie. Ils cherchent à nous couper du monde, à annihiler toute perspective de démocratisation. Cela encourage l'islamophobie et le prétendu choc des civilisations. Dans toutes les régions du monde où les terroristes sévissent, les chiffres sont éloquents : pour 100 victimes assassinées par eux plus de 90 sont musulmanes ! Le fait est éloquent.
L'universalité comme horizon
Troisièmement, nous devons dénoncer les atteintes aux droits de l'homme et les crimes de guerres, partout dans le monde, sans faire de diversion, ni hiérarchiser les drames. Nous souffrons des crimes et de la situation d'apartheid que subissent les Palestiniens, chrétiens et musulmans. Gaza est bombardé, agressé, sous blocus, et l'islamophobie enfle en Europe, mais ne sommes pas sélectifs en matière de solidarité.
Les chrétiens d'Orient n'ont rien à voir avec les xénophobes et autres agresseurs qui se réclament de la culture judéo-chrétienne. Tout comme les musulmans d'Europe et du monde ne sont pas comptables des errements de ceux qui dévoient l'islam. Les sectes criminelles ne doivent pas servir de prétexte au recul du dialogue et du vivre- ensemble, ni faire oublier les autres drames et crimes contre l'humanité.
L'Occident doit savoir que saint François d'Assise, Gandhi ou Martin Luther King pourraient aussi bien être musulmans. La culture humaniste de l'islam, le respect d'autrui, la liberté de conscience et du dialogue que le Prophète a léguée est trahie par les extrémistes. Il est inadmissible que l'on puisse s'en prendre à des citoyens en raison de leurs convictions. Les chrétiens ont droit à une protection, en fidélité aux principes coraniques et aux recommandations du Prophète, qui prône une fraternité universelle excluant toute discrimination.
L'Eglise d'Orient a survécu tout autant grâce à la volonté des communautés chrétiennes de vouloir continuer d'exister que par respect pour la pluralité. En terre d'islam se réfugiaient des minorités religieuses persécutées. Il y a 150 ans, l'émir Abdelkader au nom de l'humanisme musulman sauvait des milliers de chrétiens à Damas face à la folie sectaire. Nous proclamons notre solidarité aux chrétiens d'Orient et à la juste cause du peuple palestinien. L'universalité est notre horizon.
Première parution de cet article dans Le Monde, le 25 août 2014.
*****
Mustapha Cherif est philosophe, professeur des Universités, lauréat 2013 du prix UNESCO du dialogue des cultures, directeur scientifique du master en Études arabes et islamiques de la UOC, auteur de nombreux ouvrages, dont Le Principe du juste milieu. Albouraq, 2014).
Les chrétiens d'Orient n'ont rien à voir avec les xénophobes et autres agresseurs qui se réclament de la culture judéo-chrétienne. Tout comme les musulmans d'Europe et du monde ne sont pas comptables des errements de ceux qui dévoient l'islam. Les sectes criminelles ne doivent pas servir de prétexte au recul du dialogue et du vivre- ensemble, ni faire oublier les autres drames et crimes contre l'humanité.
L'Occident doit savoir que saint François d'Assise, Gandhi ou Martin Luther King pourraient aussi bien être musulmans. La culture humaniste de l'islam, le respect d'autrui, la liberté de conscience et du dialogue que le Prophète a léguée est trahie par les extrémistes. Il est inadmissible que l'on puisse s'en prendre à des citoyens en raison de leurs convictions. Les chrétiens ont droit à une protection, en fidélité aux principes coraniques et aux recommandations du Prophète, qui prône une fraternité universelle excluant toute discrimination.
L'Eglise d'Orient a survécu tout autant grâce à la volonté des communautés chrétiennes de vouloir continuer d'exister que par respect pour la pluralité. En terre d'islam se réfugiaient des minorités religieuses persécutées. Il y a 150 ans, l'émir Abdelkader au nom de l'humanisme musulman sauvait des milliers de chrétiens à Damas face à la folie sectaire. Nous proclamons notre solidarité aux chrétiens d'Orient et à la juste cause du peuple palestinien. L'universalité est notre horizon.
Première parution de cet article dans Le Monde, le 25 août 2014.
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Mustapha Cherif est philosophe, professeur des Universités, lauréat 2013 du prix UNESCO du dialogue des cultures, directeur scientifique du master en Études arabes et islamiques de la UOC, auteur de nombreux ouvrages, dont Le Principe du juste milieu. Albouraq, 2014).
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