' Une opération cosmétique ', c’est en ces termes que Yasser Arafat a qualifié la libération d’environ 350 prisonniers palestiniens sur les 7700 détenus dans les prisons israéliennes. Dans chacun des cinq points désignés, dont quatre en Cisjordanie et un dans la Bande de Gaza, les prisonniers ont pu retrouver les leurs sans difficulté. Les manifestations de joie furent brèves car 95% des détenus sont toujours incarcérés en Israël.
La liberté sur la ' feuille de route '
Un responsable du Jihad islamique dénonce la ' machination '. Selon Abaou Chanab, responsable du Hamas, le nombre est ridicule et sans valeur: 'Nous n'acceptons pas (...) les stratagèmes de Sharon' dit-il. Pendant ce temps, M. Ramtisi, chef politique du Hamas, a déclaré que : ' si Israël ne libère pas tous les prisonniers, ce sera la fin de la trêve '. De son côté, M Abu Mazen, Premier ministre palestinien a protesté contre ce faible taux de libération en annulant des entretiens prévus avec M. Ariel Sharon.
Cette libération de centaines de détenus palestiniens survient au moment où les mouvements de la résistance palestinienne ont décrété une trêve unilatérale dans le sens de la ' feuille de route '. Ce plan de paix préparé par les E.U, l’Europe, les Nations Unis et la Russie exigeait des aménagements dans la classe politique palestinienne (d’où la nomination d’un Premier Ministre), l’arrêt de l’implantation des colonies israéliennes en même temps que l’arrêt des opérations armées palestiniennes et la libération des prisonniers palestiniens.
A l’image de la question des réfugiés, le problème des prisonniers en Israël est cruciale en Palestine. Un Secrétariat d’Etat tenu par M Ziad Abou Ein est chargé de cette question.
Un rapport de la Fédération Internationale de Droits de l’Homme (FIDH) publié en Juillet 2003, sur les conditions de détentions des prisonniers palestiniens se révèle accablant pour les autorités israéliennes. Les motifs d’arrestation ou d’incarcération, lorsqu’ils existent et qu’ils sont exprimés répondent souvent à une législation mouvante fixée au gré des intérêts de la puissance dominante. A l’intérieur des prisons, l’isolement, la privation de visites, l’absence de soins, la torture physique et psychologique sont courantes. Des organisations des droits de l’homme ont condamné la détention prolongée en Israël de nombreux Palestiniens qui n'ont eu droit à aucun procès depuis le début de l'intifada en septembre 2000. Cette situation est maintenue en vertu de la mesure dite ' d’internement ', aussi appelée ' détention administrative '. Un terme qui recouvre des emprisonnements individuels sans inculpations ni procès.
Le Likoud et l’esplanade des mosquées
Sur les 350 prisonniers relâchés, la moitié l’auraient été d'ici la fin de l'année. 51 d’entre eux aurait été libérés en 2004. Il s'agit donc d'une libération anticipée qui ne concerne que des activistes non impliqués dans des questions plus sérieuses. 89 d'entre les personnes libérées sont du Fatah, 64 du Hamas et 24 du Jihad islamique.
En retrouvant les leurs, certains ex-détenus ont baisé le sol, d’autres ont fondu en larmes et dans les bras de leurs parents, sous les slogans hostiles à Israel : ' ma joie sera totale lorsque tous mes camarades auront été libérés ' a déclaré un ex-détenu de 21 ans.
Pour le citoyen israélien, cette libération intervient à la veille du Tisha B'Av, commémorant les deux destructions des premiers temples juifs (586 av. J.-C. et an 70 après). A cette occasion, des députés du Likoud, le parti d’Ariel Sharon, ont tenté de se rendre sur l’esplanade des mosquées. Un impressionnant dispositif de sécurité les en a empêchés.
En septembre 2000, une visite d’Ariel Sharon sur l’esplanade des mosquées avait donné le signal de départ de la seconde intifada. Au moment où l’armée israélienne empêche l’immense majorité des palestiniens de se rendre sur l’esplanade des mosquées, les militants interprètent comme une offense toute visite spectaculaire d’israélien sur ce lieu plein de symboles historiques.