Le 22 mars sort en salles le documentaire « Islam pour mémoire », de Bénédicte Pagnot (Photo ©.Mille et Une.Films)
Sa voix s’est éteinte le 6 novembre 2014. Auteur (ou co-auteur) de près d’une trentaine d’ouvrages, producteur et animateur de l’émission radiophonique « Cultures d’islam » pendant plus de dix ans (ensuite reprise par Abdennour Bidar puis par Ghaleb Bencheikh), Abdelwahab Meddeb reprend vie dans le documentaire de Bénédicte Pagnot, qui sort en salles ce mercredi 22 mars. Sa voix et sa pensée nous accompagnent tout au long de voyages en pays d’islam.
Celui qui fut fils et petit-fils de cheikhs ayant exercé à la Grande Mosquée et université de la Zitouna (Tunisie), lui qui apprit le Coran dès l’âge de quatre ans, nous dit : « En apprenant le Coran, j’avais l’impression de cheminer dans une forêt ténébreuse, avec des trouées qui projetaient la lumière de jour sur des parcelles de sens. »
Celui qui fut fils et petit-fils de cheikhs ayant exercé à la Grande Mosquée et université de la Zitouna (Tunisie), lui qui apprit le Coran dès l’âge de quatre ans, nous dit : « En apprenant le Coran, j’avais l’impression de cheminer dans une forêt ténébreuse, avec des trouées qui projetaient la lumière de jour sur des parcelles de sens. »
C’est à cette quête de sens, dans les méandres de l’Histoire de la pensée et des civilisations islamiques qu’invite la réalisatrice d’« Islam pour mémoire ». Se déclarant « française et athée », prenant « conscience de l’ignorance de mon ignorance de l’islam », Bénédicte Pagnot emploie résolument le « je » et sa subjectivité pour nous emmener dans sa propre quête de réponses, qui fait se confronter la complexité de la pensée d’Abdelwahab Meddeb à la réalité du monde. En étant co-voyageur avec la réalisatrice, le spectateur peut ainsi interroger sa propre subjectivité, ses aprioris et (r)éveiller son appétit d'interconnaissance.
Au-delà de ses positions politiques controversées durant le printemps arabe, c’est donc l’intellectuel, le romancier et le poète que l’on retient dans ce film. Depuis le décès d’Abdelwahab Meddeb, il y a eu la prise de pouvoir de l’organisation de l’Etat islamique en « Orient » et les attentats commis en son nom en « Occident ». Or, pour ne pas tomber dans la facile idéologie du clash des civilisations entre Orient et Occident et dans la théorie du grand remplacement en Europe, les paroles du penseur (re)deviennent d’une profonde acuité : « Le drame de nos sociétés, c’est le triomphe de l’homogène », déclare-t-il, pourfendant les « assassins de l’altérité que sont les islamistes, les jihadistes, les takfiristes ». « Une des façons de lutter contre l’intégrisme, c’est de reconnaître dans l’islam sa diversité et ses apports à l’universalité. Pour ce faire, il faut l’approcher comme civilisation et comme religion, avant de prendre en considération sa vocation politique et guerrière. »
En cette période électorale, il est bon de réécouter sa chronique du 28 avril 2012 : « Un Français sur cinq vote pour un parti xénophobe, nationaliste. (…) Enfants du monde, nous apportons notre singularité enrichie des autres. Toutes les valeurs se fécondent et se transfigurent. C’est cette belle aventure qui fait peur et aux islamistes et aux nationalistes. »
Par-delà un documentaire sur Abdelwahab Meddeb et ses prises de position, « Islam pour mémoire » peut avoir une portée plus universelle en engageant une réflexion sur la société que nous voulons construire ensemble, non fondée sur les clivages et les antagonismes, mais enrichie de nos apports respectifs, y compris ceux qui proviennent de l’Islam avec un grand I.
Au-delà de ses positions politiques controversées durant le printemps arabe, c’est donc l’intellectuel, le romancier et le poète que l’on retient dans ce film. Depuis le décès d’Abdelwahab Meddeb, il y a eu la prise de pouvoir de l’organisation de l’Etat islamique en « Orient » et les attentats commis en son nom en « Occident ». Or, pour ne pas tomber dans la facile idéologie du clash des civilisations entre Orient et Occident et dans la théorie du grand remplacement en Europe, les paroles du penseur (re)deviennent d’une profonde acuité : « Le drame de nos sociétés, c’est le triomphe de l’homogène », déclare-t-il, pourfendant les « assassins de l’altérité que sont les islamistes, les jihadistes, les takfiristes ». « Une des façons de lutter contre l’intégrisme, c’est de reconnaître dans l’islam sa diversité et ses apports à l’universalité. Pour ce faire, il faut l’approcher comme civilisation et comme religion, avant de prendre en considération sa vocation politique et guerrière. »
En cette période électorale, il est bon de réécouter sa chronique du 28 avril 2012 : « Un Français sur cinq vote pour un parti xénophobe, nationaliste. (…) Enfants du monde, nous apportons notre singularité enrichie des autres. Toutes les valeurs se fécondent et se transfigurent. C’est cette belle aventure qui fait peur et aux islamistes et aux nationalistes. »
Par-delà un documentaire sur Abdelwahab Meddeb et ses prises de position, « Islam pour mémoire » peut avoir une portée plus universelle en engageant une réflexion sur la société que nous voulons construire ensemble, non fondée sur les clivages et les antagonismes, mais enrichie de nos apports respectifs, y compris ceux qui proviennent de l’Islam avec un grand I.
PROJECTIONS-DÉBATS
Plusieurs séances du film « Islam pour mémoire » sont suivies d’un débat.
• Mercredi 22 mars, à 21h au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : première en présence de la réalisatrice Bénédicte Pagnot et de l’équipe du film
• Vendredi 24 mars, à 20 h 30, au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : séance suivie d’une discussion avec Lucette Valensi, historienne et directrice d’études émérite de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), « Islam éclairé contre islam fanatique »
• Vendredi 24 mars, à 14 h 30 au Ciné Toboggan à Décines : dans le cadre de Les Ecrans du Doc - 7e édition, séance suivie d’un café-discussion au bar du centre culturel
• Dimanche 26 mars, à 11 h, au Cinema Escurial (Paris 13e) : séance suivie d’une rencontre avec la réalisatrice Bénédicte Pagnot dans le cadre des « Dimanches du documentaire ».
• Mardi 11 avril, au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : débat avec Jérôme Prieur, écrivain et cinéaste, auteur avec Gérard Mordillat de « Jésus selon Mahomet » (Éd. du Seuil), auteur de la série « Jésus et l'Islam » (Arte France-Archipel 33), et Gilles Padovani, producteur de « Les origines judéo-chrétiennes de l'Islam ».
Programmation complète ici
Plusieurs séances du film « Islam pour mémoire » sont suivies d’un débat.
• Mercredi 22 mars, à 21h au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : première en présence de la réalisatrice Bénédicte Pagnot et de l’équipe du film
• Vendredi 24 mars, à 20 h 30, au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : séance suivie d’une discussion avec Lucette Valensi, historienne et directrice d’études émérite de l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), « Islam éclairé contre islam fanatique »
• Vendredi 24 mars, à 14 h 30 au Ciné Toboggan à Décines : dans le cadre de Les Ecrans du Doc - 7e édition, séance suivie d’un café-discussion au bar du centre culturel
• Dimanche 26 mars, à 11 h, au Cinema Escurial (Paris 13e) : séance suivie d’une rencontre avec la réalisatrice Bénédicte Pagnot dans le cadre des « Dimanches du documentaire ».
• Mardi 11 avril, au cinéma Les 3 Luxembourg (Paris 6e) : débat avec Jérôme Prieur, écrivain et cinéaste, auteur avec Gérard Mordillat de « Jésus selon Mahomet » (Éd. du Seuil), auteur de la série « Jésus et l'Islam » (Arte France-Archipel 33), et Gilles Padovani, producteur de « Les origines judéo-chrétiennes de l'Islam ».
Programmation complète ici
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