Le marché du jouet ne cesse de croître (6 % à 7 % par an). Il pèse, au niveau mondial, 55 milliards de dollars (chiffres 2000) dont près de la moitié aux États-Unis. Deux multinationales Mattel et Hasbro le dominent devant les Japonais Bandaï et Tomy et un européen, la firme danoise Lego (actuellement en difficultés). Ces marques ne sont pas les seules à opérer. Des distributeurs spécialisés comme Toys R' Us ou généralistes comme Carrefour achètent directement à bon marché sur les lieux de production : en Chine essentiellement mais aussi en Thaïlande, aux Philippines, au Bangladesh, en Haïti...
En cette période de fin d’année et à l’occasion des fêtes, sur le fil du rasoir mais à l’heure, le père Noël (je veux bien entendu parler des fournisseurs et distributeurs de jouets) a fini d’ approvisionner les surfaces d’achats.
Pour faire plaisir aux petits bambins ( s’ils ont été sages… !), les parents vont casser leur tirelire et dépenser en moyenne 100 € par enfant.
IL faut savoir que la majorité de la production provient de pays asiatiques, notamment de Chine qui exporte à elle seule plus de 50% de la production mondiale. L’industrie du jouet et une industrie saisonnière où les produits ont la vie courte. La question des coûts est donc importante surtout quand la production nécessite une importante main d’œuvre. D’où les délocalisation là où les coûts de production sont les plus bas possible.
Des conditions de travail déplorables.
Devant la nécessité de réduire au maximum les coûts de production, la délocalisation vers les pays à bas salaire est devenue une règle d’or pour toutes les industries du jouet qui veulent augmenter leur chance de survie sur un marché où la concurrence est rude. Dans cette perspective, il apparaît que l’Asie, en particulier la Chine, est la destination préférée des grands industriels du secteur du jouet comme l’américain Mattel et les distributeurs généralistes comme Carrefour.
En effet c’est une région du monde où le code du travail n’est pas un obstacle à l’esclavagisme moderne de la mondialisation. et avec la fête de Noël les gros poids lourds de l’industrie, qui réalisent alors plus de 50% de leur chiffre d’affaires, sont en position de force pour imposer leurs conditions de prix, de qualité et de délai à une multitude d'ateliers de production.
Ainsi de nombreuses enquêtes1 ont révélé des conditions de travail qui dépassent l’entendement humain. Les interviews des travailleurs ont fait ressortir les longues journées de travail épuisantes : la plupart des ouvriers passent en moyenne 14 heures par jour à l’usine, parfois 18 heures quand les commandes urgentes affluent. Durant la haute saison, de juin à septembre, le repos hebdomadaire reste une notion inconnue et le paiement à la pièce, la règle...
Les salaires, parlons-en. Déjà très bas à cette période (entre 45 et 85 euros par mois), oscillent entre 25 et 45 euros en basse saison, quand les commandes se font plus rares. Ainsi, il faut à un ouvrier 2 mois en moyenne pour mettre de côté l’équivalent de la somme dépensée par les parents pour chaque enfant, soit 100 €..
Certains ne bénéficient ni de contrat de travail ni d’assurance. La plupart constatent l’absence totale de formation en matière d’hygiène et de sécurité et le non respect de certaines règles élémentaires, dans un secteur industriel où les produits chimiques et les machines peuvent s’avérer très dangereux.
Aussi, les femmes qui représentent la majorité des ouvriers, sont licenciées dès quelles ont atteint la trentaine où dès qu’elles tombent enceinte.
Vers un comportement de consommation plus social.
Au total, il apparaît qu’au moment où Barbie est synonyme de rêve pour beaucoup de petites filles, elle symbolise aussi la violation des droits sociaux de nombreux sites de production.
L’organisation mondiale du commerce refuse de combattre ces problèmes, notamment quand il s’agit d’accueillir la Chine au sein de l’organisation.
Heureusement, de nombreux mouvements et associations de consommateurs sont venus crier au scandale et dénoncé la main mise et le pouvoir de force des grandes industries du secteur du jouet. Ainsi l’année dernière avait été lancée la campagne « Exploiter n’est pas jouet » qui a visé à sensibiliser les consommateurs et à les mobiliser contre les industriels et les distributeurs.
Résultat : de plus en plus de consommateurs font la démarche d’adopter un comportement de consommation plus social et plus juste. Ceci se traduit par l’acceptation de payer un jouet un peu plus cher mais plus souvent par des mouvements de boycotte des firmes qui ne font pas assez preuve de bonne volonté pour réduire les inégalités que connaissent les ouvriers asiatiques.
L’industrie du jouet représente un oligopole d’une dizaine de marque et devant ces choix restreint, il paraît difficile de renverser la tendance en faveur d’entreprises défendant des politiques beaucoup plus équitables socialement.
Ceci signifie que le changement ne peut venir que de moi, de vous, de nous. Oui, nous avons le pouvoir d'inciter les marques et les chaînes de distribution à se soucier du respect des droits des travailleurs dans leur filière de production. Q’est ce qui est plus important, payer quelques centimes de plus pour chaque stupide jouet ou la vie des gens qui travaillent pour nous » 2 ?.
1- Enquête réalisée par le HKCIC en hiver 2001 dans 8 usines du Sud de la chine au près d’une quarantaine d’ouvriers.
2- Interrogation d’un jeune lycéen américain s’adressant aux firmes Mc Donald’s et Disney