En France, il arrive que des mots fâchent, alors on les change. Ainsi, la loi dite « séparatisme », entrée en vigueur en août 2021, a été baptisée loi « confortant le respect des principes de la République ». Mais le séparatisme, c'est quoi ?
Séparer vient du latin separo qui signifie mettre à part et s'utilise depuis 1314 pour désigner l'action de faire cesser d'être ensemble. C'est un mot qui vient aussi de nos meilleurs ennemis, les Anglais. L'adjectif separatist apparaît pour la première fois au début du XVIIe siècle pour qualifier un groupe de religieux chrétiens présents chez nos voisins anglais. En effet, le terme de séparatiste désigne les dissidents anglais ou non-conformistes, ces protestants qui ne souhaitent pas se plier aux règles de la nouvelle religion d'État, l'anglicanisme, et qui décident alors de se séparer de la société britannique en émigrant vers le Nouveau Monde où ils fondèrent les États-Unis.
C'est un mot qui fait partie de notre histoire. La Révolution française, en 1791, a séparé les pouvoirs. Le pouvoir n'est plus de droit divin, mais relève de la souveraineté de la nation. Et puis, on a séparé l'Église de l'État en 1905. Après la Seconde Guerre mondiale, le séparatisme a pris une tournure très politique. On qualifie alors de séparatiste un groupe humain possédant une homogénéité ethnique, linguistique ou religieuse, qui exprime une volonté de se détacher de l'État dont il fait partie pour constituer une entité politique autonome. De Gaulle, par exemple, employa ce terme dans un discours de 1947 pour désigner les membres du Parti communiste et les accuser d'être une menace à l'unité nationale par leur proximité avec l'Union soviétique.
Ces vingt dernières années, la notion de séparatisme a resurgi dans les débats politiques. Refuser d'obéir à la loi de la République, remettre en cause les principes et valeurs qui nous rassemblent, refuser la délibération démocratique. Eh bien ! C'est le cas de l'ultra droite, des mouvements religieux fondamentalistes, de l'ultra gauche, qui veulent imposer leur propre vision du monde de manière autoritaire, quitte à s'appuyer sur la terreur. En République, aucune communauté ne doit se soustraire à la loi commune. Le délit de séparatisme ne concerne donc pas une communauté, mais certains individus qui décident de sortir de l'universalisme républicain et de ses valeurs en s'organisant en marge de la République de manière hostile.
Après être revenu sur l'origine du mot « séparatisme » et sa balade dans l'actualité, un spécialiste nous aide à y voir encore plus clair. Ici Philippe Gaudin.
*****
Pierre Henry est le président de l’association France Fraternités, à l’initiative de la série « Les mots piégés du débat républicain », disponible également en podcast sur Beur FM.
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Séparer vient du latin separo qui signifie mettre à part et s'utilise depuis 1314 pour désigner l'action de faire cesser d'être ensemble. C'est un mot qui vient aussi de nos meilleurs ennemis, les Anglais. L'adjectif separatist apparaît pour la première fois au début du XVIIe siècle pour qualifier un groupe de religieux chrétiens présents chez nos voisins anglais. En effet, le terme de séparatiste désigne les dissidents anglais ou non-conformistes, ces protestants qui ne souhaitent pas se plier aux règles de la nouvelle religion d'État, l'anglicanisme, et qui décident alors de se séparer de la société britannique en émigrant vers le Nouveau Monde où ils fondèrent les États-Unis.
C'est un mot qui fait partie de notre histoire. La Révolution française, en 1791, a séparé les pouvoirs. Le pouvoir n'est plus de droit divin, mais relève de la souveraineté de la nation. Et puis, on a séparé l'Église de l'État en 1905. Après la Seconde Guerre mondiale, le séparatisme a pris une tournure très politique. On qualifie alors de séparatiste un groupe humain possédant une homogénéité ethnique, linguistique ou religieuse, qui exprime une volonté de se détacher de l'État dont il fait partie pour constituer une entité politique autonome. De Gaulle, par exemple, employa ce terme dans un discours de 1947 pour désigner les membres du Parti communiste et les accuser d'être une menace à l'unité nationale par leur proximité avec l'Union soviétique.
Ces vingt dernières années, la notion de séparatisme a resurgi dans les débats politiques. Refuser d'obéir à la loi de la République, remettre en cause les principes et valeurs qui nous rassemblent, refuser la délibération démocratique. Eh bien ! C'est le cas de l'ultra droite, des mouvements religieux fondamentalistes, de l'ultra gauche, qui veulent imposer leur propre vision du monde de manière autoritaire, quitte à s'appuyer sur la terreur. En République, aucune communauté ne doit se soustraire à la loi commune. Le délit de séparatisme ne concerne donc pas une communauté, mais certains individus qui décident de sortir de l'universalisme républicain et de ses valeurs en s'organisant en marge de la République de manière hostile.
Après être revenu sur l'origine du mot « séparatisme » et sa balade dans l'actualité, un spécialiste nous aide à y voir encore plus clair. Ici Philippe Gaudin.
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Pierre Henry est le président de l’association France Fraternités, à l’initiative de la série « Les mots piégés du débat républicain », disponible également en podcast sur Beur FM.
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