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Royaume-Uni : le projet d’un immense cimetière musulman au cœur d’une controverse

Rédigé par | Jeudi 26 Décembre 2024 à 12:45

           

Un projet de construction d’un cimetière privé musulman dans le Lancashire, porté par une fondation appartenant à une fratrie fortunée, est appelé à être le plus grand du Royaume-Uni, ce qui suscite l’opposition d’habitants effrayés par l'impact local d'un lieu aussi immense.



Royaume-Uni : le projet d’un immense cimetière musulman au cœur d’une controverse
Les frères Zuber et Mohsin Issa sont à la tête d’un empire pesant plusieurs milliards de livres sterling. Jusqu’à récemment co-PDG de la société EG Group (anciennement Euro Garages) qu’ils ont fondée ensemble en 2001,* ils ont fait fortune en rachetant des stations-service à travers le pays et dans le monde, puis en faisant l’acquisition de sociétés comme la grande enseigne britannique de supermarchés Asda. Une véritable success story pour cette fratrie d’origine indienne.

Avec la fondation Issa, les deux hommes ont en tête un projet qui sort indéniablement de l’ordinaire : celui de bâtir un immense cimetière privé musulman dans le Lancashire, le plus grand jamais vu au Royaume-Uni. Baptisé Memorial Garden, le lieu accueillerait 12 250 tombes, un funérarium et des salles de prière sur un terrain vaste de 18 hectares, soit 182 000 m2. Des services funéraires seront aussi proposés aux familles des défunts. Il dépasserait alors en taille et en capacité le Garden of Peace, situé dans le Grand Londres et qui est, à ce jour, depuis 2002, le plus grand cimetière privé musulman du pays. Il abrite 10 000 tombes sur près de 9 hectares (87 000 m2). Le projet des Issa a émergé en 2021, mais il a connu plusieurs soubresauts depuis.

Le projet d'origine très révisé mais toujours aussi contesté

Le Memorial Garden suscite un tollé auprès de centaines d’habitants et d’élus locaux peu enclins à voir un tel projet devenir réalité, rapporte le Daily Mail. Il va sans dire que son ampleur en fait peur plus d’un. Déjà, le lieu choisi par les porteurs du projet fait polémique. Les frères Issa proposent de construire le cimetière tout près d’Oswaldtwistle, une bourgade de l’ouest de leur ville natale de Blackburn qui compte quelque 11 000 âmes.

Une précédente demande de construction d'un cimetière musulman sur un terrain de 34 hectares pouvant abriter 35 000 sépultures avait été soumis, toujours à Oswaldtwistle. Si le projet avait été mené à terme, le cimetière musulman aurait été le plus grand d'Europe, loin derrière celui bâti à Arnhem, aux Pays-Bas (16 000 places). Il a cependant été retiré en 2022 face à la vive contestation des habitants. Le projet aujourd’hui présenté par les frères Issa est deux fois plus petit que celui d’origine mais il n’est pas moins contesté que le précédent. Bien trop grand encore. Les opposants, pour la plupart réuni autour du collectif « Dites non au cimetière » (Say no to the Cemetery) militant pour l’abandon du projet, évoquent notamment des risques d’encombrement du réseau routier et un impact non négligeable sur l’environnement et la faune locale.

« La communauté exhorte les décideurs à rejeter la demande afin de protéger la ceinture verte d'Oswaldtwistle, l'environnement et la sécurité publique », a indiqué l’élu conservateur local Steven Smithson, qui se dit notamment préoccupé « par la sécurité routière ». « L'augmentation du trafic due à des funérailles quotidiennes, avec des rassemblements comptant plus de 400 personnes lors de grands événements, mettrait à rude épreuve le réseau routier, augmentant le risque d'accidents et une augmentation des émissions de carbone. »

Par ailleurs, insiste-t-il, « le site présente un risque important de contamination des eaux souterraines en raison de sa géologie et de sa nappe phréatique élevée, ce qui fait craindre que les inhumations puissent entraîner une contamination des jardins et des cours d'eau à proximité ». Une campagne de crowdfunding visant à contester efficacement le projet a même été lancé en avril dernier. Près de 4 000 € ont été collectés à ce jour.

Un cimetière présenté comme « un actif vital » pour la région

Le projet a tout de même été soumis aux autorités locales. Il devrait être examiné en début d’année 2025. De leur côté, les initiateurs affichent leur détermination à aller jusqu’au bout, en tentant dans le même temps de rassurer ceux pour qui l'identité musulmane affichée du projet pourrait aussi déranger. D'une part, le cimetière n'abritera pas de mosquée et il n'y aura pas d'appel à la prière. D'autre part, les défunts non-musulmans, des personnes « de toute confession et sans confession », pourront y être inhumés « sous réserve du respect de la politique du cimetière », lit-on sur le site de présentation du projet. « Bien que tout le monde soit le bienvenu, ce site répond principalement aux besoins de la communauté locale. »

« Nous sommes fiers de participer au développement d'un cimetière à Oswaldtwistle, un actif vital pour la communauté qui répond à un besoin essentiel et améliore considérablement l'espace actuel », a déclaré un porte-parole de la Fondation Issa. « Nous respectons et valorisons les retours reçus de toutes les parties prenantes tout au long de ce processus. Conformément à notre engagement en matière de transparence et de rigueur, des conseillers professionnels ont soigneusement pris en compte les considérations de développement nécessaires », a-t-il ajouté, rappelant que le projet a été « considérablement réduit et révisé pour apaiser les inquiétudes des résidents ». Ce sera au conseil municipal de Hyndburn de trancher sur le délicat dossier.

Les frères Issa n’en sont pas à leur premier projet faramineux dans la région qui les a vu naître et grandir. Ils portent le projet d’une grande mosquée à Blackburn qui, après moultes objections, a fini par avoir l’approbation du conseil municipal en 2021. La mosquée, surmontée d'un dôme et de deux minarets hauts de 29 mètres, est financée à hauteur d'environ 5 millions de livres sterling (6 millions d’euros).

*Zuber Issa a vendu ses parts à son frère Mohsin en juin 2024. Ce dernier est ainsi devenu le seul à diriger EG Group. Son frère reste dans le conseil d’administration en tant qu’administrateur non exécutif.

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Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur



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