
Les députés Sabrina Sebaihi (au centre), Ludovic Mendes et Marietta Karamanli sont les rapporteurs du débat autour de l’islamophobie organisé mercredi 26 mars à l’Assemblée nationale. © Capture d’écran Assemblée nationale
« Haine anti-musulmans, islamophobie : qualification juridique et politiques publiques de lutte contre ces discriminations », tel fut le thème du débat organisé mercredi 26 mars à l’Assemblée nationale, à l'issue d’une série d’auditions menées au cours du mois par les députés Sabrina Sebaihi, Ludovic Mendes et Marietta Karamanli. Ces rapporteurs, désignés par la Commission des lois pour mener le travail, alertent aujourd’hui « la représentation nationale quant à l’absence de discours politique visant à protéger nos concitoyens de confession musulmane, un sujet qui est pourtant urgent tant la menace pour notre cohésion nationale est réelle ».
« Dans notre pays, les musulmans sont responsables de tous les maux, dit-on dans les médias. Même de la pénurie d’œufs pendant le Ramadan. C’était l’huile l’année dernière, ce sera peut-être le beurre l’année prochaine », a lancé la députée écologiste des Hauts-de-Seine, Sabrina Sebaihi, en guise d'introduction au débat dans l’hémicycle. Une première synonyme, à ses yeux, de « victoire qui laisse un goût amer, celui d’une absence totale de volonté politique ou, plutôt, celui d’une volonté assumée de masquer cette réalité qui touche pourtant plus de cinq millions de nos concitoyens ».
« Dans notre pays, les musulmans sont responsables de tous les maux, dit-on dans les médias. Même de la pénurie d’œufs pendant le Ramadan. C’était l’huile l’année dernière, ce sera peut-être le beurre l’année prochaine », a lancé la députée écologiste des Hauts-de-Seine, Sabrina Sebaihi, en guise d'introduction au débat dans l’hémicycle. Une première synonyme, à ses yeux, de « victoire qui laisse un goût amer, celui d’une absence totale de volonté politique ou, plutôt, celui d’une volonté assumée de masquer cette réalité qui touche pourtant plus de cinq millions de nos concitoyens ».
Une polémique sur la sémantique qui « détourne le regard du vrai problème »
« De ces heures d’auditions émerge un fait implacable : l’islamophobie est largement sous-estimée et souffre d’une invisibilisation structurelle » en raison notamment de la querelle sémantique autour du phénomène, a-t-elle poursuivi. « Si nous comprenons que les institutions utilisent le terme "haine antimusulmans", nous ne pouvons ignorer qu’une grande partie des personnes concernées s’emparent du mot "islamophobie" car il représente un racisme antireligieux à l’égard des musulmans », sans interdire la critique de la religion « comme certains aiment le dire ». « Cette polémique n’a qu’un but : détourner le regard du vrai problème, la discrimination et l’hostilité envers les personnes musulmanes dans notre pays », a tranché l’élue.
A ce jour, selon la note faisant suite aux auditions menées par les rapporteurs, « aucune catégorie juridique spécifique ne réprime l’islamophobie en tant que telle », mais « plusieurs fondements juridiques permettent de réprimer les actes ou propos islamophobes » comme la provocation et la discrimination. « Les propos ou actes islamophobes ne sont pas réprimés en tant que tels mais constituent une circonstance aggravante des crimes et délits qui en sont précédés, suivis ou accompagnés, ou commis pour cette raison », lit-on aussi.
« Les premiers responsables de cette situation sont à l’extrême droite de cet hémicycle et ils peuvent compter sur le silence, voire la complicité de ceux qui participent au climat de soupçon permanent qui pèse sur les musulmans de ce pays et qui, au plus haut sommet de l’Etat, assènent que les premiers responsables de l’antisémitisme, c’est le monde arabo-musulman », a déclaré la députée, faisant référence aux graves propos tenus en ce sens par le ministre des Outre-mer Manuel Valls. Sabrina Sebaihi, qui a également chargé le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, fait d’ailleurs partie des députés écologistes à avoir saisi la justice pour « incitation à la haine » contre l'ex-Premier ministre.
A ce jour, selon la note faisant suite aux auditions menées par les rapporteurs, « aucune catégorie juridique spécifique ne réprime l’islamophobie en tant que telle », mais « plusieurs fondements juridiques permettent de réprimer les actes ou propos islamophobes » comme la provocation et la discrimination. « Les propos ou actes islamophobes ne sont pas réprimés en tant que tels mais constituent une circonstance aggravante des crimes et délits qui en sont précédés, suivis ou accompagnés, ou commis pour cette raison », lit-on aussi.
« Les premiers responsables de cette situation sont à l’extrême droite de cet hémicycle et ils peuvent compter sur le silence, voire la complicité de ceux qui participent au climat de soupçon permanent qui pèse sur les musulmans de ce pays et qui, au plus haut sommet de l’Etat, assènent que les premiers responsables de l’antisémitisme, c’est le monde arabo-musulman », a déclaré la députée, faisant référence aux graves propos tenus en ce sens par le ministre des Outre-mer Manuel Valls. Sabrina Sebaihi, qui a également chargé le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau, fait d’ailleurs partie des députés écologistes à avoir saisi la justice pour « incitation à la haine » contre l'ex-Premier ministre.
« La puissance publique au sens large combat d’un côté ce qu’elle entretient de l’autre »
En outre, elle a dénoncé la proposition de loi visant à interdire le voile dans les compétitions sportives et qui signe, pour elle, une instrumentalisation de la laïcité « à des fins islamophobes ». « Une laïcité qui n’est plus un grand principe, mais un ensemble de valeurs dont les contours évoluent au gré des polémiques initiées par l’extrême droite », a précisé l'élue. « Ce n’est pas l’islam qui menace les libertés individuelles, c’est l’islamophobie », a-t-elle martelé, en faisant allusion à l’éviction du petit écran de l’humoriste Merwane Benlazar ou encore à la résiliation de contrats d'association avec des groupes scolaires musulmans.
« Ces injonctions à l’invisibilité ne peuvent mener fatalement qu’au repli sur soi (…). En fracturant notre société, c’est vous qui êtes le terreau fertile du séparatisme », a-t-elle assumé de dire, avant de conclure que « l’islamophobie est une mécanique d’oppression et, tant qu’elle gangrène notre République notre devise, "Liberté, Égalité, Fraternité", est trahie ».
Ludovic Mendes, qui a tout aussi dénoncé l’instrumentalisation de la laïcité « pour justifier toutes les dérives islamophobes », a souligné « le gouffre » entre les chiffres des actes antimusulmans rapportés par le ministère de l’Intérieur et le vécu des Français de confession musulmane. Des chiffres qui « échouent aussi à rendre compte d’une islamophobie d’ambiance qui existe et se renforce dans notre société » à travers les médias, les réseaux sociaux ou encore les discours publics, a signifié le député de la Moselle étiqueté Ensemble pour la République. « Il est fréquent que l’islam soit confondu avec l’islamisme, un amalgame qui alimente des discours sécuritaires et des peurs infondées » et « nourrit une islamophobie qui ne fait que renforcer les préjugés et les discriminations », a-t-il indiqué.
Saluant la création de l’Association de défense contre les discriminations et les actes antimusulmans (ADDAM), « en attendant peut-être une réflexion sur ce sujet au niveau de l’Etat », l’auteur d’un rapport sur les actes antireligieux en 2022 a souligné que « les politiques publiques de lutte contre l’islamophobie sont, non seulement, insuffisantes, mais souffrent également d’une incohérence puisque la puissance publique au sens large combat d’un côté ce qu’elle entretient de l’autre ».
« Ces injonctions à l’invisibilité ne peuvent mener fatalement qu’au repli sur soi (…). En fracturant notre société, c’est vous qui êtes le terreau fertile du séparatisme », a-t-elle assumé de dire, avant de conclure que « l’islamophobie est une mécanique d’oppression et, tant qu’elle gangrène notre République notre devise, "Liberté, Égalité, Fraternité", est trahie ».
Ludovic Mendes, qui a tout aussi dénoncé l’instrumentalisation de la laïcité « pour justifier toutes les dérives islamophobes », a souligné « le gouffre » entre les chiffres des actes antimusulmans rapportés par le ministère de l’Intérieur et le vécu des Français de confession musulmane. Des chiffres qui « échouent aussi à rendre compte d’une islamophobie d’ambiance qui existe et se renforce dans notre société » à travers les médias, les réseaux sociaux ou encore les discours publics, a signifié le député de la Moselle étiqueté Ensemble pour la République. « Il est fréquent que l’islam soit confondu avec l’islamisme, un amalgame qui alimente des discours sécuritaires et des peurs infondées » et « nourrit une islamophobie qui ne fait que renforcer les préjugés et les discriminations », a-t-il indiqué.
Saluant la création de l’Association de défense contre les discriminations et les actes antimusulmans (ADDAM), « en attendant peut-être une réflexion sur ce sujet au niveau de l’Etat », l’auteur d’un rapport sur les actes antireligieux en 2022 a souligné que « les politiques publiques de lutte contre l’islamophobie sont, non seulement, insuffisantes, mais souffrent également d’une incohérence puisque la puissance publique au sens large combat d’un côté ce qu’elle entretient de l’autre ».
Vers un #MeToo de l'islamophobie ? Ce sera sans l'exécutif
« Selon moi, la lutte contre l’islamophobie ne suppose pas forcément la création de nouveaux outils ou cadres. Elle nécessite à coup sûr une mise en œuvre diligente des outils et des cadres existants », a jugé la députée socialiste de la Sarthe, Marietta Karamanli. Dans la note des rapporteurs, ces derniers estiment nécessaire de « mettre un terme à la surenchère législative et politique entourant l’islam ». Ils proposent que la loi dite séparatisme adoptée en 2021 puissent faire l’objet d’un audit « pour évaluer son effet sur les associations ».
« La lutte contre l’islamophobie ne doit pas être une juxtaposition de mesures ; elle doit au contraire être adossée à un dispositif cohérent et transversal, impliquant l’ensemble des citoyens et des politiques, ces derniers contribuant parfois au discours islamophobe dans les médias, les débats parlementaires ou à l’échelle locale », soulignent les députés. « L’avènement d’un #metoo de l’islamophobie permettrait aux victimes d’être entendues et à la société et à la justice de porter enfin un regard neuf et sans concession sur ce phénomène », conclut la note.
Appelée à la tribune, la ministre déléguée chargée de l'Égalité entre les femmes et les hommes et de la Lutte contre les discriminations, Aurore Bergé, a « fermement » récusé le terme « islamophobie » qui « porte en lui une ambiguïté dangereuse, trop souvent instrumentalisée et qui ne dit pas ce que nous combattons ».
Si le présent débat souligne « une réalité qui ne doit pas avoir sa place dans notre République », le gouvernement doit faire preuve d’une « intransigeance contre l’entrisme, le prosélytisme et l’intégrisme religieux car c’est un seul et même combat pour lequel il faut être d’une fermeté absolue », a affirmé cette partisane de l’interdiction du voile dans le sport.
« Aucune loi ne vise ou ne stigmatise dans notre pays certains de nos citoyens en raison de leur religion. Le faire croire, c’est attiser la haine et creuse ce fossé générationnel à l’œuvre dans notre pays », a-t-elle estimé. Une affirmation à laquelle s'est ouvertement opposée Sabrina Sebaihi et qui, plus largement, laisse plus que sceptiques une grande partie des musulmans, toujours plus inquiets de la stigmatisation croissante à leur encontre sous couvert de la lutte contre l’islamisme.
Lire aussi :
Islamophobie, racisme antimusulman : la lutte contre la haine en Europe au cœur de discussions à Bruxelles
Et aussi :
Un meeting « contre l'islamisme » organisé par un lobby pro-israélien sous le parrainage de Bruno Retailleau et Manuel Valls
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