Une soirée, organisée par la présidente de l’Institut Ouïghour d'Europe Dilnur Reyhan et le député européen Raphael Glucksmann (au centre), a été l’occasion de mettre en lumière le destin tragique des Ouïghours en Chine.
La voix des Ouïghours a vibré, dimanche 15 décembre, à La Marbrerie de Montreuil (Seine-Saint-Denis) à l’occasion d’une soirée de solidarité avec un peuple dont le destin tragique gagne à être davantage (re)connu auprès du grand public. Malgré les grèves et les perturbations qu’elles génèrent, quelque 150 personnes ont fait le déplacement, signe d’une adhésion à la cause.
Le destin des Ouïghours bascule véritablement en 1949 lorsque le Turkestan oriental, où les membres de cette minorité musulmane turcophone sont majoritaires, est occupé par la Chine communiste. Cette région du nord-ouest, érigée en province sous le nom du Xinjiang, est depuis sous le contrôle implacable du pouvoir central de Pékin.
Lire aussi : Qui sont les Ouïghours ?
Leur situation s’est particulièrement aggravée ces dernières années avec la mise en place d’une politique répressive qui a, entre autres actions, mené à leur internement massif. Les organisateurs de la soirée dominicale, le député européen Raphael Glucksmann et la sociologue Dilnur Reyhan, présidente de l’Institut Ouïghour d'Europe, né en début d’année 2019, ont ainsi voulu créer un événement visant à « briser le silence » qui règne autour du sort des Ouîghours, victimes de diverses persécutions par les autorités chinoises, et ce avec le silence, voire le soutien d’une bonne partie de la communauté internationale, eu égard malheureusement à la puissance politico-économique de la Chine.
Lire aussi : La cause des Ouïghours entendue au Parlement européen, des sanctions réclamées contre la Chine
Le destin des Ouïghours bascule véritablement en 1949 lorsque le Turkestan oriental, où les membres de cette minorité musulmane turcophone sont majoritaires, est occupé par la Chine communiste. Cette région du nord-ouest, érigée en province sous le nom du Xinjiang, est depuis sous le contrôle implacable du pouvoir central de Pékin.
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Leur situation s’est particulièrement aggravée ces dernières années avec la mise en place d’une politique répressive qui a, entre autres actions, mené à leur internement massif. Les organisateurs de la soirée dominicale, le député européen Raphael Glucksmann et la sociologue Dilnur Reyhan, présidente de l’Institut Ouïghour d'Europe, né en début d’année 2019, ont ainsi voulu créer un événement visant à « briser le silence » qui règne autour du sort des Ouîghours, victimes de diverses persécutions par les autorités chinoises, et ce avec le silence, voire le soutien d’une bonne partie de la communauté internationale, eu égard malheureusement à la puissance politico-économique de la Chine.
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Des voix de la résistance
Malgré tout, la résistance des Ouïghours dans le monde est de plus en plus active, le but étant de mettre en échec l’effacement en cours de tout un peuple. Dernièrement, c’est le militant ouïghour Ilham Tohti qui s’est vu décerné le prix Sakharov par le Parlement européen.
« Tant que nous sommes là, la civilisation ouïghoure ne sera jamais exterminée. C’est pour ça que je suis là et que vous êtes là. C’est pour ça que nous avons organisé cette soirée. Des millions d’autres personnes dans le monde entier se battent pour que la civilisation ouïghoure vive et ne meure jamais et ça n’arrivera pas », a affirmé avec force Dilnur Reyhan, en s’adressant à l’auditoire.
En tant qu’enseignante de la langue ouïghoure, directrice de la revue franco-ouïghoure Regard sur les Ouïghour-e-s et présidente de l’Institut Ouïghour d'Europe, Dilnur Reyhan participe activement à la promotion et à la sauvegarde de la langue et de la culture ouïghoures, un véritable acte de résistance contre la politique de « rééducation » mise en œuvre par le gouvernement chinois depuis 2016 au Xinjiang.
Avant l’instauration de camps d’internement qualifiés par des observateurs comme des « camps de concentration », les Ouïghours de la diaspora, venus en Europe pour y faire des études, pouvaient faire des allers-retours vers la Chine. Depuis trois ans, cela n’est plus possible, indique auprès de Saphirnews Dilnur Reyhan. Désormais, « s’ils retournent en Chine, ils sont amenés directement dans les camps. Cela est arrivé à beaucoup de Ouïghours, revenus chez eux après avoir terminé leurs études en France, ils sont actuellement (portés) disparus ».
C’est la raison pour laquelle le travail engagé par l’Institut Ouïghour d'Europe* – né en début d’année 2019 de l’Association des étudiants ouïghours de France (Oghouz) qui existait depuis une dizaine d’années – est devenue plus importante encore, au vu de l’escalade de la violence et la dégradation des conditions de vie des Ouïghours en Chine. « Actuellement, on estime qu’il y a entre 1,2 et 3 millions de personnes dans le camps », déclare Dilnur Reyhan. A noter, des Kazakhs et des Kirghizes, qui ont l’identité turcique pour point commun avec les Ouïghours, y sont également internés.
« Tant que nous sommes là, la civilisation ouïghoure ne sera jamais exterminée. C’est pour ça que je suis là et que vous êtes là. C’est pour ça que nous avons organisé cette soirée. Des millions d’autres personnes dans le monde entier se battent pour que la civilisation ouïghoure vive et ne meure jamais et ça n’arrivera pas », a affirmé avec force Dilnur Reyhan, en s’adressant à l’auditoire.
En tant qu’enseignante de la langue ouïghoure, directrice de la revue franco-ouïghoure Regard sur les Ouïghour-e-s et présidente de l’Institut Ouïghour d'Europe, Dilnur Reyhan participe activement à la promotion et à la sauvegarde de la langue et de la culture ouïghoures, un véritable acte de résistance contre la politique de « rééducation » mise en œuvre par le gouvernement chinois depuis 2016 au Xinjiang.
Avant l’instauration de camps d’internement qualifiés par des observateurs comme des « camps de concentration », les Ouïghours de la diaspora, venus en Europe pour y faire des études, pouvaient faire des allers-retours vers la Chine. Depuis trois ans, cela n’est plus possible, indique auprès de Saphirnews Dilnur Reyhan. Désormais, « s’ils retournent en Chine, ils sont amenés directement dans les camps. Cela est arrivé à beaucoup de Ouïghours, revenus chez eux après avoir terminé leurs études en France, ils sont actuellement (portés) disparus ».
C’est la raison pour laquelle le travail engagé par l’Institut Ouïghour d'Europe* – né en début d’année 2019 de l’Association des étudiants ouïghours de France (Oghouz) qui existait depuis une dizaine d’années – est devenue plus importante encore, au vu de l’escalade de la violence et la dégradation des conditions de vie des Ouïghours en Chine. « Actuellement, on estime qu’il y a entre 1,2 et 3 millions de personnes dans le camps », déclare Dilnur Reyhan. A noter, des Kazakhs et des Kirghizes, qui ont l’identité turcique pour point commun avec les Ouïghours, y sont également internés.
Des témoignages de l’horreur
La soirée est rythmée par les interventions de figures institutionnelles proches de la cause ouïghoure tels que Hubert Julien-Laferrière, député de l’Assemblée nationale et membre de la commission des Affaires étrangères, et Raphael Glucksmann, ainsi que la lecture de témoignages de victimes ou de parents de victimes de la répression chinoise.
« A la fin de l’année 2016, ma mère reçoit un étrange appel de son ancien patron en Chine qui lui ordonne de revenir pour demander sa retraite et signer des papiers. Ce fut le début d’un cauchemar », témoigne, dans une lettre, Gilhumar Haitiwaji qui, à l’époque, avait 14 ans. Sa mère décide de partir après une semaine de harcèlements quotidiens et achète un billet d’avion aller-retour pour un court séjour. Une fois arrivée en Chine, elle est arrêtée, interrogée, maltraitée et finalement emprisonnée, avant d’être obligée de rejoindre un camp de « rééducation » où elle restera un an et demi et subira toutes sortes d’humiliations. C'est aussi là qu'on lui demande explicitement de renoncer à sa langue, à sa culture et à son identité ouïghoures.
Il y aussi le témoignage de Olsi Yazeji, un historien albanais qui, en août 2019, a rejoint un groupe de journalistes étrangers pour visiter le Xinjiang. Une fois là-bas, il a pu constater l’horreur et la violence psychologique dans les camps que la propagande chinoise appelle « Vocational Training Centers » destinés, selon la version officielle, à reconvertir de présumés terroristes en citoyens modèles.
« A la fin de l’année 2016, ma mère reçoit un étrange appel de son ancien patron en Chine qui lui ordonne de revenir pour demander sa retraite et signer des papiers. Ce fut le début d’un cauchemar », témoigne, dans une lettre, Gilhumar Haitiwaji qui, à l’époque, avait 14 ans. Sa mère décide de partir après une semaine de harcèlements quotidiens et achète un billet d’avion aller-retour pour un court séjour. Une fois arrivée en Chine, elle est arrêtée, interrogée, maltraitée et finalement emprisonnée, avant d’être obligée de rejoindre un camp de « rééducation » où elle restera un an et demi et subira toutes sortes d’humiliations. C'est aussi là qu'on lui demande explicitement de renoncer à sa langue, à sa culture et à son identité ouïghoures.
Il y aussi le témoignage de Olsi Yazeji, un historien albanais qui, en août 2019, a rejoint un groupe de journalistes étrangers pour visiter le Xinjiang. Une fois là-bas, il a pu constater l’horreur et la violence psychologique dans les camps que la propagande chinoise appelle « Vocational Training Centers » destinés, selon la version officielle, à reconvertir de présumés terroristes en citoyens modèles.
Briser le silence pour sauvegarder les droits de tous
Raphael Glucksmann, l'un des premiers eurodéputés à dénoncer ce qui se passe au Xinjiang, a exhorté l'opinion publique à ne pas détourner le regard face aux crimes commis par le régime chinois : « Être solidaires des Ouïghours, ce n’est pas simplement un devoir d’être humain, mais c’est aussi se soucier de son propre avenir, parce que ce qui se passe en Chine ce n’est pas une réminiscence du passé, c’est un modèle d’avenir. »
« Tu as une barbe trop longue, tu vas au camp. Tu as un Coran dans ton sac, tu vas au camp. Tu es pris en train de prier, tu vas au camp. Tu envoies des vœux sur Internet pour une fête religieuse musulmane, tu vas au camp. Et même si tu ne fais pas tout cela, même si tu es un enfant, on te sépare de ta famille, on t’incite à dénoncer tes parents », affirme le député.
« Et même si tu es mort, on va te chercher dans ta tombe, on retourne ton cimetière et on fait un parc d’attraction qui s’appelle "La Cité Joyeuse" au-dessus de tombes (le "Parc du bonheur", qui va être construit sur un cimetière, un site révéré par les Ouïghours car il abritait la tombe d'un de leurs poètes du XXe siècle, Lutpulla Mutelli, ndlr). C’est ça la politique chinoise aujourd’hui dans le Xinjiang. C’est l’effacement d’un peuple au nom de la lutte anti-terroriste et jihadiste. »
Briser le silence est donc un devoir civique parce que « les grands crimes, pour avoir lieu, ont besoin d’immenses silences », continue Raphael Glucksmann. La soirée se termine, symboliquement, avec les chants et les musiques de la tradition ouïghoure, interdits en Chine. Le message est clair : si le silence tue, la musique donne aussi vie et espoir.
*L'Institut Ouïghour d'Europe a engagé une campagne de crowdfunding afin de fonder un lieu à Paris visant à faire « découvrir la culture ouïghoure » auprès du plus grand nombre et de « participer à sa protection ».
Lire aussi :
Chine : des documents internes révèlent des détails de la politique répressive contre les Ouïghours
Des appels à la prière et à l'action en faveur des Ouïghours de Chine lancés en France
« Tu as une barbe trop longue, tu vas au camp. Tu as un Coran dans ton sac, tu vas au camp. Tu es pris en train de prier, tu vas au camp. Tu envoies des vœux sur Internet pour une fête religieuse musulmane, tu vas au camp. Et même si tu ne fais pas tout cela, même si tu es un enfant, on te sépare de ta famille, on t’incite à dénoncer tes parents », affirme le député.
« Et même si tu es mort, on va te chercher dans ta tombe, on retourne ton cimetière et on fait un parc d’attraction qui s’appelle "La Cité Joyeuse" au-dessus de tombes (le "Parc du bonheur", qui va être construit sur un cimetière, un site révéré par les Ouïghours car il abritait la tombe d'un de leurs poètes du XXe siècle, Lutpulla Mutelli, ndlr). C’est ça la politique chinoise aujourd’hui dans le Xinjiang. C’est l’effacement d’un peuple au nom de la lutte anti-terroriste et jihadiste. »
Briser le silence est donc un devoir civique parce que « les grands crimes, pour avoir lieu, ont besoin d’immenses silences », continue Raphael Glucksmann. La soirée se termine, symboliquement, avec les chants et les musiques de la tradition ouïghoure, interdits en Chine. Le message est clair : si le silence tue, la musique donne aussi vie et espoir.
*L'Institut Ouïghour d'Europe a engagé une campagne de crowdfunding afin de fonder un lieu à Paris visant à faire « découvrir la culture ouïghoure » auprès du plus grand nombre et de « participer à sa protection ».
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