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Politique

Zemmour partout, bon sens nulle part ? Le danger d’un candidat semeur de haine

Rédigé par | Mercredi 1 Décembre 2021 à 11:00

           

Eric Zemmour a su, en quelques mois, se forger une place de choix dans le débat public. Un représentant de l’extrême droite gonflé à bloc par des sondages qui le place dans le haut du panier des candidats à la présidentielle dont il fait désormais officiellement partie depuis mardi 30 novembre. Mais peut-on encore compter sur le bon sens d'une majorité de Français pour ne voir ce trublion et consorts gouverner le pays en 2022 ?



Zemmour partout, bon sens nulle part ? Le danger d’un candidat semeur de haine
Face au doigt d’honneur d’une opposante lors de sa venue samedi 27 novembre à Marseille, Eric Zemmour a répliqué par un doigt d’honneur. Le polémiste d’extrême droite a alors été vertement critiqué par la classe politique française qui le juge « indigne » de la fonction présidentielle à laquelle le désormais candidat à l’Elysée aspire. Pourtant, cela fait bien longtemps qu’Eric Zemmour est dans une position indigne pour prétendre à la magistrature suprême. Doit-on rappeler, ne serait-ce que ce point, qu’il a été condamné par trois fois pour provocation à la discrimination raciale et religieuse ?

Exit la voie du rassemblement. Avec ses discours haineux et clivants qui prédisent, à qui veut l’entendre, « la guerre civile » sans n’offrir aucune autre perspective d’avenir aux Français que celle du sang et des larmes, Eric Zemmour a depuis longtemps emprunté l’autoroute qui mène tout droit vers une fragmentation de la société qu’il veut faire tomber dans un terrible piège identitaire.

A la faveur d’une banalisation ces dernières années des idées de l’extrême droite dont le Rassemblement national peut se targuer grâce à sa stratégie quasi diabolique de dédiabolisation, celui qui voue une furieuse obsession de l’islam et de l’immigration est devenu le symbole de la libération décomplexée de la parole raciste, xénophobe et sexiste en France. Les articles recensant les pires des citations d’Eric Zemmour ne manquent pas de le rappeler.

Les pires des propositions suivront très vite. Il a d’ores et déjà confirmé sa volonté d’interdire aux Français de porter un premier prénom d'origine « étrangère » s’il est élu président. A part ça, tout va bien ?

Un manipulateur de l’histoire

Le chantre de la théorie complotiste du « grand remplacement », qui porte haut le mythe de « l’islamisation » de la France à grands renforts d’anathèmes visant la présence musulmane et fait de la peur son fonds de commerce, manipule l’histoire de France à sa guise pour servir des discours passéistes et faussement nostalgiques qui dépeignent une France à l’identité blanche et chrétienne figée comme du marbre dans le temps (fantasmé) de Clovis ou de Jeanne d’Arc. Son clip d’annonce à la candidature à l’Elysée en témoigne. Il a d’ailleurs été l’occasion d’une nouvelle diatribe contre ces minorités qu’il accuse de « tyranniser la majorité ».

Devenu le chef de file de la pensée néo-pétainiste, le réhabilitateur du régime de Vichy ne manque pas de culot en affirmant sans sourciller que la France collaborationniste avait protégé ses enfants juifs pendant la Seconde Guerre mondiale ou encore en faisant croire que Pétain et le général de Gaulle agissait de concert durant l’occupation nazie pour sauver le pays. Un négationnisme éhonté qui fait bondir plus d’un historien digne de ce nom, agace au sein des communautés juives, mais dont « Le Radicalisé », comme le surnomme Etienne Girard dans son livre-enquête (Seuil, octobre 2021), se fiche.

De la même façon, le polémiste, particulièrement soutenu par l'homme d'affaires Vincent Bolloré, se fiche de l’Etat de droit qui fonde les sociétés démocratiques. Le candidat, qui veut voir la France « s’affranchir » de la Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH), propose de « modifier » l’Etat de droit qu’il trouve, selon ses dires à L’Express déjà en 2018, à la botte « des juges » qui « foulent aux pieds la démocratie » en « dominant le politique ». Ce sont donc des mains totalement libres de toute contrainte, y compris du droit, qu’Eric Zemmour veut avoir pour exercer les pleins pouvoirs. Une logique totalitaire se dessine. A part ça, tout va bien ?

Zemmour n’est pas une option d’avenir. Et après ?

Jusqu’où Zemmour peut-il aller ? On le sait, l’outrance est, depuis bien longtemps, sa marque de fabrique ; contenter de s’en offusquer à longueur de temps ne changera rien, ni à son attitude ni à la situation. Pis, « E.Z. » s’en sort renforcé à l’heure où la France s’est largement droitisée, sur fond d’une lutte entre des gauches qui n’arrivent pas à s’entendre pour une candidature et un programme communs ravivant l’espoir de lendemains meilleurs.

Les Français, et sa composante musulmane en particulier, ne peuvent faire l’économie d’un débat autour du phénomène Zemmour qu’il convient d’interroger pour ce qu’il est : une réalité effrayante certes, mais qui se nourrit, d’une part, du sentiment réel – et en progression – de déclassement d’une partie non négligeable de la population française et, d’autre part, des inquiétudes légitimes sur l’avenir qui s’offre à elle, le tout appuyé par des lâchetés et autres démissions politiques constatées du côté des partis traditionnels qui se sont succédé au pouvoir ces dernières décennies. Pour autant, Zemmour n’est pas une option d’avenir sur laquelle il faudrait parier.

Si tant est qu'il réussisse à récolter les 500 parrainages d'élus nécessaires pour tenter de briguer l'Elysée, peut-on encore compter sur le bon sens d'une majorité d'électeurs pour ne pas voir l’extrême droite française ravir le pouvoir par les urnes en 2022 ? D'abord faut-il aussi que ses opposants politiques soient en capacité d’offrir aux Français plus qu’un discours du type « ce n’est pas bien, votez pour nous ». Le temps est venu de réagir pour construire en amont un véritable barrage républicain qui fasse sens autour de valeurs communes qui rassemblent ces Français et ces Françaises qui rêvent d’un horizon plus égalitaire et apaisé. Il n’est pas trop tard pour cela.

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Rédactrice en chef de Saphirnews En savoir plus sur cet auteur


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