Je vais commencer en parlant brièvement de mon enfance. J’ai eu une éducation plutôt épanouie. Mes parents ont toujours veillé à ma sécurité, me soutiennent dans mon parcours scolaire et m’ont transmise certaines valeurs que je ne regrette à aucun moment d’avoir reçues.
Mais tout n’est pas idyllique dans ce décor qui semble pittoresque. En effet, ce petit tableau familial de premier abord prospère présente quand même quelques zones d’ombre à l’arrière-plan : effectivement, mon papa consomme énormément de tabac et de cannabis. Et c’est peu dire qu’il supporte mal « le sevrage de la fin de mois ».
Le dos de ma maman en a souvent payé les frais. J’entends encore les échos de ses cris dans la salle de bains qui le suppliaient en arabe d’arrêter de la battre avec la ceinture. Cette horreur, il l’avait depuis qu’il était jeune. « T’as vu, ces modèles-là ne se démodent pas et tiennent malgré les années », nous disait-il quand il semblait apaisé après sa dose du matin. « Elle a tenu, malgré tous les coups que tu lui as filés », je voulais lui rétorquer.
Bref, un soir, il avait décidé de la battre jusqu’au sang. C’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : j’ai donc voulu ce soir-là commettre ma première tentative de suicide en avalant plusieurs gélules successivement mais, al hamdoulillah, ce surdosage n’a pas été délétère pour mon organisme vieux de 11 ans...
Mais autant vous dire que cette maudite soirée a été vécue comme une véritable césure dans mon adolescence. Je peine à extorquer ce foutu lundi 28 novembre 2005 de mon esprit.
Depuis, j’ai une confiance en moi proche du zéro absolu. Je sens qu’une partie de moi a été détruite. Je me rabaisse à longueur de journée. Sans compter que mon père ne manquait jamais de nous insulter gratuitement quand il était en manque.
Je me sens peu intelligente, je trouve mon physique disgracieux, laid, grossier ; bref, il s’agit pour moi d’un véritable repoussoir. « Pas étonnant que tu aies autant de facilité à ne pas t’approcher de la fornication, puisque, à 23 ans, aucun homme ne t’a abordée et ne s’intéresse à toi. »
Lors de mon adolescence, il m’arrivait de ressentir une certaine satisfaction provoquée par l’autodestruction. J’aimais me maintenir à un seuil proche de la famine et voir mon corps amaigri et squelettique. J’aimais m’infliger des coups, en me munissant du poing américain du « troisième tiroir du meuble d’en bas » et voir mes bras colorés par la bilirubine de mes larges ecchymoses…
Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, toutes ces pulsions ont semblé s’annihiler spontanément à mes 17 ans… Jusqu’au moment où elles semblent refaire surface à mes 23 ans de façon tout aussi spontanée.
Pour le moment, j’essaie avec tant de bien que de mal de les refouler. Mais j’ai peur de céder et de retomber dans mes travers. J’appréhende le jour où je franchirai des caps que mon inconscient ancrait comme barrière étant plus jeune. Car, à ce moment-là, je serai capable de tout. Je le sens.
S’il vous plaît, j’ai besoin d’aide.
Jasmine, 23 ans
Mais tout n’est pas idyllique dans ce décor qui semble pittoresque. En effet, ce petit tableau familial de premier abord prospère présente quand même quelques zones d’ombre à l’arrière-plan : effectivement, mon papa consomme énormément de tabac et de cannabis. Et c’est peu dire qu’il supporte mal « le sevrage de la fin de mois ».
Le dos de ma maman en a souvent payé les frais. J’entends encore les échos de ses cris dans la salle de bains qui le suppliaient en arabe d’arrêter de la battre avec la ceinture. Cette horreur, il l’avait depuis qu’il était jeune. « T’as vu, ces modèles-là ne se démodent pas et tiennent malgré les années », nous disait-il quand il semblait apaisé après sa dose du matin. « Elle a tenu, malgré tous les coups que tu lui as filés », je voulais lui rétorquer.
Bref, un soir, il avait décidé de la battre jusqu’au sang. C’était la goutte d’eau qui a fait déborder le vase : j’ai donc voulu ce soir-là commettre ma première tentative de suicide en avalant plusieurs gélules successivement mais, al hamdoulillah, ce surdosage n’a pas été délétère pour mon organisme vieux de 11 ans...
Mais autant vous dire que cette maudite soirée a été vécue comme une véritable césure dans mon adolescence. Je peine à extorquer ce foutu lundi 28 novembre 2005 de mon esprit.
Depuis, j’ai une confiance en moi proche du zéro absolu. Je sens qu’une partie de moi a été détruite. Je me rabaisse à longueur de journée. Sans compter que mon père ne manquait jamais de nous insulter gratuitement quand il était en manque.
Je me sens peu intelligente, je trouve mon physique disgracieux, laid, grossier ; bref, il s’agit pour moi d’un véritable repoussoir. « Pas étonnant que tu aies autant de facilité à ne pas t’approcher de la fornication, puisque, à 23 ans, aucun homme ne t’a abordée et ne s’intéresse à toi. »
Lors de mon adolescence, il m’arrivait de ressentir une certaine satisfaction provoquée par l’autodestruction. J’aimais me maintenir à un seuil proche de la famine et voir mon corps amaigri et squelettique. J’aimais m’infliger des coups, en me munissant du poing américain du « troisième tiroir du meuble d’en bas » et voir mes bras colorés par la bilirubine de mes larges ecchymoses…
Mais aussi étonnant que cela puisse paraître, toutes ces pulsions ont semblé s’annihiler spontanément à mes 17 ans… Jusqu’au moment où elles semblent refaire surface à mes 23 ans de façon tout aussi spontanée.
Pour le moment, j’essaie avec tant de bien que de mal de les refouler. Mais j’ai peur de céder et de retomber dans mes travers. J’appréhende le jour où je franchirai des caps que mon inconscient ancrait comme barrière étant plus jeune. Car, à ce moment-là, je serai capable de tout. Je le sens.
S’il vous plaît, j’ai besoin d’aide.
Jasmine, 23 ans
Lalla Chams en Nour, psychanalyste
Chère Jasmine, vous vous rendez bien compte que ma seule réponse ne suffira pas à vous aider à vous tirer d’affaire : il est nécessaire de vous faire accompagner par un professionnel qui pourra vous aider à comprendre comment vous dégager de ces tristes conditionnements.
Et je suis certaine que vous le pouvez, à condition d’en prendre la décision intime.
Le regard d’un père si dévalorisant n’a pas pu vous permettre de vous construire en confiance. Vous avez des atouts : si vous n’êtes pas sûre de votre physique, soyez sûre que votre courrier montre un certain talent à l’écrit.
Votre père, si irrespectueux de la femme, si oublieux de son devoir de respect et de protection, vous a donné un redoutable exemple. Vous pourriez être aux prises avec une double loyauté : envers votre père tel que vous voudriez qu’il soit, envers votre besoin de vous respecter vous-même… J’ajouterai : votre père, si irrespectueux de lui-même, du croyant qu’il est peut-être, du père qu’il devrait être.
Le chemin que vous feriez pour essayer de comprendre le processus qui vous amène à vouloir vous détruire vaut la peine d’être vécu : il vous offrira l’occasion d’une expérience intérieure où s’enracinera votre transformation.
De la souffrance comprise surgissent de nouvelles forces. Ce courage-là, une part de vous l’a déjà. Il s’agit de vous unifier, et vous retrouverez la joie de vivre.
Et je suis certaine que vous le pouvez, à condition d’en prendre la décision intime.
Le regard d’un père si dévalorisant n’a pas pu vous permettre de vous construire en confiance. Vous avez des atouts : si vous n’êtes pas sûre de votre physique, soyez sûre que votre courrier montre un certain talent à l’écrit.
Votre père, si irrespectueux de la femme, si oublieux de son devoir de respect et de protection, vous a donné un redoutable exemple. Vous pourriez être aux prises avec une double loyauté : envers votre père tel que vous voudriez qu’il soit, envers votre besoin de vous respecter vous-même… J’ajouterai : votre père, si irrespectueux de lui-même, du croyant qu’il est peut-être, du père qu’il devrait être.
Le chemin que vous feriez pour essayer de comprendre le processus qui vous amène à vouloir vous détruire vaut la peine d’être vécu : il vous offrira l’occasion d’une expérience intérieure où s’enracinera votre transformation.
De la souffrance comprise surgissent de nouvelles forces. Ce courage-là, une part de vous l’a déjà. Il s’agit de vous unifier, et vous retrouverez la joie de vivre.
La rubrique « Psycho », qu’est-ce que c’est ?
Des psychologues et psychanalystes répondent à vos questions. Musulman(e)s du Maghreb ou de France, professionnel(le)s actif(ve)s exerçant en cabinet, ils réfléchissent à votre problématique et tentent de vous éclairer à travers leur expérience professionnelle et leur pratique spirituelle. Ils peuvent vous aider à y voir plus clair en vous-même ou à mieux décrypter le comportement des personnes de votre entourage.
Ils ne sont pas médecins, même si on les désigne parfois comme des « médecins de l’âme », mais leur rôle est de vous aider à trouver en vous-même la meilleure réponse à vos interrogations sur vos relations aux autres, votre conjoint ou conjointe, vos parents, vos frères et sœurs, vos amis, vos collègues de travail, vos voisins...
Alors, n’hésitez pas, interrogez-les, ils tenteront de vous répondre en s’éclairant des plus belles pensées de l’islam.
Contactez-les (anonymat préservé) : psycho@saphirnews.com
Des psychologues et psychanalystes répondent à vos questions. Musulman(e)s du Maghreb ou de France, professionnel(le)s actif(ve)s exerçant en cabinet, ils réfléchissent à votre problématique et tentent de vous éclairer à travers leur expérience professionnelle et leur pratique spirituelle. Ils peuvent vous aider à y voir plus clair en vous-même ou à mieux décrypter le comportement des personnes de votre entourage.
Ils ne sont pas médecins, même si on les désigne parfois comme des « médecins de l’âme », mais leur rôle est de vous aider à trouver en vous-même la meilleure réponse à vos interrogations sur vos relations aux autres, votre conjoint ou conjointe, vos parents, vos frères et sœurs, vos amis, vos collègues de travail, vos voisins...
Alors, n’hésitez pas, interrogez-les, ils tenteront de vous répondre en s’éclairant des plus belles pensées de l’islam.
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