La somme des connaissances scientifiques accumulée depuis trois siècles est exceptionnelle et a transformé notre quotidien par ses nombreuses applications tant sur le plan technique (machine à vapeur, nucléaire, armement, électronique...) que politique et sociale (droits de l’homme, démocratie, liberté d’expression…).
L’Histoire a gravé dans nos mémoires le XVIIIe siècle comme celui des Lumières. Impasse est faite – en bonne partie en tout cas – sur le rôle de la civilisation arabo-musulmane. Civilisation arabo-musulmane trouvant elle-même ses racines dans les valeurs et crédo de l’islam.
L’Histoire a gravé dans nos mémoires le XVIIIe siècle comme celui des Lumières. Impasse est faite – en bonne partie en tout cas – sur le rôle de la civilisation arabo-musulmane. Civilisation arabo-musulmane trouvant elle-même ses racines dans les valeurs et crédo de l’islam.
La place de la raison et la science dans le Coran
En effet, et contrairement à ce qui peut être véhiculé, la place de la raison en islam est fondamentale. Elle apparait dans le tout premier verset révélé : « Lis au nom de ton Seigneur qui a créé » (Coran, s. 96, v. 1). Ce verset a ainsi transformé l’âme des premiers Arabes musulmans et bien d’autres peuplades en une seule communauté : « la communauté de iqra ».
Le Coran nous apprend aussi que c’est Dieu Lui-même qui a offert à Adam les moyens de la pensée : « et Il a enseigné à Adam tous les noms... » (s. 2, v. 31). La connaissance et le langage sont donc des dons de Dieu. C’est ainsi que l’être humain hérite de la capacité d’abstraction, de formulation des idées et des concepts ; conceptualisation consubstantielle à la raison et à l’argumentation.
L’islam puise aussi sa rationalité dans le tawhid, c’est-à dire l’Unicité divine ; la religion islamique a combattu l’irrationnel et la superstition, en exaltant l’acquisition du savoir et la réfutation des idoles sous ses différentes formes.
C’est le Prophète Muhammad qui a ouvert cette nouvelle ère, que l’on peut illustrer à partir de l’épisode du décès de son fils Ibrahim. En effet, la Tradition rapporte que lors du décès de son unique fils Ibrahim (dont la mère était Maria la Copte) se produisit une éclipse solaire. Les témoins de ce phénomène naturel y voyaient l’empathie des Cieux se joignant à la tristesse du Prophète. Alors ce dernier répliqua que les lois de Dieu fondatrices de l’Univers ne pouvaient se plier aux péripéties d’un homme, fût-il prophète.
À la lecture du Coran, nous pouvons observer qu’il est parsemé de termes appartenant au champ lexical du savoir et de la raison : 50 fois le verbe « a’qala » (« raisonner », « penser »), 13 fois l’expression « afala ta’qiloun » (« n’allez vous donc pas raisonner ? »). De même que nous trouvons nombre de verbes se rapportant à la science, au savoir et à l’observation : observer, réfléchir, comprendre, savoir, preuve, intelligence… « C’est ainsi que Nous exposons Nos versets pour des gens qui raisonnent », nous dit le Coran (s. 30, v. 28).
Le Coran nous apprend aussi que c’est Dieu Lui-même qui a offert à Adam les moyens de la pensée : « et Il a enseigné à Adam tous les noms... » (s. 2, v. 31). La connaissance et le langage sont donc des dons de Dieu. C’est ainsi que l’être humain hérite de la capacité d’abstraction, de formulation des idées et des concepts ; conceptualisation consubstantielle à la raison et à l’argumentation.
L’islam puise aussi sa rationalité dans le tawhid, c’est-à dire l’Unicité divine ; la religion islamique a combattu l’irrationnel et la superstition, en exaltant l’acquisition du savoir et la réfutation des idoles sous ses différentes formes.
C’est le Prophète Muhammad qui a ouvert cette nouvelle ère, que l’on peut illustrer à partir de l’épisode du décès de son fils Ibrahim. En effet, la Tradition rapporte que lors du décès de son unique fils Ibrahim (dont la mère était Maria la Copte) se produisit une éclipse solaire. Les témoins de ce phénomène naturel y voyaient l’empathie des Cieux se joignant à la tristesse du Prophète. Alors ce dernier répliqua que les lois de Dieu fondatrices de l’Univers ne pouvaient se plier aux péripéties d’un homme, fût-il prophète.
À la lecture du Coran, nous pouvons observer qu’il est parsemé de termes appartenant au champ lexical du savoir et de la raison : 50 fois le verbe « a’qala » (« raisonner », « penser »), 13 fois l’expression « afala ta’qiloun » (« n’allez vous donc pas raisonner ? »). De même que nous trouvons nombre de verbes se rapportant à la science, au savoir et à l’observation : observer, réfléchir, comprendre, savoir, preuve, intelligence… « C’est ainsi que Nous exposons Nos versets pour des gens qui raisonnent », nous dit le Coran (s. 30, v. 28).
Intrication des savoirs dans le Coran
Le Coran invite à la fois à la méditation et au raisonnement. Il est intéressant de voir que ces deux formes de la connaissance n’apparaissent pas comme antagonistes mais, bien au contraire, se complètent et permettent toutes deux à l’être humain de tendre vers la Vérité. « Nous leur montrerons Nos signes dans l’Univers et en eux-mêmes, jusqu’à ce qu’il leur devienne évident que c’est cela (le Coran) la vérité. Ne suffit-il pas que ton Seigneur soit témoin de toute chose ? » (Coran, s. 41, v. 53).
Dans le Coran, il n’y a pas de démarcation artificielle entre les savoirs, puisque tous les savoirs, qu’ils soient profanes ou « religieux », participent (de manière égale) à la découverte de Dieu. « Dis : “Sont-ils égaux ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ?” » Seuls les doués d’intelligence se rappellent » (Coran, s. 39, v. 9).
Cette intrication des savoirs apparaît dans d’autres versets aussi explicites : « En vérité, dans la création des Cieux et de la Terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, il y a certes des signes pour les doués d’intelligence, qui debout, assis, couchés sur leurs côtés, invoquent Dieu et méditent sur la création des Cieux et de la Terre : “Notre Seigneur ! Tu n’as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ! Garde-nous du châtiment du Feu” » (Coran, s. 3, v. 190-191).
Dans le Coran, il n’y a pas de démarcation artificielle entre les savoirs, puisque tous les savoirs, qu’ils soient profanes ou « religieux », participent (de manière égale) à la découverte de Dieu. « Dis : “Sont-ils égaux ceux qui savent et ceux qui ne savent pas ?” » Seuls les doués d’intelligence se rappellent » (Coran, s. 39, v. 9).
Cette intrication des savoirs apparaît dans d’autres versets aussi explicites : « En vérité, dans la création des Cieux et de la Terre, et dans l’alternance de la nuit et du jour, il y a certes des signes pour les doués d’intelligence, qui debout, assis, couchés sur leurs côtés, invoquent Dieu et méditent sur la création des Cieux et de la Terre : “Notre Seigneur ! Tu n’as pas créé cela en vain. Gloire à Toi ! Garde-nous du châtiment du Feu” » (Coran, s. 3, v. 190-191).
La raison : une autre forme de révélation
Les écoles de pensée en islam ont, à des degrés différents il est vrai, toujours fait appel à la raison. L’Histoire a retenu les controverses avec les mutazilites ou encore le débat asynchrone entre Al Ghazali et Averroès (Ibn Rochd). Ce dernier, qui était un commentateur d’Aristote, pensait que la philosophie et plus largement la science ne pouvaient entrer en contradiction avec la Révélation divine.
Plus encore, la recherche de la science (philosophie) est non seulement licite mais plus encore recommandée, voire obligatoire, car Dieu appelle à méditer sur la Création : « Réfléchissez-donc, ô vous qui êtes doués de clairvoyance » (Coran, s. 59, v. 2).
Dans le Traité décisif, d’Averroès, on peut lire : « Puisque donc cette Révélation est vérité, et qu’elle appelle à pratiquer l’examen rationnel qui assure la connaissance de la vérité, alors nous, musulmans, savons de science certaine que l’examen des étants (Création) par la démonstration n’entrainera nulle contradiction avec les enseignements apportés par le Texte révélé : car la vérité ne peut être contraire à la vérité, mais s’accorde avec elle et témoigne en sa faveur. »
Plus récemment, le savant rationaliste Mohamed Abdellah Draz allait dans le même sens dans son ouvrage Les hommes à la découverte de Dieu : « Il y a une réelle compatibilité entre la science et l’islam : s’il est du devoir des religions de cohabiter avec la science sans lui chercher querelle, et s’il est bon qu’elles mettent à profit toutes les connaissances humaines pour y puiser des arguments, il est bon également que les sciences permettent aux religions de compléter leurs lacunes en comblant, grâce aux vérités spirituelles, le vide laissé dans les âmes. »
Comme l’explique Mohamed Iqbal, l’islam englobe tout autant la pensée que d’autres dimensions de l’activité humaine : « La religion n’est pas une affaire compartimentée ; ce n’est ni de la pensée pure, ni du sentiment pur, ni de l’action seule ; c’est une expression de l’homme tout entier » (Reconstruire la pensée religieuse de l’islam).
Plus encore, la recherche de la science (philosophie) est non seulement licite mais plus encore recommandée, voire obligatoire, car Dieu appelle à méditer sur la Création : « Réfléchissez-donc, ô vous qui êtes doués de clairvoyance » (Coran, s. 59, v. 2).
Dans le Traité décisif, d’Averroès, on peut lire : « Puisque donc cette Révélation est vérité, et qu’elle appelle à pratiquer l’examen rationnel qui assure la connaissance de la vérité, alors nous, musulmans, savons de science certaine que l’examen des étants (Création) par la démonstration n’entrainera nulle contradiction avec les enseignements apportés par le Texte révélé : car la vérité ne peut être contraire à la vérité, mais s’accorde avec elle et témoigne en sa faveur. »
Plus récemment, le savant rationaliste Mohamed Abdellah Draz allait dans le même sens dans son ouvrage Les hommes à la découverte de Dieu : « Il y a une réelle compatibilité entre la science et l’islam : s’il est du devoir des religions de cohabiter avec la science sans lui chercher querelle, et s’il est bon qu’elles mettent à profit toutes les connaissances humaines pour y puiser des arguments, il est bon également que les sciences permettent aux religions de compléter leurs lacunes en comblant, grâce aux vérités spirituelles, le vide laissé dans les âmes. »
Comme l’explique Mohamed Iqbal, l’islam englobe tout autant la pensée que d’autres dimensions de l’activité humaine : « La religion n’est pas une affaire compartimentée ; ce n’est ni de la pensée pure, ni du sentiment pur, ni de l’action seule ; c’est une expression de l’homme tout entier » (Reconstruire la pensée religieuse de l’islam).
Sortir de la sclérose et de la frilosité
Or, aujourd’hui, le musulman peine à donner toute la mesure à ces injonctions coraniques invitant les hommes à user pleinement de la raison. Trop de tabous empêchent la réflexion. Hier, c’était la philosophie ; aujourd’hui, c’est la théorie de l’évolution, la paléontologie ou encore l’histoire des sciences islamiques.
Je suis toujours surpris par le niveau de certains débats qui ne peuvent qu’étonner quand on les compare à certaines découvertes scientifiques. Il en est ainsi, par exemple, de l’utilisation du calcul astronomique qui suscite encore une polémique, alors même qu’il y a quelques jours seulement des capteurs ont pu mesurer la présence d’une onde gravitationnelle indiquant la collision de trous noirs situés à plusieurs milliards d’années-lumière de la Terre.
Il est plus que nécessaire de retrouver cette curiosité des premiers temps de l’Islam ainsi que celle de l’âge d’or de la civilisation musulmane pour être pleinement de son temps. Il faut définitivement dépasser cette frilosité ainsi que certains tabous et autres craintes injustifiées.
Ce nouvel élan ne doit pas être perçu comme un danger pour la foi comme le mentionne Mohamed Iqbal : « Mais rationaliser la foi, ce n’est pas admettre la supériorité de la philosophie sur la religion » (ibid.).
Enfin, la rationalité retrouvée devra laisser une place importante à la dimension mystique, car la science ne peut apporter de réponses aux finalités de l’Univers. Mohamed Iqbal (ibid.) nous le rappelle en ces termes : « L’humanité d’aujourd’hui a besoin de trois choses : une interprétation spirituelle de l’Univers, une émancipation spirituelle de l’individu et des principes fondamentaux de portée universelle orientant l’évolution de la société humaine sur une base spirituelle. »
*****
Djilali Elabed est enseignant en sciences économiques et sociales.
Je suis toujours surpris par le niveau de certains débats qui ne peuvent qu’étonner quand on les compare à certaines découvertes scientifiques. Il en est ainsi, par exemple, de l’utilisation du calcul astronomique qui suscite encore une polémique, alors même qu’il y a quelques jours seulement des capteurs ont pu mesurer la présence d’une onde gravitationnelle indiquant la collision de trous noirs situés à plusieurs milliards d’années-lumière de la Terre.
Il est plus que nécessaire de retrouver cette curiosité des premiers temps de l’Islam ainsi que celle de l’âge d’or de la civilisation musulmane pour être pleinement de son temps. Il faut définitivement dépasser cette frilosité ainsi que certains tabous et autres craintes injustifiées.
Ce nouvel élan ne doit pas être perçu comme un danger pour la foi comme le mentionne Mohamed Iqbal : « Mais rationaliser la foi, ce n’est pas admettre la supériorité de la philosophie sur la religion » (ibid.).
Enfin, la rationalité retrouvée devra laisser une place importante à la dimension mystique, car la science ne peut apporter de réponses aux finalités de l’Univers. Mohamed Iqbal (ibid.) nous le rappelle en ces termes : « L’humanité d’aujourd’hui a besoin de trois choses : une interprétation spirituelle de l’Univers, une émancipation spirituelle de l’individu et des principes fondamentaux de portée universelle orientant l’évolution de la société humaine sur une base spirituelle. »
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Djilali Elabed est enseignant en sciences économiques et sociales.
Du même auteur :
De l’universalité de l’islam
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